Non, ce n'était pas des bruits de couloir comme semblait dire un confrère faisant allusion à l'incapacité de la société de titres de service OK Restaurant à régler ses créances, il ne s'agissait pas non plus d'intox, c'était du vrai. Pour cette entreprise leader de l'activité des tickets-restaurants des années 90, la descente aux enfers a commencé il y a 3 mois lorsque, faute d'être réglée par ses débiteurs, elle n'a pas pu payer les restaurateurs. «Il y avait dans notre entreprise un déséquilibre manifeste entre l'encaissement et le décaissement, c'est ce qui nous a mis dans une situation critique», explique Nour El Houda El Abbassi, directrice générale adjointe d'OK Restaurant. «Il est malheureux que les restaurateurs soient les victimes d'une concurrence effrénée des sociétés de titres services et de tickets-restaurants entre elles, menant au bradage des prix et ayant pour conséquence la vente des titres à des prix inférieurs à leur valeur nominale. Les amicales et les associations qui ne sont pas les meilleurs payeurs du monde exigent des remises sur la valeur nominale du titre et encouragent la généralisation des commissions négatives. Résultat : insolvabilité de certaines entreprises de tickets-restaurants et cessation de paiement. Ce sont les restaurateurs qui paient les pots cassés, Rabbi yihdihoum''», a déclaré Abderrazzak Sanhaji, président de la Fédération des restaurateurs. Le manque de contrôle et l'absence de lois pour réguler le secteur a apparemment engendré le chaos... Dans l'affaire OK restaurants, il n'y a pas que les restaurateurs qui triment, il y a aussi les grandes surfaces et tous les points de ventes qui ont accepté les chèques cadeaux de la société qui a subi un redressement judiciaire. C'est une décision du tribunal rendue le 17 avril 2010 qui a mis l'entreprise en redressement judiciaire. «Nous faisons des arrangements avec les restaurateurs à l'amiable en leur offrant des sommes correspondantes aux liquidités dont nous disposons et en clôturant par des soldes de tout compte. Je tiens à ce propos à rappeler que les restaurateurs sont, selon la loi, des créanciers ordinaires et qu'à ce titre, nous pouvons nous entendre avec eux sur des abattements par tranches», précise la DGA d'Ok Restaurants. Les restaurateurs, dans ce cas, sont considérés comme étant des créanciers «chirographaires», c'est-à-dire des créanciers n'ayant aucune garantie (autre que le droit de gage général) pour leur assurer le remboursement de leurs créances. Ne possédant aucun droit de préférence, ils sont, en fait, en concurrence avec les autres créanciers. Il n'empêche, ils ont été prioritaires pour ce qui est du règlement, précise Mme Abassi. «Nous sommes en train de résoudre le problème de règlement des restaurateurs, progressivement. La plupart des établissements n'ont pas recouvert leurs dus totalement mais j'estime que c'est mieux que rien et j'espère qu'à terme, nous arriverons à un assainissement total des créances», a assuré M. Sanhaji. En attendant, plusieurs propositions étrangères et tunisiennes ont été faites pour l'acquisition d'OK restaurant. «Nous ne nous prononcerons pas et nous ne négocierons aucune vente avant d'avoir en main le plan de sauvetage de la société», indique Madame Abassi. Rappelons qu'à ce jour, les pouvoirs publics ne se montrent pas prêts à promulguer une loi visant à réglementer le secteur des tickets restaurants et de service malgré les enjeux énormes dont il fait l'objet, un secteur où l'on brasse énormément de liquidités et dont les titres peuvent être considérés comme des chèques bancaires possédant des valeurs nominatives en argent. Qu'attend-on pour le faire, une plus grande anarchie, plus de faillites ou l'attisement de désaccords entres les dizaines de restaurateurs et les entreprises de titres de services ? Car dans tout développement d'activités, il y a un moment où on bifurque soit vers le progrès et l'évolution soit vers la perte et l'échec, et en principe, l'Etat est toujours la partie prenante d'un succès, jamais d'un échec.