Neuf mois après le lancement officiel du projet « Auto-entrepreneur », les premiers résultats montrent une montée progressive de ce dispositif destiné à encadrer et soutenir l'initiative individuelle. Invité sur Mosaïque FM, Mohamed Kefi Rahmani, président du projet au ministère de l'Emploi et de la Formation professionnelle, a présenté, jeudi 14 août 2025, un état des lieux détaillé. Lancé via une plateforme en novembre 2024, le projet vise à libérer les capacités des jeunes Tunisiens souhaitant travailler à leur compte, intégrer le secteur informel dans l'économie formelle et créer de l'emploi. Son cadre juridique repose sur trois textes majeurs : le décret de 2020, la loi de finances 2023 et la loi de finances 2025, avec déjà des propositions prévues pour 2026. Initialement, le décret de 2020 ne concernait pas les freelances : il se limitait aux activités relevant du régime forfaitaire, exercées par des personnes non salariées, sans patente active, et avec un chiffre d'affaires annuel inférieur à 75.000 dinars. La loi de finances 2025 a élargi le dispositif aux professions numériques et créatives. Désormais, les bénéficiaires peuvent obtenir une couverture sociale via la CNSS. Un décret gouvernemental précisant la liste des activités éligibles est finalisé et en attente d'adoption.
Le démarrage avait été timide, souligne le responsable, avec environ 200 inscriptions par mois fin 2024. En juillet 2025, le rythme est passé à 700 inscriptions, et 400 sur la première quinzaine du mois d'août. L'objectif affiché est d'atteindre 25000 inscrits la première année. Pour soutenir cette dynamique, une ligne de financement spécifique a été mise en place : un prêt pouvant atteindre 15.000 dinars, avec deux ans de différé et un remboursement sur sept ans. Les demandes pourront être déposées dès septembre 2025 via la plateforme. Les auto-entrepreneurs peuvent également recourir aux financements classiques de la Banque Tunisienne de Solidarité (BTS). Actuellement, 80% des inscrits exercent dans les services, 12% dans l'artisanat et 3% dans l'industrie. Les hommes représentent deux tiers des inscrits, contre un tiers de femmes. Sur le plan géographique, 80% se concentrent entre le Sahel et le Grand Tunis, laissant l'Ouest du pays nettement moins représenté.
La plateforme recense environ 340 activités issues de la liste des métiers forfaitaires du ministère des Finances, certaines professions inadaptées au travail individuel ayant été écartées. Les activités non listées peuvent être examinées par une commission technique. Pour accélérer l'actualisation, le ministère propose qu'un simple arrêté conjoint des ministres des Finances et des Affaires sociales, et non un décret, suffise à intégrer de nouveaux métiers. Concernant les propositions pour la loi de finances 2026, les recommandations incluent : * Elargir l'accès aux titulaires d'anciennes patentes fermées avant 2023 * Exonérer certains bénéficiaires de la contribution minimale pendant sept ans * Unifier et alléger la contribution sociale (CNSS) sur les trois premières années * Harmoniser la contribution fiscale annuelle, qu'on soit ou non en zone municipale La première année, aucune obligation comptable n'est imposée. Par la suite, la plateforme intégrera un modèle de facture simplifiée et un module de déclaration en ligne. Les paiements devront transiter par un compte bancaire professionnel, en partenariat avec certaines banques. Pour Mohamed Kefi Rahmani, la finalité est claire : « offrir une couverture sociale et des droits à la retraite à ceux qui travaillent aujourd'hui sans protection, et intégrer progressivement des centaines de milliers de travailleurs informels dans le système formel ».