Le débat sur la pauvreté, ses origines, son calcul et les moyens de l'éradiquer définitivement vient d'être relancé, à l'occasion, de la publication, mardi 24 juillet 2007, des résultats de l'enquête nationale sur les dépenses, la consommation et le niveau de vie des ménages 2005. Selon cette enquête, le taux de pauvreté en Tunisie continue de reculer. Il est passé de 4,2% en 2000 à 3,8% en 2005.
Le nombre des pauvres a reculé de 183 mille, en une dizaine d'années, passant de 559 mille en 1995 à 399 mille en 2000 et à 376 mille en 2005, regroupés dans 59 mille familles, et ce, en dépit d'une augmentation du nombre de la population totale d'un million d'habitants au cours de la même période.
A première vue, il s'agit d'une performance à l'actif du gouvernement tunisien. D'ailleurs, le ministre du développement et de la coopération internationale, Mohamed Nouri Jouini, qui a présenté les résultats de cette enquête, n'a pas manqué de l'exploiter politiquement en tant qu'indicateur fort positif de la réussite du modèle de développement tunisien qui se fonde sur l'indissociabilité entre le social et l'économique.
Mieux, en responsable averti, il a eu le grand mérite de le reconnaître. Il a même accepté le discours contradictoire.
C'est que le taux de pauvreté peut être calculé de plusieurs manières différentes. Pour les «économicistes», amateurs de pourcentages et férus des statistiques des institutions de Bretton Woods (FMI, Banque Mondiale..) , le taux de pauvreté est déterminé en termes monétaires.
Autrement dit, est pauvre, toute personne qui dispose d'un ou de deux dollars par jour pour survivre. C'est le cas de la méthode utilisée par la Tunisie. Même si M. Jouini tient à définir le pauvre comme celui qui ne peut pas subvenir à ce qu'il appelle « les besoins recommandés ».
Il faut admettre que l'enquête sur les dépenses, la consommation et le niveau de vie des ménages 2005 a beaucoup innové. Les statisticiens tunisiens ont abandonné la méthode de calcul du taux de pauvreté adoptée, depuis, 1980.
La nouvelle méthode se fonde sur des données actualisées et sur le choix d'une tranche de population référentielle unique pour les milieux urbain et non urbain. Auparavant, les statisticiens utilisaient deux échantillons, l'un pour le monde rural et l'autre pour le monde urbain pour calculer le taux de pauvreté.
Autre nouveauté : la nouvelle méthode utilise « les besoins recommandés » en calories pour évaluer le seuil de pauvreté en matière d'alimentation. Le niveau de « ces besoins recommandés » dépasse les besoins minimum utilisés par l'ancienne méthodologie.
L'autre méthode de calcul est utilisée par le Programme des Nations unies pour le développement humain. Il s'agit d'évaluer, à travers l'Indice de développement humain, IDH » le degré de pauvreté en termes de misère humaine et de qualité de vie tolérable. La pauvreté est perçue, ici, comme une humiliation, un état d'esprit, une incapacité d'accès, un état de manque dans lequel une personne est privée des conditions de vie essentielles et ne disposant pas de nécessités aussi vitales que la nourriture, l'eau, les soins sanitaires, le logement, l'habillement, l'éducation.
Si on utilise cette méthode pour calculer le taux de pauvreté en Tunisie, ce dernier serait dans la fourchette de 15 à 19%. C'est l'analphabétisme de la jeune fille rurale qui alourdit ce taux.
Heureusement, la prise de conscience des pouvoirs publics de cette lacune est très élevée. Dans la note d'orientation de la décennie 2007-2016 on lit notamment : «Eu égard aux exigences du développement fondé essentiellement sur l'appropriation des qualifications et compétences par les ressources humaines, l'action portera sur la réduction du taux national d'analphabétisme à moins de 8%, d'ici l'année 2016 ».
Dans l'ensemble, il faut reconnaître que même avec cette méthode du PNUD, le taux de pauvreté n'a cessé de reculer et que la Tunisie satisfait, actuellement, les trois quarts (3/4) les critères du PNUD et la plupart des objectifs du millénaire. Donc acte