À l'occasion du 69ᵉ anniversaire de la promulgation du Code du statut personnel (CSP), la Ligue tunisienne des droits de l'Homme (LTDH) a dressé, mardi 12 août 2025, un constat alarmant sur l'état des droits des femmes en Tunisie, dénonçant un recul tangible dans le contexte politique actuel. L'organisation rappelle que l'adoption du CSP, en 1956, avait constitué une avancée majeure dans l'histoire du pays et de la région. Ce texte pionnier avait aboli la polygamie, instauré le divorce devant les tribunaux, interdit le mariage forcé et garanti aux femmes le droit à l'éducation, au travail et à la participation à la vie publique. Ces acquis, fruits de longues luttes menées par le mouvement féministe et la société civile, avaient fait de la Tunisie une référence régionale en matière d'égalité entre les sexes.
Tout en saluant les combats menés par les générations précédentes, la LTDH exprime aujourd'hui sa profonde inquiétude face à un contexte marqué par l'affaiblissement des garanties constitutionnelles. Elle déplore notamment que la Constitution de 2022 ait supprimé le principe de parité dans les instances élues et affaibli les mécanismes institutionnels destinés à promouvoir l'égalité. Elle critique également l'exclusion croissante de la société civile dans l'élaboration des politiques publiques, ce qui freine toute avancée réelle des droits des femmes. La Ligue dénonce par ailleurs un climat de répression accru à l'encontre des militantes des droits humains. Elle souligne que l'incarcération de prisonnières politiques et d'opinion constitue une « honte pour le pouvoir » et une violation flagrante des lois nationales comme des conventions internationales ratifiées par la Tunisie. La LTDH appelle à la libération immédiate de toutes les détenues politiques et d'opinion, ainsi qu'à l'arrêt des poursuites visant les militantes. Elle réaffirme son opposition à toute tentative de remise en cause du Code du statut personnel et exprime son inquiétude face à la précarité persistante des ouvrières agricoles, privées de protection sociale, ainsi qu'aux violences subies par les migrantes. L'organisation insiste sur la nécessité de restaurer le principe de parité dans toutes les instances élues et de lutter contre toute forme de discrimination.
Pour la Ligue, la date du 13 août ne doit pas se réduire à une commémoration symbolique : elle doit être l'occasion de raviver la conscience collective sur le sens véritable des luttes menées par les Tunisiennes à travers les décennies. « Les droits ne sont pas octroyés, ils se conquièrent par la lutte », rappelle la LTDH, avertissant que les acquis patiemment obtenus au prix de sacrifices risquent de disparaître si la vigilance et la mobilisation ne sont pas au rendez-vous.