«Nous sommes actuellement dans une approche curative, et il faut passer à une approche préventive en matière de lutte contre la corruption. Nous sommes en train de traiter les cas de corruption qui ont été identifiés, mais malheureusement nous ne sommes pas en train de nous équiper pour réellement avoir une politique volontariste et avant-gardiste en matière de lutte contre la corruption», a déclaré Kamel Ayadi, représentant régional de Global Infrastructure Anti-Corruption Center (GIACC) et ancien président de la Fédération Mondiale des Organisations d'Ingénieurs, lors de la conférence de presse tenue à l'occasion de la célébration de la Journée mondiale de lutte contre la corruption. L'objectif de cette conférence est de faire savoir comment passer du curatif au préventif. Il est, selon M. Ayadi, indispensable de parler de la corruption et de remplir les journaux par les actes de la corruption qui ont été identifiés, mais cela ne suffit pas. «Il faut en fait imposer la mise en place des mécanismes et des outils de lutte contre la corruption aux différents secteurs», suggère M. Ayadi. Suite à la publication du récent rapport du Transparency International dont la Tunisie a régressé de 14 points dans le classement pour se situer au 73ème place, M. Ayadi a précisé que cette dégradation n'est pas vraiment alarmante. Par contre, quand on analyse de façon objective et profonde, on s'aperçoit qu'il faut être vigilant et prendre ce classement en considération. «L'Index de la perception de la corruption est un index composite. Il est calculé à partir de sources d'informations dont le nombre varie entre 3 et 17 sources. Ces dernières sont fournies par environ 13 institutions. Puisque le phénomène de la corruption est un phénomène caché, il est ainsi très difficile de l'évaluer. Et c'est d'ailleurs pour cette raison que l'Index est désormais basé sur la perception et non pas sur des données empiriques», a précisé M. Ayadi. L'obligation de la mise en place des mécanismes Avant d'identifier les mécanismes et les outils qui devraient être mis en place pour lutter contre la corruption, M. Ayadi a tenu à préciser que la démocratie et la liberté d'expression ne suffisent pas pour éradiquer la corruption, «On peut avoir la démocratie et on peut aussi avoir la liberté d'expression, mais si on ne dispose pas des outils intégrés dans la pratique managériale de lutte contre la corruption, on ne peut absolument pas limiter ce phénomène», a insisté M. Ayadi. En fait, cette phase de transition que connaît la Tunisie est propice pour l'explosion même de la corruption, «c'est ce qu'on a constaté d'après les études qu'on a élaborées. En fait, plus le processus démocratique avance plus le niveau de corruption augmente, et ce à cause de la course vers les nouvelles situations de rente», a précisé M. Ayadi. Il ajoutera également qu'après un certain nombre d'années, lorsque les mécanismes de la démocratie sont rodés, on peut s'attendre à une baisse de la corruption. Mais ceci n'est pas toujours évident, on peut par contre passer à un scénario pire où la corruption pourrait augmenter comme on l'observe par exemple au Liban classé 134ème, alors qu'il est un pays où il a une tradition dans la liberté d'expression. «C'est ça mon message fort pour les partis politiques et le prochain gouvernement : il faut passer à la mise en place des mécanismes de lutte contre la corruption», conseille M. Ayadi. A cet égard, l'ancien président de la FMOI a présenté brièvement les 119 actions que le nouveau gouvernement tunisien devrait mettre en place pour limiter le phénomène de la corruption. Il s'agit en fait des actions identifiées par Global Infrastructure Anti-Corruption Center à partir de la meilleure pratique au niveau mondial. Ces outils sont classés par catégories dont chacune est destinée au gouvernement (justice et organes de contrôle), aux entreprises, aux associations et aux bailleurs de fonds.