Depuis deux ans, un phénomène social inédit prend de l'ampleur sur les réseaux : le désabonnement ou blocage massif de personnalités publiques jugées controversées ou déconnectées des réalités. Ce mouvement, souvent spontané mais parfois organisé, touche autant les stars hollywoodiennes que les influenceurs locaux, et s'impose comme une nouvelle forme de militantisme numérique. L'idée est simple : retirer du pouvoir médiatique à ces figures en réduisant leur visibilité et leur audience. Dans l'ère où l'influence se mesure en nombre d'abonnés et en taux d'engagement, ce type d'action équivaut à une sanction publique. Aux origines : du Blockout 2024 à l'« ignoring trend » Le mouvement a gagné une visibilité internationale avec Blockout 2024, né au lendemain du Met Gala de mai 2024. Des internautes, choqués par l'étalage de luxe de certaines célébrités pendant que des crises humanitaires (notamment la guerre à Gaza) secouaient le monde, ont lancé une campagne appelant à bloquer ou se désabonner des stars silencieuses ou perçues comme indifférentes. Les hashtags #Blockout2024 et #CelebrityBlockParty ont rapidement explosé sur TikTok et Instagram, poussant des milliers d'internautes à « couper le son » des comptes de Kim Kardashian, Taylor Swift ou Dwayne "The Rock" Johnson. En parallèle, une variante plus subtile est apparue : l'ignoring trend. Ici, pas de blocage direct, mais un boycott silencieux consistant à ne plus liker ni commenter, afin de faire chuter l'engagement des publications. Des exemples récents qui confirment la tendance Les derniers mois ont vu plusieurs pics de désabonnements massifs : * Janvier 2025 : Snoop Dogg perd plus de 570 000 abonnés sur Instagram et 17 000 sur X (Twitter) après avoir participé au "Trump Crypto Ball", événement célébrant l'investiture de Donald Trump, un choix jugé incohérent avec ses critiques passées contre l'ancien président. Kim Kardashian, associée à l'événement, perd près de 150 000 abonnés. * Juin 2025 : Selena Gomez et Hailey Bieber se désabonnent mutuellement sur Instagram, rompant une trêve médiatique de plus de deux ans. Cette rupture entraîne une vague d'unfollows croisés entre leurs communautés respectives. * Décembre 2024 : un "mass unfollow" viral sur TikTok, baptisé Vexbolts, pousse des millions d'utilisateurs à se désabonner simultanément de comptes célèbres, sans motif politique mais avec un effet viral immédiat. Existe-t-il un équivalent dans le monde arabe ? Si le phénomène n'a pas encore atteint la même intensité dans les pays arabes, on observe des signaux similaires. En Egypte et au Liban, plusieurs influenceurs ont perdu en masse des abonnés après des propos jugés offensants ou un silence sur des causes nationales. En Tunisie, les vagues de désabonnement sont plus ponctuelles et souvent liées à des polémiques locales : * Après certaines prises de position sur des sujets sensibles (principalement religion et sport), des personnalités tunisiennes de la télévision et des réseaux ont vu leurs chiffres chuter. * Des campagnes spontanées de #Unfollow ont ciblé des influenceurs accusés de profiter de leur notoriété sans s'impliquer dans des causes nationales ou sociales. Ces mouvements sont toutefois moins structurés que le Blockout 2024 et restent principalement circonscrits à Twitter (X) et Facebook, les plateformes les plus utilisées en Tunisie. Un nouvel outil de pression sociale Le désabonnement massif devient, au même titre que les boycotts économiques, un outil de sanction et de pression. * Pour le public : un moyen rapide de signifier son désaccord. * Pour les célébrités : une menace directe sur leurs revenus publicitaires et partenariats, souvent indexés sur leur audience. Dans un monde où la réputation se construit et se détruit à la vitesse d'un clic, ignorer ou quitter un compte devient une arme symbolique, mais aux conséquences très concrètes. Et demain ? Si la tendance continue à se mondialiser, on pourrait voir émerger dans le monde arabe des campagnes coordonnées de désabonnement autour de thèmes sociaux ou politiques. L'impact dépendra de la capacité des internautes à se mobiliser collectivement et de l'importance accordée par les marques aux indicateurs d'audience. Reste une question : ce mouvement est-il un levier efficace pour changer le comportement des personnalités, ou seulement un signal éphémère dans un flux constant d'informations ? Commentaires Que se passe-t-il en Tunisie? Nous expliquons sur notre chaîne YouTube . Abonnez-vous!