L'audition de la ministre du Tourisme et du ministre auprès du ministre de l'Intérieur chargé de la sécurité nationale qui a eu lieu le vendredi 9 mai à l'Assemblée nationale constituante, a permis à des spécimens, de plus en plus visibles sur les écrans de télévision, de se lancer dans une phraséologie lourde, entretenant l'amalgame entre Juifs et israéliens, de montrer qu'ils sont réellement des tigres… en papier. C'est leur unique façon de jouer leur survie politique. Ils se la jouent gardiens du temple palestinien là où ils n'ont cessé de fuir leurs responsabilités politiques pour n'avoir pas pris à pleines mains les questions de sécurité, de développement, de lutte contre les marginalisations. Alors que la crédibilité politique de ces spécimens engendrés par les « élections du 23 octobre 2011 » ne cesse de reculer, ils sautent sur toutes les occasions pour jouer leur numéro de cirque. La diabolisation des deux membres du gouvernement à l'occasion de cette audition est plus qu'absurde. Et si les spécimens en question se sont enkystés depuis bientôt trois ans à l'ANC, ils sont aussi la mauvaise conscience d'une certaine élite politique et médiatique qui n'arrive pas à analyser ses insuffisances politiques, ses manquements culturels et sa défaite intellectuelle. Le discours développé par les intervenants et leurs agissements au cours cette audition que certains considèrent –non sans trop de mauvaise foi politique comme un mécanisme de démocratie et comme un grand acquis de la Tunisie de l'après 14 janvier 2011- semblent réunir tous les éléments pour faire de cet non-évènement politique la parfaite illustration de la mise en crise d'une grande institution de l'Etat. La situation est tellement grotesque et illustratif de la faillite d'une certaine élite politique qu'elle décourage toute volonté de compréhension de la psychologie des protagonistes. Non par désintérêt pour l'ANC mais par simple référence à l'évidence : les clichés du nationalisme arabe sont des œillères qui empêchent de voir les réalités de la question palestinienne dans sa complexité et dans son contexte. Là encore, on peut gloser sur l'extrémisme qui ne favorise que l'extrémisme et la haine qui n'engendrent que la haine et leurs effets collatéraux. En effet, le discours des populistes qui siègent à l'ANC est un discours d'un autre temps et d'une autre géopolitique. L'enchaînement qu'ils font de la cause à l'effet (les touristes- pèlerins juifs porteurs de passeport israélien et la normalisation avec l'Etat d'Israël) ne fait que diluer le sens de la responsabilité par rapport à la question palestinienne jusqu'à la faire disparaître. Les données de l'histoire sont là pour le confirmer. Alors, il est peut être temps que « les représentants du peuple » à l'ANC cessent de parler au nom du peuple. Plus que jamais, l'exigence d'une maîtrise du destin palestinien par les Palestiniens eux-mêmes s'affirme de façon concrète pour mettre fin à toutes les surenchères qui n'ont fait jusque là que nuire aux Palestiniens et à leur combat. Ce qui amènera –mais ce n'est pas sûr !- les populistes à s'accrocher à la vraie bataille des Tunisiens : permettre à la Tunisie de reprendre la vie économique et partager équitablement les fruits de la croissance dans la paix et la sécurité. L'enjeu devient un enjeu de courage dont Jean Jaurès avait déjà dit : «Ce n'est pas de subir la loi du mensonge qui passe.» Etre solidaire des Palestiniens dans leur combat pour la libération de leur terre, implique une éthique politique diamétralement opposée au folklorisme et au lyrisme qui se trouvent au fondement de l'imposture des députés-tigres en papier.