TUNIS (TAP) -''Bordj Louzir'' (un temps à deux voix) de Rabâa Ben Achour-Abdelkéfi, Sud Editions-Tunis, prix spécial du Jury des Assurances Comar 2011, ex equo avec le roman ''Ce qu'Allah n'a pas dit'' de Mohamed Bouamoud. ''Bordj Louzir'' retrace l'histoire d'un monde aujourd'hui disparu. C'est l'évocation d'un passé non lointain qui remonte à quelques décennies. Native à l'aube des années quarante, l'auteur est issue d'une famille tunisoise (Médina de Tunis-La Marsa) enracinée dans une bourgeoisie réputée pour son savoir, ouverte à la modernité et imprégnée d'une éducation religieuse. Elle évoque, en faisant parler souvent sa soeur d'où le sous-titre ''un temps à deux voix'' des merveilleuses pages ensoleillées, un peu à la manière de Marcel Proust dans ''A la recherche du temps perdu'', faisant revivre son enfance, son adolescence et son milieu familial patriarcal, entre les différentes écoles et les pensionnats de Tunis. On la voit tantôt à la rue du Pacha où se trouvait la maison de son illustre grand père, tantôt à Radès. C'est là le secret d'un brassage civilisationnel entre l'enracinement dans l'authenticité et l'ouverture sur la culture occidentale acquise grâce à sa formation universitaire, couronnée par une agrégation et un doctorat en lettres et civilisations françaises. Ce qui se révèle dans ce texte littéraire (récit) de haute facture, c'est l'attachement de l'auteur à son milieu familial, sans fanatisme ni chauvinisme, mais avec une certaine teinte légitime de fierté et de nostalgie. On y remarque aussi un élan de patriotisme et de militantisme, dans le sens de la confirmation de l'identité arabo-islamique, face au colonialisme. D'ailleurs, l'auteur fait la lumière sur les rapports étroits entre ses parents et des leaders du mouvement national tunisien, notamment le néo-destour. Le livre se termine par un chapitre illustrant la victoire de Bourguiba et l'avènement de l'indépendance tunisienne, dans une ambiance de liesse populaire. Un récit savoureux et attachant.