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Quatre libérations en 24 heures, le régime Kaïs Saïed s'humanise-t-il ?
Publié dans Business News le 21 - 02 - 2025

Quatre détenus politiques ont été libérés en l'espace de 24 heures. Cela coïncide avec un rapport onusien sur la répression en Tunisie et un communiqué alarmant de l'Association des magistrats tunisiens. Le régime de Kaïs Saïed a-t-il cédé aux pressions ou commence-t-il à s'humaniser, comme le répètent certains de ses partisans ?

Comme souvent, le président Kaïs Saïed réussit à surprendre la scène politique tunisienne. C'était le cas pour le 25 juillet 2021, pour les différents limogeages et de nombreuses nominations, mais aussi pour les arrestations et les libérations de prisonniers politiques.
La dernière vague de libérations a surpris tout le monde, puisqu'il a été question de libérer quatre prisonniers politiques en l'espace de 24 heures, à savoir l'ancienne présidente de l'Instance Vérité et Dignité, Sihem Ben Sedrine, en détention provisoire depuis le 1er août 2024 ; le député de l'actuelle session parlementaire, Wajdi Ghaoui, en détention provisoire depuis le 13 mars 2023 et libéré parce qu'on s'est aperçu, près de deux ans après, qu'il bénéficiait de l'immunité ; l'ancien ministre de l'Environnement, Riadh Mouakher, détenu depuis le 28 février 2023 et condamné en novembre dernier à trois ans de prison ; et le journaliste Mohamed Boughalleb, détenu depuis le 22 mars 2024 et condamné à six mois de prison en première instance et à huit mois en appel. Bien qu'il ait purgé sa peine, il est resté en prison à cause d'un autre mandat de dépôt émis contre lui en avril dernier.

Entre espoir et indignation
Cette toute petite vague de libérations a suscité de l'espoir chez les uns et de la colère chez d'autres.
Pour les premiers, on voit enfin le bout du tunnel et la possibilité que tous les détenus politiques arbitrairement détenus, qui se comptent par dizaines, soient libérés.
Pour les seconds, ils y voient un rétropédalage du régime de Kaïs Saïed, qui a toujours dit et clamé haut et fort « pas de retour en arrière ».
Au-delà de l'optimisme légitime des uns et de la méchanceté gratuite des autres, ces libérations suscitent l'interrogation. Pourquoi donc un régime connu pour sa répression et qui a mis la justice à sa botte commence-t-il à libérer des prisonniers politiques ?

Une coïncidence avec les pressions internationales ?
La libération des quatre prisonniers politiques intervient deux jours après la publication de deux communiqués incendiaires ciblant le régime de Kaïs Saïed.
Le premier a été publié par le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'Homme, qui exhorte les autorités tunisiennes à mettre fin à la répression des opposants politiques. Il cite plusieurs figures politiques, journalistes et militants de la société civile, dont Sihem Ben Sedrine.
Le second communiqué a été publié par l'Association des magistrats tunisiens (qui a publié en réalité trois communiqués incendiaires le même jour) et alerte sur l'état de la justice tunisienne, qui vit une situation catastrophique.
La concomitance de la libération des quatre prisonniers politiques avec ces communiqués laisse à penser que les deux événements seraient liés. Personne n'a de preuve pour étayer ces propos. Ni du contraire. Kaïs Saïed s'est totalement isolé et ne s'est jamais livré aux journalistes pour répondre à ce type d'interrogations. Idem pour ses proches. À défaut d'un porte-parole officiel ou officieux, les observateurs politiques se rabattent sur ces chroniqueurs et influenceurs éternels défenseurs du régime et qui s'apparentent à des porte-paroles.

Les partisans du régime réagissent
La députée laudatrice Fatma Mseddi a estimé que la libération de Sihem Ben Sedrine soulevait plusieurs interrogations. Selon elle, cette décision pourrait avoir été prise sous l'effet de pressions extérieures exercées sur la Tunisie.
Elle a évoqué une possible atteinte à la souveraineté nationale et une ingérence étrangère. « La souveraineté nationale n'est pas sujette à débat. Toute ingérence étrangère, quelle que soit son ampleur ou son origine, constitue une atteinte aux droits des Tunisiens de disposer d'eux-mêmes », a-t-elle écrit.
Même son de cloche du côté du blogueur Naem Haj Mansour, réputé pour sa défense farouche du régime. « N'eût été les interventions et les pressions étrangères, elle n'aurait pas été libérée par la chambre d'accusation de la cour d'appel de Tunis, et elle n'aurait pas quitté sa prison en brandissant le signe de la victoire. Que Dieu soit avec toi, Tunisie. »
Ces deux avis ne sont pas partagés par les chroniqueurs Riadh Jrad et Maya Ksouri, tous deux grands défenseurs de Kaïs Saïed et de sa politique.
Riadh Jrad a déclaré : « La pression sur la Tunisie n'a pas cessé un seul jour depuis le 25 juillet 2021, et a parfois atteint le point d'une ingérence flagrante dans nos affaires intérieures par des organismes officiels (ambassades, ministères des Affaires étrangères, parlements…) et dans des circonstances beaucoup plus délicates où la suspicion prévalait, mais nous ne nous sommes pas soumis ni agenouillés. Ainsi, dire que la libération de Sihem Ben Sedrine est le résultat d'une pression extérieure est une pure absurdité dont le but est de mettre en doute l'adhésion du président Kaïs Saïed à la souveraineté nationale et l'indépendance de notre décision.
Je comprends l'état de mécontentement, de perplexité et de doute qui s'est installé dans l'âme des Tunisiens, et même dans l'âme des plus farouches défenseurs du processus du 25 juillet, notamment en ce qui concerne la responsabilité et la souveraineté nationale. Et pour être honnête, c'est ce qui m'inquiète le plus personnellement. La décision judiciaire était clairement impopulaire.
Malgré tout cela, la libération provisoire de Sihem Ben Sedrine et des autres ne signifie pas leur innocence. Cela ne doit donc pas nous troubler ni changer quoi que ce soit à nos positions et à nos principes de départ. La flexibilité dans le mouvement ne signifie parfois pas concession ou retour en arrière, comme certains l'imaginent », écrit le propagandiste sur sa page Facebook.
Plus expéditive, Maya Ksouri explique que « Sihem Ben Sedrine a de graves problèmes de santé liés à son âge. Riadh Mouakher a presque purgé toute sa peine. Il est en détention depuis février 2023 dans une affaire de corruption financière. Boughalleb a presque purgé sa peine, puisqu'il est en prison depuis avril 2024 (en vérité, il a purgé toute sa peine déjà, NDLR). Pour la première plainte déposée contre lui par un employé du ministère des Affaires religieuses, il a été condamné à huit mois de prison. Il a été détenu dans l'attente d'une autre affaire déposée contre lui par un professeur d'université et il ira à son procès en état de liberté au mois de mai », écrit Mme Ksouri sur son compte Instagram.

Libérations sous pression ou geste humaniste du régime ?
Loin des propagandistes du régime, une partie de la société civile tunisienne voit en ces libérations le pur fruit de la pression étrangère.
« Les nouvelles de liberté et de libération sont toujours réjouissantes, mais elles suscitent également du ressentiment envers un système judiciaire que le pouvoir exécutif manœuvre et utilise à ses propres fins pour tenter de blanchir son bilan en matière de droits de l'Homme avant la réunion annuelle du Conseil des droits de l'Homme. Ce régime construit son discours à partir d'accusations fabriquées de toutes pièces de conspiration, de blanchiment d'argent et de corruption… et sait les utiliser pour inciter à la haine et n'y renoncera pas facilement », tranche Romdhane Ben Amor, porte-parole du Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux (FTDES).
Abdel Wahab Hani, président du parti El Mejd, voit également en ces libérations le fruit de pressions diverses.
« Cela est dû aux pressions internationales, aux déclarations, aux appels et aux déclarations médiatiques faites à plusieurs reprises par les experts de l'ONU et le Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l'Homme, Volker Türk, en pleine coordination avec le Secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres. Cela survient aussi après la convocation de l'ambassadeur Sabri Bachtobji à l'ONU à Genève (information que nous n'avons pas pu confirmer, NDLR) et l'avoir interrogé sur les violations flagrantes des droits de l'Homme de manière ferme. M. Bachtobji a heureusement transmis les préoccupations et les pressions internationales aux concernés à Tunis avec tout le professionnalisme et l'objectivité pour décider de ce qu'ils jugent approprié, ce qui est le rôle de tout diplomate professionnel et honnête auprès des autorités de son pays.
Ces libérations interviennent quelques jours avant le début de la principale session annuelle du Conseil des droits de l'Homme de l'ONU, qui débutera lundi prochain avec la participation de plus d'une centaine de responsables gouvernementaux, dont des chefs d'Etat, des Premiers ministres, des ministres des Affaires étrangères et des ministres de la Justice, ainsi que de plus d'une vingtaine d'experts de l'ONU. On s'attend à ce que des activités parallèles de la société civile soient menées pour faire la lumière sur la réalité des droits de l'Homme dans un certain nombre de pays qui attirent l'attention de la communauté internationale, notamment la situation des droits de l'Homme en Tunisie. », écrit-il sur sa page Facebook.

Un geste isolé ou un véritable tournant ?
Comme indiqué plus haut, il est impossible de répondre à la question de savoir si ces libérations sont le fruit de pressions diverses, internes et externes, ou si c'est un humanisme soudain du régime. Les courtisans du régime eux-mêmes ne sont pas d'accord sur une explication.
Le fait est que, sur les dizaines de prisonniers politiques, on a quatre libérations et, en soi, c'est réjouissant pour les défenseurs des libertés et éreintant pour ses ennemis.
On ajoute à ces libérations le non-lieu obtenu il y a quelques semaines par l'ancien ministre des Droits de l'homme, Mehdi Ben Gharbia, dans les affaires les plus lourdes pour lesquelles il était poursuivi. Le plus vieux prisonnier politique (il est détenu depuis octobre 2021) n'a finalement été condamné « qu'à » quatre ans de prison pour infractions fiscales et échappe à la perpétuité qu'il risquait avec toutes les affaires de blanchiment d'argent qu'on lui collait.

L'arbre qui cache la forêt
L'arbre ne doit cependant pas cacher la forêt. Malgré ces libérations, l'essentiel des prisonniers politiques reste en prison et ce pour des affaires montées de toutes pièces.
C'est le cas des politiciens impliqués dans l'affaire de complot contre l'Etat. Avocats et journalistes sont interdits de traiter cette affaire publiquement. À ce jour, les avocats n'ont pas eu accès aux dossiers alors que le procès est prévu pour le 4 mars. Signe que le régime entend fourrer son nez dans cette affaire, il a nommé récemment un juge controversé pour la présider.
C'est aussi le cas pour les journalistes Mourad Zeghidi et Borhen Bssaïs, qui ont purgé leurs peines de prison (pour des faits liés à leur travail) et qui demeurent quand même incarcérés suite au déclenchement d'une seconde affaire, quelques semaines seulement avant leur libération.
Idem pour la chroniqueuse Sonia Dahmani, dont le seul tort est d'avoir fait son travail d'analyste politique. Pareil encore pour les nombreux présidents et présidentes d'associations d'aide aux migrants, qui sont incarcérés depuis près d'un an, ou encore pour les deux candidats à la présidentielle, Ayachi Zammel et Lotfi Mraïhi.
À cette liste s'ajoute Abir Moussi, présidente du Parti Destourien Libre (PDL), détenue depuis octobre 2023 pour des motifs politiques, illustrant une volonté du pouvoir d'écarter toute opposition sérieuse.

Un dilemme pour le régime
Dans un pays avec une justice indépendante, aucune de ces personnes n'aurait été privée un jour de sa liberté. Si elles sont en prison, c'est en raison de leurs activités professionnelles, associatives ou politiques et c'est pour cela qu'elles méritent la dénomination de prisonniers politiques.
Etant incarcérées pour des raisons politiques, leur libération ne peut survenir que par décision politique.
Que le régime fasse preuve d'humanisme ou qu'il cède à des pressions étrangères, il sera le premier gagnant à décrisper l'atmosphère en libérant ces personnes injustement détenues.


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