La Tunisie possède un patrimoine écologique inestimable. Reste que sa valorisation constitue l'une des problématiques non encore résolues. A part le soleil et la mer, on voit mal des touristes venir faire ce qu'on appelle de l'écotourisme, bien que le potentiel existe. L'absence d'un effort de promotion de la part des autorités concernées est pointée du doigt, puisque la politique a toujours ou presque, été axée sur le tourisme de masse On se demande comment renverser la tendance et faire de notre pays une destination qui attire par son patrimoine culturel et écologique. Un potentiel à développer Rien que pour la région du Cap Bon, «des milliers de lits aux alentours, à Hammamet et Nabeul, n'offrent rien d'autres que du balnéaire alors qu'il y a un grand potentiel d'écotourisme, vu l'existence de plusieurs zones humides et le passage des oiseaux migrateurs», nous explique M. Faouzi Maamouri, représentant du Fonds international de la nature (WWF). Il ajoute que le «bird watching» ou l'observation des oiseaux «n'attire que les groupes de scientifiques. Certaines excursions sont organisées, à prix exorbitants, par des agences de voyage françaises ou anglaises mais jamais tunisiennes». D'ailleurs, même sur le plan local, on sait peu de choses sur ce patrimoine, à part les parcs nationaux et les réserves naturelles. Les zones humides, qui en font partie, ne sont guère valorisées comme faisant partie d'un écosystème qui garantit l'équilibre naturel puisqu'elles sont des espaces de transition entre la terre et l'eau. Elles assurent, à elles seules, 25% de l'alimentation mondiale à travers l'activité de la pêche, l'agriculture et de la chasse. On en compte 237 en Tunisie, entre sebkhas, 31 lacs intérieurs d'eau douce, chotts, tourbière, barrages et oueds. Elles constituent, de ce fait, des principales zones d'accueil des oiseaux migrateurs. En janvier 2009, on a recensé près de 534.000 oiseaux d'eau en Tunisie. A cette période de l'année où les oiseaux migrateurs font escale en Tunisie, le bird watching est l'un des moments uniques à ne pas rater, si l'on veut prendre connaissance du patrimoine écologique de notre pays. Dans le cadre des visites organisées par la WWF et la Direction générale des forêts, certaines zones humides de Korba ont été visitées. On apprend que la lagune ou sabkha de Korba a recensé, en 2009, quelque 3.800 oiseaux d'eau dont 1.090 flamants roses. Elle constitue l'un des plus importants lieux de passage de ces oiseaux en Tunisie et se trouve sur leur circuit de migration. A noter aussi qu'elle permet le développement de la culture maraîchère sur ses rivages, d'où l'intérêt économique des zones humides pour les populations alentour. Elle englobe aussi des ruines romaines, malheureusement abandonnées, d'où l'intérêt culturel. Les zones humides, une réponse au changement climatique . Les barrages culinaires sont aussi des zones humides à fort potentiel écologique et économique. A l'exemple du barrage Mlaabi, utilisé essentiellement pour la culture irriguée et pour le ravitaillement de la ville de Menzel Temim en eau potable. Au 13 janvier 2010, pas moins de 1.680 têtes d'oiseaux ont été recensées, représentant 18 espèces tels que les foulques, les sarcelles marbrés, l'iris mature à tête blanche considéré comme le plus petit canard dans le monde. Dernière étape de la visite, la réserve de faune de Dar Chichou qui abrite des espèces d'animaux en voie de disparition tels que les buffles d'Ichkeul, le chat sauvage, le paon, le daim, etc. Le centre d'élevage s'étend sur 160 hectares. Le but étant d'élever ces espèces rares pour ensuite les réintroduire dans leur espace naturel afin de remédier à la réduction de leur nombre due à la chasse. Toute la réserve s'étend sur 1.785 hectares, et comprend une forêt aménagée abritant différentes espèces d'arbres : l'eucalyptus, pins de canari, acacia, etc. «Ce potentiel que présentent les zones humides constitue le principal axe de lutte contre le changement climatique. Nous avons demandé aux scientifiques, chercheurs, ingénieurs, de nous mettre au point une machine qui absorbe le CO2 et rejette l'oxygène. Ils nous ont fourni le même résultat : un arbre. Les récentes études sur les changements climatiques indiquent que la Tunisie n'échappe pas à ce phénomène planétaire, comme partout ailleurs, nous aurons: une augmentation des températures et une diminution des pluies, selon les scénarios, en 2050», affirme M. Habib Abid, sous-directeur de la chasse et des parcs nationaux. Ce qui exige des solutions immédiates qui passent inéluctablement par la préservation de la nature et de l'écosystème et de concevoir la protection des zones humides comme une réponse au changement climatique. Une solution, voire une exigence qui doit être réfléchie dans l'immédiat si nous voulons un avenir meilleur.