L'universitaire et ancien ministre de la Formation professionnelle et de l'Emploi, Hafedh Laamouri, est revenu, jeudi 12 juin 2025, sur l'amendement du Code du travail, en appelant les entreprises à ne pas céder à la panique ni recourir au licenciement de leurs effectifs. M. Laamouri a affirmé, au micro de Wassim Ben Larbi dans l'émission Expresso sur Express FM, que lorsqu'on lit la nouvelle loi, on peut la trouver parfaite. Mais, lorsqu'on l'applique, on en découvre les limites, notamment à travers des cas non prévus, auxquels il faudra trouver des solutions pratiques. À titre d'exemple, il a indiqué que dans toutes les compagnies d'assurances, les employés sont souvent liés par un contrat qui n'est pas un contrat de travail. Ces compagnies forment des personnes pendant un ou deux ans afin qu'elles ouvrent ensuite leur propre agence. Ces dernières ne perçoivent donc pas de salaire, mais un pourcentage sur le chiffre d'affaires réalisé. Il a également évoqué les dispositifs d'alternance entre études et travail, où certaines entreprises accueillent de jeunes diplômés en licence qui poursuivent leurs études tout en travaillant. Ces sociétés prennent en charge les frais de formation et versent une indemnité mensuelle aux intéressés.
Autre cas évoqué : certains types d'intérim, comme les compagnies d'assurances qui sous-traitent le traitement des feuilles de soins. De même, les banques n'intègrent pas, dans leur convention collective, de catégorie spécifique pour les agents de sécurité ou de propreté. L'universitaire a expliqué que les projets à durée déterminée ou les activités saisonnières (touristiques ou agricoles) ne sont pas concernés par la nouvelle loi. Ce qui est interdit, c'est la sous-traitance de main-d'œuvre, devenue illégale depuis le 28 mai dernier, date de l'entrée en vigueur de la loi. Selon lui, les entreprises qui pratiquaient la sous-traitance de main-d'œuvre peuvent se reconvertir vers une sous-traitance de services, ce qui reste autorisé par la loi. Il a précisé que le contrat de joueur professionnel est un contrat spécifique régi par le ministère des Sports et les fédérations concernées, et qu'il est donc soumis à des textes particuliers. Il en va de même pour les contrats des employés étrangers, qui ne relèvent pas de la nouvelle loi. Il a également mentionné l'inquiétude au sein des établissements scolaires et universitaires privés, qui recourent à des vacataires qu'ils ne peuvent pas embaucher à temps plein. Il a ajouté que les employés absents peuvent être remplacés par d'autres agents pendant toute la durée de leur absence. Mais, a-t-il admis, la problématique réside dans le fait de savoir par qui les remplacer, les sociétés d'intérim étant désormais interdites. Pour lui, ce sont des problématiques auxquelles il est possible d'apporter des solutions.
Hafedh Laamouri a reconnu avoir constaté un vent de panique dans de nombreuses entreprises, quant à la compréhension et à l'application de la loi, ce qui s'est soldé par une vague de licenciements. Il a rappelé que toutes les parties prenantes ont été consultées et que les articles de la loi ont été rédigés de manière suffisamment large pour intégrer les cas spécifiques, auxquels des solutions peuvent être apportées. Il a précisé que les dispositions relatives aux contrats à temps plein ne s'appliquent pas aux contrats à temps partiel. Ainsi, une femme de ménage travaillant deux heures dans une société peut aussi travailler pour d'autres employeurs. Chaque société doit la déclarer à la sécurité sociale pour la durée effective de son travail. Il a reconnu que la nouvelle loi cherche à concilier la protection des droits des employés avec celle des entreprises, mais qu'elle penche davantage en faveur des premiers. Il a également admis que la loi est plus stricte et réduit la marge de manœuvre dont disposaient auparavant les entreprises, tout en engendrant un coût financier supplémentaire. Concernant les entreprises qui sont en train de licencier leurs employés, l'universitaire a estimé que cela reflète une méconnaissance de la loi, car il existe, selon lui, une solution pour chaque situation. Il pense que le nouveau Code du travail représente une opportunité de revoir les conventions sectorielles à sa lumière, d'une manière qui ne contredise pas ses dispositions, tout en tenant compte des spécificités de chaque secteur.
M. Laamouri a démenti les rumeurs selon lesquelles des textes d'application de la loi auraient déjà été publiés. Il a toutefois indiqué que le ministre des Affaires sociales pourrait publier une circulaire d'application, fournissant des directives générales aux inspecteurs du travail, notamment pour les cas spécifiques. Selon lui, la mise en œuvre de la loi prendra du temps, tant pour l'adaptation des entreprises que pour clarifier les frontières entre la sous-traitance de main-d'œuvre — désormais interdite — et la sous-traitance de services, qui reste légale. Cette loi ne doit, selon lui, en aucun cas constituer un obstacle à l'externalisation de certains services, comme la comptabilité ou les services informatiques.