Des experts en entreprises se sont penchés sur le cas des entreprises familiales. Leurs conclusions, loin d'être étonnantes, méritent d'être portées à la connaissance de tout un chacun. Les auteurs de cette enquête estiment que «les entreprises familiales représentent 75% des entreprises en Europe, 60% des sociétés cotées aux Etats-Unis et quasiment 100% de l'économie en Asie ou au Moyen-Orient». Leurs performances sont souvent bien supérieures à celles de leurs consoeurs à l'actionnariat non familial. Les experts battent en brèche certaines idées reçues, lorsqu'ils affirment que les entreprises familiales ne sont pas toutes des PME. Il est évident que pour 80% d'entre elles, «c'est le magasin du coin», concède Joachim Schwass, professeur de «Family Business» à l'institut de management suisse IMD. Toutefois, il existe de grands noms légendaires comme BMW, Carrefour, Mars, Toyota ou encore Wal-Mart qui emploie 1,3 million de salariés à travers le monde. Autre constat : Certaines d'entre elles comme Peugeot, fondée au début du 19ème siècle, ou Ford, aujourd'hui dans sa 5ème génération, plongent leurs racines dans un passé parfois très lointain. Pour les experts, c'est au Japon qu'officient les plus anciennes d'entre elles, comme l'ébéniste Kongo Gumi, créé au 7ème siècle, ou le Hoshi Hotel, dans sa 46ème génération! Les constats ne s'arrêtent pas là, puisque selon des études présentées lors de la réunion du Réseau des entreprises familiales (FBN), qui s'est tenue à Bruxelles du 14 au 16 septembre 2005, les entreprises familiales présenteraient des taux de rendement de l'actif (ROA) de 20 à 30% supérieur à ceux des sociétés non-familiales. La peur de l'autre Dr Joachim Schwass souligne que «les entreprises familiales sont avantagées car elles pensent en termes de prochaine génération (...) et agissent en fonction de ce qui est le mieux pour leurs enfants», alors que les autres réfléchissent, dans le meilleur des cas, à un horizon de 5 ans. Par ailleurs, les auteurs considèrent que le chevauchement entre propriétaire et direction est un atout, dans la mesure où, dans les sociétés non familiales, «les propriétaires surveillent les managers, qui n'aiment pas être surveillés», ce qui provoque des conflits internes. Ils estiment également que les entreprises familiales ont «un meilleur discernement de leurs propres affaires», explique le Dr Schwass, et sont moins dépendantes de consultants extérieurs. Pour sa part, Luc Bertrand, PDG de l'entreprise familiale belge Ackermans & Van Haaren, «les entreprises familiales pourraient utiliser des consultants mais elles ne veulent pas dévoiler leur expérience aux consultants», parce que c'est un mouvement dans les deux sens, avec un risque que les consultants extérieurs fassent bénéficier des concurrents du savoir-faire ainsi acquis. Toujours dans le même ordre d'idées, Dr Schwass, voyant que certaines entreprises familiales veulent, aujourd'hui, entrer en Bourse, avertit qu'elles devraient faire très attention, car un tel changement aurait un impact sur la culture de la famille. L'explication est simple : à partir du moment où l'entreprise entre Bourse, la famille doit soudain accepter l'idée que ce n'est plus elle qui commande, mais le marché. Ceci ne l'empêche pas de percevoir une certaine évolution des entreprises familiales dans la transparence. Puisque, de l'avis des experts, même les plus grandes d'entre elles continuent à jouer dans une parfaite opacité en cachant leurs vrais chiffres. Absence de plan de succession Comme on l'a vu, tout n'est pas rose pour les entreprises familiales, qui doivent également faire face à des difficultés de succession, ce qui constituerait la principale cause de leur mortalité. A ce niveau, les auteurs de l'étude constatent que seules 12% survivent à la 3ème génération et 3% à la quatrième. En Europe, les entreprises familiales dénoncent essentiellement les frais élevés de succession. On apprend que des concessions ont été faites mais il y a encore des zones à problème comme la France et l'Allemagne. Le président du FBN, Hans Jacob Bonnier, souligne que si ces entreprises tendent à défendre la tradition, elles n'en oublient pourtant pas l'innovation. Et il en donne la preuve : le conglomérat allemand Haniel, en 10 ans, a changé l'origine de ses revenus à 90%, en mettant sur le marché de nouveaux produits.