La Tunisie est connue pour être mal dotée en ressources naturelles en eau. Avec 459 m3 par habitant, elle fait partie des pays les moins bien nantis en ressources hydriques renouvelables. Dans ses diatribes d'antan à l'endroit de Tunis, le colonel Kadhafi, se référant aux conclusions d'audits occidentaux, avait même prédit à la Tunisie le sort d'un pays qui devrait mourir de soif. Aujourd'hui, la Tunisie, en dépit de limites hydriques objectives et d'un déficit qui devrait se pointer avec acuité à l'horizon 2030, est en droit de se targuer d'avoir développé une des meilleures infrastructures hydrauliques du tiers monde et d'avoir optimisé l'exploitation de son potentiel mobilisable. Les stratégies de mobilisation des eaux exécutée, durant la dernière décennie, ont permis de doter le pays d'une large infrastructure hydraulique comportant 29 grands barrages, 200 barrages collinaires, 766 lacs collinaires et plus de 3.000 forages et 151.000 puits de surface mobilisant 86% de l'ensemble des ressources en eau exploitables en 2006. Cette infrastructure hydraulique a permis de répondre aux besoins en eau des différents secteurs économiques du pays et plus particulièrement en eau potable, l'irrigation, le tourisme et l'industrie. Ainsi, l'alimentation en eau potable des zones urbaines est actuellement couverte à 97%, celle des zones rurales à 91,6%, contre seulement 60,50% en 1994 et 35% en 1987. A moyen terme, les projets hydrauliques programmés, dans le cadre du XIème Plan (2007- 2011), permettront de mobiliser 95% des ressources conventionnelles comme le prévoit la stratégie complémentaire de mobilisation des ressources en eau. Au delà de cette échéance et compte tenu de la croissance des besoins en eau, le pays aura, probablement, de plus en plus tendance à développer des ressources dites non conventionnelles : traitement des eaux usées, dessalement d'eau de mer (dont le coût est en baisse régulière depuis quelques années), mais aussi amélioration des réseaux de distribution afin de réduire les pertes dues aux fuites notamment. C'est, entre autres à des fins de dessalement d'eau de mer et des eaux saumâtres que la Tunisie a décidé de construire, d'ici 2020, une centrale nucléaire à des fins pacifiques. C'est dans la même optique d'adaptation à cette nouvelle donne que la Tunisie négocie actuellement le financement avec les bailleurs de fonds (Banque mondiale, Agence française de Développement (AFD) et la Banque d'aide au développement allemande KWF) d'un second financement du projet d'investissement dans le secteur de l'eau, (PISEAU II). Une journée de réflexion consacrée à l'évaluation des principaux résultats de la première phase du projet d'investissement dans le secteur de l'eau (PISEAU I) et à la définition des orientations de (PISEAU II) s'est ouverte, jeudi (14 décembre 2006), à Tunis. Formulé sur 10 ans avec l'objectif de promouvoir la gestion intégrée et la conservation des ressources en eau, la première phase (PISEAU) est en cours d'achèvement et un PISEAU II est envisagé à partir de 2008. Le but de cette journée est de définir les grandes orientations que pourrait prendre PISEAU II, ses objectifs et composantes ainsi que le processus de sa formulation. Dans sa première phase, PISEAU a visé l'amélioration des conditions de vie dans le monde rural, à travers la promotion de réformes et le financement d'investissements qui renforceront la viabilité de l'irrigation, la maîtrise des conditions d'utilisation des eaux souterraines, et un meilleur accès à l'eau potable dans les zones rurales. Les orientations de PISEAU II seront définies à la lumière des limites que l'exploitation en eau conventionnelle risque d'atteindre dans un proche avenir et du changement stratégique opéré par la Tunisie en la matière. Selon un responsable du ministère de l'Agriculture et des ressources hydrauliques, en l'occurrence, Mounir Boumessouer, Chef de cabinet du ministre de l'Agriculture, la nouvelle stratégie sera axée, essentiellement, sur une meilleure maîtrise de la demande. La stratégie arrêtée vise à mettre en place des systèmes de tarification adaptés aux secteurs de l'eau potable et de l'irrigation. Objectif : améliorer le recouvrement des coûts et inciter à la valorisation économique de la ressource disponible. Décryptage : l'eau sera facturée plus chère. A bon entendeur ! Il s'agit également de développer des programmes d'économie d'eau pour une meilleure préservation de la ressource, de faire participer les usagers à la gestion de l'eau au moyen des Groupements d'Intérêt Collectif, de valoriser les ressources en eau non conventionnelles par la réutilisation des eaux usées traitées en agriculture et le dessalement des eaux saumâtres pour les besoins de l'eau potable, de protéger la qualité des ressources contre la pollution par un vaste programme d'assainissement. Tout un chantier