Dans le cadre des activités du le Centre tunisien de gouvernance d'entreprise, une rencontre-débat a été organisée, le 13 mai 2010, au siège de l'Institut arabe des chefs d'entreprise (IACE), autour de M. Mokthar Fakhfakh, ancien PDG de la BIAT et l'un des grands barons du système bancaire tunisien après l'intermède de la collectivisation, pour qui le monde des affaires a toujours ressemblé à un club fermé devant lequel il faut montrer patte blanche. La thématique traitée, tout au long de cette rencontre, était liée à la collégialité dans la direction, à la réalité actuelle du management tunisien, à la sensibilité sociale dans la gestion des ressources humaines et à la séparation de la fonction de président du conseil d'administration de celle de directeur général. M. Fakhfakh, après avoir évoqué le bon vieux temps des années soixante-dix et l'identification totale qui s'opérait à l'époque entre l'entreprise et le dirigeant (l'exemple de feu Hassen Belkhoja à la BNA et de Abdelaziz Mathari à la STB est éloquent), a mis en exergue l'évolution de l'industrie de la gestion dans une économie mondialisée, ultraconcurrentielle, le rôle de plus en plus important de la mission de l'audit externe et l'entrée en scène de nouveaux acteurs de financement à l'instar des actions, des obligations et des emprunts. Ce qui a amené les professionnels de la finance, dit-il, à distinguer nettement entre la fonction de la surveillance, d'une part, et celle du contrôle et de la marche quotidienne de l'entreprise, d'autre part. L'hôte de CTGE (Centre tunisien de gouvernance d'entreprises), dont la complicité et la connivence avec Monsieur Chékib Nouira, président de l'IACE, était manifeste tout au long du débat, a insisté, dans son intervention, sur la responsabilité sociale des décideurs économiques. Il s'agit là, précise notre interlocuteur, d'une démarche à même de sécuriser le personnel, de le fidéliser, neutralisant ainsi le vieil antagonisme "capital-travail". Grâce à cette approche volontariste, on assiste à l'émergence, dans certaines directions générales, de différents comités spécialisés chargés de la promotion des cadres de l'entreprise et à la nomination de plusieurs directeurs généraux adjoints, en plus du secrétariat général, afin de se pencher sur la valorisation des ressources humaines. A la fin de son exposé, l'ancien P.D.G de la BIAT a tenu à rendre hommage aux sociétés avant-gardistes, au diapason du progrès, avec des pratiques collégiales de gestion, installant des traditions de concertation constante à tous les niveaux de la décision, ce qui a permis leur rayonnement, renforcé la cohésion de l'équipe dirigeante et favorisé une grande transparence au niveau des procédures et des stratégies de management. La réactivité de la salle a fait le bonheur de Monsieur Mokthar Fakhfakh qui, en duo avec Monsieur Chékib Nouira, a appelé à réencastrer l'économie dans la société, au lieu de la laisser conduire la société, à imposer au marché des règles éthiques, sociales et environnementales et à favoriser l'économie des talents, l'économie des nouvelles technologies et d'un nouveau rapport au temps. Voilà un plaideur inspiré, ardent, dont le propos est tendu comme un filin d'acier, qui jamais ne romprait.