La contrefaçon est un fléau qui agace tant les industriels que les autorités économiques et le consommateur. Certes différentes lois ont été promulguées pour protéger la propriété intellectuelle et industrielle des violations commises par les contrefaiteurs, mais leur application dans le temps n'est pas aussi évidente. «L'industriel qui attaque en justice des contrefaiteurs doit attendre des années pour qu'on émette un jugement en sa faveur, et pendant toute cette période, le produit contrefait continue à être vendu sur le marché», a lancé maître Farhat Toumi, lors du séminaire d'information sur «la propriété intellectuelle et la contrefaçon» organisée, le 27 avril 2009, par le ministère du Commerce et de l'Artisanat en collaboration avec l'UTICA et le ministère de l'Industrie, de l'Energie et des PME. «Personnellement, je n'ai jamais réussi à avoir un jugement en faveur de la saisie des produits suspects de contrefaçon», ajoute-t-il, amer. La lenteur des procédures fait que les industriels se trouvent dans une impasse. A l'exemple de SOTUNOL, dont les marques sont bien enregistrées à l'INNORPI. Mais «on trouve le produit contrefait avec un emballage identique à l'original, même avec la notice d'utilisation. A cause de cela, nous avons reçu plusieurs plaintes sur la qualité du produit. Même si un jugement a enfin été rendu en notre faveur, il reste que nous avons perdu de notre réputation sur le marché», nous a affirmé un représentant de la société. Même son de cloche du côté de «Louis Vuitton», une marque de sac qui n'est pas présente en Tunisie, mais on en trouve plein de produits contrefaits dans les zones touristiques. «Depuis 2001 jusqu'à 2007, 90% des jugements ont été prononcés en notre faveur, mais jamais il n'a été procédé à la saisie de la marchandise contrefaite», a indiqué maître Mondher Mansi. Rappelons que la loi n°50-2007 souligne la nécessité de l'intervention des différents acteurs du contrôle économique afin de garantir un minimum de flexibilité dans l'application des jugements. «Depuis la promulgation de cette loi, plusieurs opérations de saisie ont été effectuées à Sousse, Djerba, Sidi Bou Saïd, etc.», a poursuivi Maître Mansi. Par ailleurs, l'identification des produits contrefaits n'est pas tout à fait évidente. Une industrie de la contrefaçon est en train d'évoluer à travers le monde, présentant une bonne qualité et répondant même aux normes internationales et qu'on en trouve sur les sites Internet marchands. Une menace pour le marché réel qui souffre beaucoup de ces pratiques déloyales. «Il est important, à cette étape cruciale, de former des experts qui seront capables d'identifier les produits contrefaits quel que soit leur degré de précision», a déclaré M. Khalifa Tounakti, directeur général du contrôle économique. Un autre problème a été également évoqué par maître Toumi. Il s'agit de l'enregistrement des marques qui garantit le droit de l'industriel. «Le nom de la marque devrait absolument se distinguer du nom commercial de la société. C'est ce qu'on appelle une marque forte au contraire de la marque faible qui correspond ou se rapproche trop du nom de la société. Malheureusement, c'est une pratique moins répandue en Tunisie» a-t-il expliqué. Notons également que la Tunisie n'a pas ratifié la convention de Madrid relative à l'enregistrement international. Ce qui fait que l'industriel ne bénéficie pas de ses avantages, «surtout s'il voulait enregistrer sa marque en dehors de la Tunisie», a affirmé maître Toumi.