KAIROUAN, gouvernorat mythique, riche de ses cultures, de sa diversité et de son potentiel socioéconomique ouvre ses portes au monde entier pour célébrer son identité comme capitale de la culture islamique en 2009. Vers 671, le conquérant Oqba Ibn Nafii, compagnon du prophète Mohamed, arrête ses cavaliers dans une vallée à mi distance entre les rivages de la côte est tenue par les Byzantins et la chaîne montagneuse de la grande dorsale où les Berbères finissent de rassembler leurs forces. Stratégiquement ce choix fut judicieux. D'un simple camp de retranchement, elle n'a cessé de se développer pour devenir le plus grand centre de rayonnement civilisationnel au Maghreb. Après une certaine de périodes, l'installation de la dynastie des émirs aghlabites (800 après JC) a fait doter KAIROUAN de ses plus beaux monuments. Climat et hydrographie faisant, le labeur d'une région tout entière et la détermination de la population a font jaillir un véritable espace économique et culturel fertile et en mouvement perpétuel. L'agriculture, par exemple, source de richesses et de satisfaction, se développe : oliviers, céréales, arbres fruitiers, élevages, apiculture... ont fait reculer la végétation spontanée. Elle constitue la principale activité économique de la région de Kairouan. Elle est dominée par l'élevage et la céréaliculture avec une progression notoire de la polyculture et de l'arboriculture qui s'appuient sur des systèmes d'irrigation de plus en plus performants. Alimentées à partir des oueds et des pluies, les nappes de la Plaine de Kairouan, qui sont exploitées à 70% de leur potentiel, constituent les ressources essentielles en eaux souterraines de la Tunisie centrale. KAIROUAN s'est donné aussi une activité artisanale : ciseleurs, tisserands, selliers mais surtout l'art de la tapisserie au point noué à la main (zarbia, alloucha et le margoum). Elle développe aussi d'autres types d'artisanats : objets de cuisine en cuivre, sellerie en fine décoration, ferronnerie d'art, nattes et tresses des couffins et d'éventails surtout le burnous et jebba, les gants de toilettes tissés (el kassa) et la kesswa. Dans ce cadre géographique et traditionnel naturel et sa physionomie propre, la grandeur de Kairouan est composée de délégations d'expériences variées : Sidi Amor Bouhajla, Hajeb Layoun, Sidi Ali Ben Nasrallah, El Ala, Haffouz, Sbikha, Ouslatia, Chbikha et Chrarda forment un ensemble de solides traditions et d'unité profonde. La maturité du capital humain et de son courage : artisans, commerçants, fonctionnaires, propriétaires agricoles et fonciers, intellectuels, homme de l'art, argentiers... fortement structuré et conscients de leur destin, uvrent pour développer les acquis et créer de la richesse indispensable au maintien d'une vie communautaire harmonieuse. Jadis, et parce qu'elle affichait cette force -et essentiellement son identité arabo-musulmane, nous, génération de l'indépendance, incités à vivre ailleurs par manque de débauchées (d'autres plus âgés que nous ont précédé), avons été témoin de la marginalisation de notre région qui restait à l'écart des grandes réformes et projet (sauf en cas de grande nécessité), où la modernisation locale était superficielle et trop limitée. C'est que, depuis un peu plus que deux décennies (à partir des années 85/90) et que se succèdent des véritables actions de rénovation en profondeur, l'élan de développement est sans précédent, propulsant Kairouan pour jouer son rôle de pôle d'attraction régional de bonne qualité avec un positionnement de relais de transmission entre le nord, le centre et le sud du pays. Une réalité qu'observe chaque visiteur ou randonneur. La page tournée, la région de Kairouan a bâti son socle de développement administratif et économique et bénéficie des progrès lui offrant toutes les solutions pour résoudre une bonne partie des problèmes que posent son adaptation et son développement. Les moyens archaïques pour l'agriculture, par exemple, ont laissé la place au système d'exploitation moderne développant des récoltes et des rendements honorables des investissements. Le niveau de vie se rapproche des autres régions, chassant ainsi la pauvreté et l'ignorance, sans oublier le développement des infrastructures, des équipements sociaux, des logements de qualité, des progrès dans les sujets relatifs à l'environnement (Kairouan primé à plusieurs occasions). Voici ce qui caractérise notre belle région. Dotée de moyens financiers non négligeables, les banques et les établissements financiers ont trouvé un terrain favorable pour soutenir l'ensemble des activités économiques : activité industrielles et de transformations, PMI, artisanale, PME, services, agricole Toutes les délégations sont concernées et l'échange inter centre d'exploitation est très fertile. La productivité s'améliore et la demande locale explique la persistance d'une production locale artisanale, agricole et industrielle de bon niveau. La thésaurisation a laissé la place à une épargne en vue de l'emploi dans les secteurs productifs. Des chantiers publics d'emploi sont mis en place ainsi que des organismes et des programmes de mise en valeurs sont fonctionnels et contribuent à la valeur ajoutée longuement espérée, de même que l'intégration de la femme dans le circuit économique est totale. Autant de réalisations essentielles qui font que la région de Kairouan est devenue une plateforme d'échanges à bien des égards. Des signes majeurs d'une évolution sous l'impulsion de l'ère du Changement qui a rapidement cumulé et étendu ses effets. Kairouan, ainsi mise à niveau, devient un espace captif pour les investisseurs privés originaires ou autres pour accompagner cet élan. L'augmentation des besoins et la dynamique de nos entrepreneurs pour des activités agricoles, touristiques, de bâtiment, industries alimentaires, transport, immobilier adossé aux incitations et aides publiques contribuent certainement au maintien d'une croissance nécessaire aux grands chantiers de l'emploi régional. En favorisant ce développement économique du gouvernorat, fertile, on contribue à créer du travail pour la majorité des autochtones et assurer ainsi un développement harmonieux de ses moyens et de ses besoins. L'originalité de Kairouan, c'est la rapidité avec laquelle, en si peu d'années, la région a pu intégrer la dynamique du circuit économique national. Historiquement, elle fut avec Bagdad, Ispahan, Bassorah, Samarcande, Kaboul, Tombouctou, Cordoue, Tolède, un des principaux centres du commerce musulman. Les ports de Syrie et d'Egypte sont des ports d'arrivée des caravanes venues de l'Asie. Ils renferment d'immenses entrepôts et réexpédient des marchandises dans l'espace méditerranéen. L e commerce constituait alors un puissant stimulant pour l'agriculture et l'industrie. Au fil du temps, les générations successives ont effectivement beaucoup emprunté, mais la diversité des sources est telle et la manière dont elles ont géré les échanges ont fini par créer des nouveaux adeptes, fort connus à l'échelle nationale et internationale (la liste est longue) de la culture, de la science, de la politique, de l'associatif, de l'entrepreneuriat, hérité des ancêtres et leurs continuateurs en mathématique, astronomie, géographie, médecine, art qui, avec des contacts nombreux avec d'autres civilisations au cours de l'histoire, a permis l'émergence des préceptes humains, spirituels, économiques et matériels. Rappelons que la migration des Kairouannais vers d'autres régions (essentiellement Sousse, Hammamet , Dar Chaâbene El Fehry, Hammam Lif et bien sûr Tunis) où l'intégration a été largement facilitée par leur savoir-faire, leur profonde richesse, souvent jugés comme des personnes courageuses, conviviales et universelles. Leur aptitude de créer à leur tour, de réaliser une synthèse de connaissances, tel qu'il apparaît dans les divers domaines, du scientifique à l'artistique, est ouvertement reconnue. Citons pour mémoire quelques ancêtres célèbres de Kairouan (source : www.kairouan.org) Période des gouverneurs (715 800) Yahya ALKHARRAZ (751 - 834) Une maîtrise du calcul et des sciences du partage des héritages et responsable financier au gouvernorat de Kairouan depuis 771. Yahya AL KINANI (828 - 901): Elève d'AL KHARRAZ et auteur du premier livre du «Hisba» écrit au Maghreb (mathématiques financières). Shuqran Ibn ALI (802) : Elève de AL KHARRAZ. Il a écrit un livre sur les partages successoraux intitulé «Hisab Alfaraidh» et le manuscrit existe encore dans la bibliothèque de Tamakrout (Maroc). Période Aghlabite (800 -910) Ishaq Ibn OMRAN, mathématicien, philosophe et logicien, né à Bagdad, enseigna les mathématiques à Kairouan jusqu'à sa mort. Ishaq Ibn SOULEYMAN, élève d'Ibn Omran et producteur de manuels de logique. Abou Sahl AL KAIRAOUANI, né à Kairouan, il a écrit un livre intitulé «AL kitab fi Elhisab Alhindi». Le titre indique qu'a Kairouan on s'est inscrit tôt sur la lignée d'AL KAWARIZMI, concernant la base décimale. Il a écrit aussi un livre de géométrie trigonométrique et un grand traité d'astronomie. Aucun de ses livres n'a été trouvé. Ibrahim II (875-902), calife, fondateur de Beit El Hikma, connaisseur de mathématiques et passionné d'astronomie. Ismail AL TALLA, étudia les mathématiques à Kairouan, membre de l'équipe des mathématiciens de Beit EL HIKMA. Il émigra à Bagdad où il se perfectionna en astronomie, et il revient à Kairouan où il est accusé d'avoir fabriqué de la fausse monnaie; il est ensuite contraint à émigrer à Cordoue et à y mourir au début du Xe siècle. Outhmen ES-SAYKAL ( -941), attaché à Beit El Hikma de Kairouan comme concepteur et facteur d'instruments astronomiques. Période Fatimide (910 - 972) Nassim Ibn Yacoub AL KAIROUANI, astronome ; parti avec les Fatimides au Caire en 973 Ap. JC. Al- Mouiez Li din ALLAH (953-975), spécialiste passionné d'astronomie, ses responsabilités Califates l'empêchaient de s'y consacrer. AL outaki AL IFRIKI (-955), Astronome et enseignant, il a quitté Kairouan en même temps que les fatimides. Yacoub Ibn KILISS (-990), savant universel né à Bagdad. Converti à l'islam et s'installa à Kairouan en 973. AL HAWARI ( -1023), savant Kairouanais, s'occupa de calcul, de géométrie et des sciences des lectures de Coran. Période Ziride (972 - 1152) Abi Al Hassan Ali Ibn Abi Rijal AL-KAIRAOUANI ( -1034); savant universel, il contribua à l'impulsion de la culture et de la science. Il doit sa célébrité en Europe médiévale à son livre d'astronomie «Albaria fi Ahkam Enjoum». Sa tombe est connue actuellement à Kairouan. Abd El-monim AL KINDI ( -1043), le meilleur spécialiste de géométrie de son époque à Kairouan; connaisseur d'arithmétique grecque et commentateur d'Euclide. Il avait un projet pour relier Kairouan à la Méditerranée. AS-Saqratisi AL KAIRAOUANI, élève de El kindi et spécialiste de géométrie. Ibn Sufyan AL SADFI, poète et astronome proche du calife El Mansour (984-996). AL KALYI ( -1111); originaire de Sfax, émigré en Espagne pour se perfectionner en géométrie et en calcul. Abou ES-SALT (1067 - 1134); qualifié d'unique dans la science des mathématiques. Le premier tiers de sa vie, il le passa en Andalousie. Le second en Egypte et le troisième à Mahdia (Tunisie).Emprisonné par les Zirides après le naufrage en Alexandrie d'un bateau, il aurait conçu un système de treuils et de poulies qui ont lâché à la dernière minute. Il rédigea en prison ses deux livres «Al wajiz fi alhaya» et «Risala fi aamal Al-Oustorleb». Plusieurs manuscrits existent toujours de ce livre. Il a écrit à Mahdia son dernier livre de géométrie «AL Iktissar». Abou JFER AL-Hassib AL-KAIRAOUANI, surnommé AL Ahdib et cité par Ibn Khaldoun. Il a écrit un livre intitulé «AL KAMEL» qui était considéré comme une référence de grande importance cinq siècles plus tard par Ibn Khaldoun. Abou ALMAJD Ibn OUTAYYA ( -1031). Il était l'un des secrétaires d'Etat au temps des princes Zirides. Il a écrit un épître intitulé Maqala fi Aldharb oua Alkisma (la multiplication et la division) ; le livre a été conçu comme étant un complément au livre d'Al Kamel d'Abou Jafer Al HASSIB). Beaucoup de personnes vous disent qu'ils aiment du fond du cur KAIROUAN, qu'ils aiment beaucoup son caractère qui restera, je pense, pour toujours. Quant aux habitants et aux habitués, ils expriment une attirance à la bonté de ses hommes et à la beauté naturelle de ses femmes et leur générosité, sans écarter sa valeur historique, ses mosquées, le coran qui, chaque matin, se récite dans les petites boutiques du souk, l'odeur de son pain, de son kaftéji, de son makroudh, de son miel, de ses abricots, et bien sûr el hayek, les habits traditionnels, ses poèmes, ses sculptures et ses monuments historiques Ainsi, on comprend mieux la profondeur de la civilisation, du savoir-faire et du spirituel de notre belle forteresse "KAIROUAN", qui retrouve une somptueuse reconnaissance, avec splendeur et sérénité, et qui demeure une des fiertés de la Tunisie, moderne et modérée.