Ce titre vous semble insensé ou provocateur sans doute. Mais à l'analyse des faits, vous vous rendrez compte que c'est loin d'une provocation. Dans les années 60, au moment des indépendances des pays africains, le capitalisme battait son plein, et la guerre froide était à son apogée. D'où des millions voire des milliards de dollars déversés à tour de bras par les pays dits alors du bloc de l'Est dans maints pays africains en vue d'aider ces derniers à se développer, affirmait-on : construction de routes, d'hôpitaux, de barrages hydroélectriques, d'écoles, d'usines On a même eu droit à des cadeaux du genre 'véhicules chasse-neige'' (des pays où on a jamais entendu voire vu de la neige ). Le résultat, on le connaît.
Aujourd'hui, presque 50 ans après, alors que l'accès à l'argent des pays dits capitalistes devient de plus en plus difficile, un pays naguère dit socialiste vient à la rescousse, semble-t-il, de ces mêmes pays toujours en mal de développement.
En effet, la Chine, puisque c'est d'elle dont il s'agit, à l'instar des pays occidentaux il y a cinq décennies, apporte de l'argent facile dans la plupart des pays du continent, du nord au sud, contre (cette fois-ci) l'exploitation de leurs ressources minières et/ou l'écoulement de ses marchandises sur leurs marchés.
Alors, des questions essentielles se posent aujourd'hui pour savoir si l'argent facile est à même de permettre le développement d'un pays au sens économique du terme. Est-ce que l'Afrique n'est pas tout simplement victime de sa propre mauvaise gestion de ses deniers publics ? Est-ce que le continent n'est pas en train de rater l'occasion et l'opportunité d'assainir ses finances publiques ? Mais surtout, lorsque leurs ressources naturelles seront épuisées parce qu'elles ne sont pas inépuisables-, que restera-t-il ? Comment envisager dans ce cas de se développer.
En tout cas, il est certain que la Chine ne déversera jamais autant de milliards de dollars que ceux reçus par l'ensemble des pays du continent entre 1960 et 1990. Ce qui nous fait penser que la Chine, confrontée à des besoins énormes en matières premières, est tout simplement en train de ruiner les Africains. La situation est d'autant plus grave que ce pays ne s'intéresse pas au développement de l'Afrique. La Banque mondiale, le FMI et l'Union européenne ont essayé en vain d'alerter sur le risque que l'argent facile des Chinois peut engendrer pour les pays africains. Quant à la Banque africaine de développement, on ne sait pas sa position
Dans ce cas, est-il possible de faire entendre raison aux dirigeants africains qu'ils sont en train de conduire leurs peuples à la débâcle la plus totale ?
Voyons les choses de façon plus concrète. Selon les données de la Conférence des Nations unies pour le commerce et le développement (CNUCED), sur les 54 pays que comptent le continent africain, seulement 7 n'ont pas encore reçu des investissements, ou du moins ne les ont pas déclarés.
Au total, à la fin de l'année 2005, les investissements chinois en Afrique s'élevaient à près de 1,6 milliard de dollars (avec une forte concentration en Afrique du Nord avec près de 980 millions de dollars, le Soudan lui seul ayant accaparé plus du tiers, 352 millions)); et si l'on considère que les besoins de la Chine ont explosé au cours des trois dernières années organisation des Jeux Olympiques oblige-, alors il faudrait multiplier ce chiffre par deux voire trois.
Officiellement, la plupart des IDE chinois en Afrique vont dans la construction d'infrastructures et à la valorisation des ressources naturelles, pétrolières et minières, cela s'entend. En théorie donc, c'est quelque chose d'important pour ces pays, mais en théorie seulement, car dans la réalité, c'est une autre affaire, puisque les dirigeants africains en tout cas la plupart d'entre eux- appliquent systématiquement l'adage 'la charité bien ordonnée commence par soi-même'', autrement dit, ils se servent d'abord, puis le reste (s'il y en a) ira au reste de la population. Alors inutile de vous expliquer ce que cela veut dire, et donc où va l'argent des Chinois.
Bien entendu, ce sont les pays qui regorgent de matières premières dont la Chine a grandement besoin qui sont les premiers bénéficiaires : le Soudan, l'Algérie et le Nigeria pour le pétrole ; la Guinée pour la bauxite, la RD du Congo pour le cuivre, la Zambie pour le Zinc, et les autres
Mais là où existe le danger, c'est que les Chinois commencent maintenant à s'intéresser même aux 'petits boulots'', évinçant ainsi les autochtones sur ce créneau (vente des beignets par exemple ). Sans être inquiétés, car si c'était le cas, les autorités de Pékin couperaient automatiquement 'les vivres'' des pays en question. Il faut donc les laisser faire.
Voilà que l'on retombe sur cette phrase de l'agronome français, René Dumont, qui avait fait couler beaucoup d'encre dans les années 70 : 'L'Afrique est mal partie''. Mais on se demande même si elle est partie. Mais que voulez-vous, la vie des nations est ainsi faite !