Suite au maintien, en dernière minute, de Sami Fehri en détention malgré la notification du jugement de mise en liberté adressée par la cour de cassation, le directeur de la prison ayant confirmé en avoir reçu l'avis, les supputations et les interprétations vont bon train, à juste titre d'ailleurs, tant les derniers rebondissements ont laissé pantois plus d'un. Anguille sous roches ? C'est un pas que moult observateurs ont franchi. Des zones d'ombre et des écrans de fumée planent sur ce dossier, d'où foisonnement d'interrogations. Il semble bien que cette question est, d'une part, coincé dans un bras de fer juridique et, d'autre part, marquée par le sceau politique. D'abord comment expliquer ce revirement ? Est-il recevable que la Cour de Cassation se rétracte au dernier moment après avoir bien statué sur l'affaire et prononcé son verdict, en son âme et conscience, et sans équivoque ? Sur quelle base la dernière décision a été prise d'autant plus qu'elle a été communiquée et appliquée séance tenante tard le soir ? Selon le communiqué explicatif publié par le Ministère de la Justice, le premier arrêt de cassation ne se réfère pas à la remise en liberté de Sami Fehri mais concerne uniquement le rejet de la décision de la chambre d'accusation et le renvoi du dossier devant la chambre d'accusation de la Cour d'Appel de Tunis, dans une nouvelle composition. Une question se pose et s'impose : Dès lors que l'arrêt de cassation ne porte pas sur la mise en liberté de Sami Fehri comment se fait-il que le directeur de la prison ait reçu la notification du jugement de mise en liberté ? L'avocat de ce dernier a bien indiqué que le directeur de la prison lui a bien signalé que la mise en liberté était en cours et serait effective dès finalisation de quelques détails de procédure !! D'ailleurs, l'avocat de Sami Fehri, jugeant le maintien en détention illégal et mu par des considérations politiques, a fait part de son intention de traduire en justice toutes les parties impliquées dans l'emprisonnement de son client, notamment le ministère de la justice. Il a précisé que tout est parti d'une simple correspondance du ministère public enjoignant le directeur de la prison de ne pas mettre en œuvre le premier arrêt de cassation. Qui croire ? Le Ministère de la Justice ? L'avocat ? D'ailleurs, est-il admissible qu'un simple courrier soit en mesure de bloquer un arrêt de cassation, rendu en bonne et due forme ? Peut-être que, tout compte fait, le scénario de rétractation est beaucoup plus simple. En effet, dans la même affaire, Abdelwaheb Abdallah a fait l'objet d'un semblable arrêt de Cassation, à savoir la mise en liberté, au même titre que Sami Fehri, décision jugée impensable en haut lieu, compte tenu de la situation sociale délétère. Pour le gouvernement, il n'est pas question qu'Abdelwaheb Abdallah soit relâché quand bien même la décision de justice. Fidèle à sa logique, allant jusqu'au bout de son idée, le gouvernement a décidé de maintenir l'intéressé en prison. Comme Sami Fehri était dans la même situation, le gouvernement a trouvé la parade, craignant vraisemblablement d'être accusé de faire double jeu et d'user de “deux poids, deux mesures” d'autant plus qu'il est épinglé de toutes parts, et a choisi d'en faire de même avec Sami Fehri. Ni l'un ni l'autre ne sera mis en liberté, au mépris des jugements de justices rendus et des droits fondamentaux des victimes. Bafouer la loi ou essuyer la vindicte populaire, la réponse a été toute trouvé, vite et mal !! Qu'un Sami Fehri moisisse quelque temps encore en prison est moins polémique que mettre en liberté Abdelwaheb Abdallah. Quant aux droits, on peut repasser !!