"la déclaration de Tunis'' est-elle suffisante ? Par Abou Sarra
Les 300 scientifiques, invités à Tunis, dans le cadre d'une conférence internationale sur «l'avenir des terres sèches» pour réfléchir sur les moyens d'endiguer la progression alarmante de la désertification des terres arides et d'en évaluer les conséquences écologiques, humaines et socioéconomiques, ont clos, mercredi 21 juin, leurs travaux par l'adoption de «la déclaration de Tunis». Cette déclaration définit les priorités à suivre en matière de recherche sur l'écosystème des zones arides et désertiques, sur les moyens de leur réhabilitation et sur les mécanismes à mettre en place pour améliorer les conditions de vie dans ces contrées. Le document met en exergue l'enjeu d'une gestion intégrée des ressources en eau dans le contexte de signes annonciateurs d'une crise de l'eau. Il souligne en même temps l'impératif de mener des processus d'évaluation et de prévision continus de la dynamique des écosystèmes dans ces zones. Cette profession de foi retient l'agriculture, le pastoralisme et l'écotourisme comme des activités porteuses à même de réduire la pauvreté des habitants des zones sèches et d'en améliorer les conditions. En amont, le document recommande d'agir sur l'éducation, le partage des connaissances et la sensibilisation au challenge de réhabiliter les zones arides où vivent 2 milliards de personnes. Le texte appelle les instances de décision et la communauté scientifique à redoubler d'efforts pour la mise en oeuvre de projets de recherche pour le développement au service des communautés locales des zones sèches tout en veillant à intégrer les technologies modernes et les connaissances traditionnelles en vue d'assurer le développement durable dans ces zones. Par delà ces bonnes intentions des scientifiques, la déclaration de Tunis constitue, de toute évidence, un important pas sur la voie d'une prise en charge des zones sèches par la communauté internationale. Elle demeure, néanmoins, timide et défensive au regard des efforts déployés par d'autres communautés pour prévoir et lutter contre d'autres catastrophes naturelles. A titre indicatif, les ouvrages mis sur pied par les Hollandais, Japonais et Nord-américains pour lutter contre le tsunami (onde océanique engendrée par un séisme ou une éruption volcanique) méritent d'être signalés ici. Forts d'une bonne gouvernance, d'apports technologiques appropriés et de la solidarité internationale, les pays des zones sèches peuvent surmonter le déficit hydrique et faire reculer l'inquiétante avancée du désert. Ce vu pieux ne doit pas nous faire oublier cette réalité. La désertification menace plus de 1,2 milliard de personnes dans 110 pays parmi les plus pauvres, tandis que deux milliards, soit un tiers de la population mondiale, vivent en zones arides ou semi arides (41% de la planète). Les pertes agricoles sont estimées à 42 milliards de dollars par an. L'Organisation des Nations unies (ONU) évalue à 2,4 milliards de dollars le coût annuel du combat contre l'avancée du sable, phénomène qui n'a cessé d'empirer, entraînant famine, insécurité, tensions sociales et migrations massives des habitants du Sud vers le Nord. Une soixantaine de millions de personnes devraient ainsi abandonner les zones désertiques d'Afrique sub-saharienne pour gagner le Nord du continent et l'Europe, d'ici 2020, selon l'ONU. C'est pour dire que l'enjeu de la désertification est loin d'être uniquement écologique.