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À propos du projet de loi sur le financement direct de la Banque centrale de Tunisie à l'Etat
Publié dans Business News le 29 - 01 - 2024

Dans un article précèdent[1], nous avons tenté d'expliquer que le recours de l'Etat à un financement direct de la part de la Banque Centrale de Tunisie (BCT) ne résout en rien les problèmes du pays. Au contraire, il ne fait que retarder la prise par le gouvernement de décisions courageuses et nécessaires pour résoudre les difficultés structurelles du pays, tout en compromettant l'indépendance de la BCT en tant qu'Institution d'Etat.

Malheureusement, le gouvernement du Président Kaïs Saïd a pris la décision le 25 janvier 2024 d'institutionaliser le financement direct par la BCT au Trésor à travers « un projet de loi portant approbation de l'autorisation de la Banque centrale de Tunisie d'accorder des facilités au Trésor tunisien ».

Aucun détail n'a été communiqué concernant la forme, les condition, et les modalités de ce financement. Dans l'état actuel des faits accomplis, nous allons tenter d'examiner les différentes options disponibles et d'esquisser quelques conclusions préliminaires.

Option 1. Une loi générale et transparente

Le gouvernement pourrait adopter une loi transparente et d'application générale, s'inspirant de l'article 50 de la loi n°58-90 du 19 septembre 1958. Il est important de rappeler que l'objectif initial était d'abroger l'article 25 de la loi n°2016-35 du 25 avril 2016 et de rétablir le financement direct de l'Etat tel que prévu par la loi de 1958. Lors de sa visite inopinée au siège de la BCT le 9 septembre 2023, Kaïs Saïd lui-même avait déclaré :

« L'ancien statut de la banque centrale de 1958, était bien meilleur que le statut
actuel, sur plusieurs points. »

Cette approche requiert cependant :

* L'introduction d'une limite quant au montant maximum du financement direct (A titre d'exemple, la loi de 1958 prévoyait un plafond de 5% des recettes ordinaires de l'Etat constatées au cours de l'année budgétaire écoulée).

* L'introduction d'une durée maximale des découverts en compte-courant (La loi de 1958 prévoyait également un maximum 240 jours consécutifs ou non au cours d'une année de calendrier).

* Un débat parlementaire approfondi pour approuver cette nouvelle politique. Ce débat devrait normalement englober non seulement les conditions, les modalités, et surtout les limites et la durée dans le temps de la politique, mais également se concentrer sur la politique budgétaire du gouvernement à moyen terme et sur son contenu en termes de réformes.

Option 2. Une solution « habile » basée sur un précédent

Le gouvernement pourrait opter pour une solution "habile", à savoir une réplique de la facilité introduite par l'article 5 de la loi n° 2020-45 du 14 décembre 2020 portant loi de finances rectificative pour l'année 2020. Cette disposition a été mise en œuvre par la BCT le 18 décembre 2020, pour accorder une facilité de crédit à l'Etat d'un montant de 2,8 millions de dinars, sans intérêts[2], et sur une période de 5 ans, avec une année de grâce.

La solution est « habile » car elle permet au gouvernement d'éviter d'amender les statuts de la BCT et de réouvrir le débat sur son l'indépendance. Elle permet également au gouvernement d'éviter un débat parlementaire approfondi sur la politique budgétaire, simplement en se référant au précédent de 2020.

Notons que même en 2020, la solution était relativement contraignante. L'objectif était clairement défini : il s'agissait de financer une partie du déficit budgétaire engendré par les répercussions de la pandémie de Covid-19, et la facilité accordée revêtait un caractère exceptionnel. Notons aussi que même en 2020, les 2,8 millions de dinars de financement direct octroyés par la BCT dépassaient la norme de 5% des recettes ordinaires de l'Etat, établies à 31,3 millions de dinars pour l'année 2019, représentant ainsi 8,9%.

Le choix importe peu

Quel que soit l'option retenue, plusieurs points d'interrogation demeurent :

* La loi sur le financement direct de la BCT à l'Etat sera-t-elle à caractère général ou simplement limitée aux besoins d'emprunts pour l'année 2024 ?

* La loi inclura-t-elle un plafond pour le financement direct de la BCT ?

* Ce plafond prendra-t-il en considération le montant de la facilité déjà accordée à l'Etat en 2020, dont l'encours s'élevait à 1,9 million de dinars à la fin de septembre 2023 ?

* La loi prévoira-t-elle une durée de remboursement, étant donné que la BCT avait octroyé une avance permanente à un moment de son histoire ?

* Le financement de la BCT va-t-il combler le déficit dans la mobilisation des ressources internes ou aussi le gap dans la mobilisation d'emprunts extérieurs ?
* Dans ce dernier cas, est ce que le financement direct au Trésor serait affecté au règlement de la dette extérieure et financé par des ponctions sur les réserves de devises ?

Pour éclairer notre jugement ainsi que l'opinion publique en général, des réponses à ces questions doivent être fournies, au moins aux représentants du peuple. En attendant, deux points méritent d'être soulignés :

1. L'absence de la BCT dans cet important débat et l'introduction du projet de loi pendant la période de transition de son gouvernement. Le nouveau Gouverneur serait ainsi confronté avec un fait accompli.

1. Le timing est particulièrement notable sur un autre plan. Il intervient juste après le report sine die de la mission de surveillance du FMI au titre de l'Article IV. Il est important de souligner que la mission de surveillance est une obligation annuelle et que le FMI est en droit d'émettre des réserves sur certains choix économiques des autorités, même en l'absence d'un programme de financement. Par exemple, lors de la mission de consultation de 2021, le FMI avait déjà noté[3] que :

« Les autorités se sont largement appuyées sur des sources de financement internes (9,4 % des PIB) et le Parlement a voté pour permettre à la BCT, à titre exceptionnel, de prêter 2,81 milliards de dinars (2,5 % du PIB) directement au Trésor, malgré de fortes réserves de la part de la BCT. »

Et ses conclusions et recommandations étaient :

« Les services du FMI exhortent les autorités à éviter le financement monétaire du budget. Le staff a noté qu'un tel financement pourrait compromettre les progrès de la BCT dans la réduction de l'inflation, perturber les anticipations inflationnistes, influencer négativement le taux de change et les réserves et, en fin de compte, la crédibilité et l'indépendance de la banque centrale. »

Et ce, malgré les assurances des autorités de l'époque :

« La BCT a souligné que le financements monétaires à fin 2020 avait été une opération ponctuelle, et que les autorités tunisiennes ont confirmé l'importance de maintenir l'indépendance de la Banque centrale. »

Une mission de consultation du FMI pour l'année 2024 aurait certainement fait référence aux préoccupations déjà exprimées en 2021 et aurait réitéré ses inquiétudes sur ce sujet en particulier. A ce propos, il est important de préciser que si jamais la Tunisie va recourir un jour au FMI, une condition préalable du nouveau programme serait l'abrogation de la loi sur le financement direct du Trésor par la BCT, la mise en place d'un programme d'assainissement des finances publiques, et d'un calendrier de emboursement anticipé des avances à l'Etat. La Tunisie a déjà connu un précèdent, à savoir les programmes de 1986 et 1988 où toutes les conditions précitées avaient été inclues pour corriger les dérapages précédents dans la gestion des finances publiques.

L'après est plus important

Dans le contexte actuel, caractérisé par l'absence de concertation et de communication de la part du gouvernement, ainsi que par le mutisme de la BCT, plusieurs options s'offrent au gouvernement. Cependant, le véritable problème réside dans le fait que le financement direct du Trésor par la BCT représente le dernier recours sur le plan interne. Et ensuite ?

Déjà, rien que pour l'année 2024, les besoins de l'Etat en ressources d'emprunts sont considérables, s'élevant à 28,2 millions de dinars. Ce montant comprend 11,7 millions de dinars d'emprunts intérieurs et 10,3 millions de dinars d'emprunts extérieurs non identifiés. De plus, contrairement au choc provoqué par la Covid-19, ces besoins ne revêtent rien d'exceptionnel, car ils servent à financer les dépenses courantes de l'Etat.

Et après 2024 ? Depuis la révolution, chaque gouvernement n'a fait que blâmer ses prédécesseurs, sans toutefois mettre en place les réformes structurelles nécessaires, et surtout en continuant à suivre une politique de dépenses budgétaires expansionniste.

L'histoire économique de la Tunisie a été marquée par quatre crises financières aiguës : celle des années 1860, puis celles des années 1960 et 1980, ainsi que la crise actuelle que traverse le pays depuis 2011. Les crises postindépendance étaient évidemment caractérisées par des dimensions politiques et socio-économiques. Cependant, elles partageaient un trait commun : le recours excessif du gouvernement à des dépenses budgétaires insoutenables et improductives, largement financées par la BCT, dernier recours sur le plan interne et nécessitant le recours au FMI, dernier recours sur le plan extérieur.

Il est à rappeler que la crise des années 1960 a été déclenchée par des dépenses élevées liées au démarrage de la planification et largement financées par la BCT. Elle a abouti à la dévaluation du dinar et à six programmes avec le FMI. Dans les années 1980, comme détaillé dans l'article précité, le gouvernement Mzali a abusé du financement direct et indirect de la BCT, entraînant une deuxième dévaluation du dinar et deux programmes avec le FMI. Ce scénario se répète depuis 2011, avec déjà deux programmes non concluants avec le FMI et un recours en 2020 au prêteur de dernier ressort, à savoir la BCT.

La suite, l'avenir nous le dira. Toutefois, l'histoire économique de la Tunisie offre déjà de nombreux enseignements, que le gouvernement semble malheureusement ignorer au détriment de la stabilité financière du pays, sans même évoquer la nécessité d'une révision du rôle et du poids de l'Etat dans l'économie.

[1] L'indépendance de la Banque centrale de Tunisie – un faux débat
[2] L'application d'un taux d'intérêts zéro n'est pas un problème en soit car les bénéfices de la BCT sont, en grande partie, versés au Trésor.
[3] Tunisia: 2021 Article IV Consultation-Press Release; Staff Report; and Statement by the Executive Director for Tunisia


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