La chambre correctionnelle d'été de la Cour d'appel de Tunis a confirmé, le 5 septembre 2025, un jugement par contumace condamnant le magistrat Mourad Messaoudi à huit mois de prison. Dans une réaction publiée sur ses réseaux sociaux, son avocat, Samir Ben Amor, a vivement dénoncé une « méthode d'un autre âge » sous l'ère du président Kaïs Saïed. Selon lui, le verdict a été rendu « sans audition de l'accusé ni plaidoirie de la défense », alors que le dossier avait été mis en délibéré uniquement sur la recevabilité de l'opposition.
Pour comprendre cette affaire, il faut remonter à août 2024. À cette époque, la chambre correctionnelle du tribunal de première instance de Tunis avait condamné Mourad Messaoudi par contumace pour octroi présumé d'avantages afin d'influencer des électeurs, une accusation que son avocat considère comme faisant partie d'une campagne visant à écarter toute candidature susceptible de concurrencer le président Kaïs Saïed lors de la présidentielle de 2024. La Cour d'appel avait confirmé cette condamnation le mois suivant, toujours sans que le magistrat ait pu se défendre. En février 2025, lors d'une audience d'opposition, le juge Messaoudi s'était présenté et avait obtenu l'annulation du jugement par contumace. La cour avait alors renvoyé l'examen de l'affaire et une attestation de fin de recherche avait été délivrée, marquant une étape censée clore le dossier. Pourtant, à la fin du même mois, un nouveau jugement l'avait condamné à huit mois, mais sans exécution immédiate, ce qui éteignait légalement les effets des décisions précédentes.
Malgré ce parcours complexe, le procureur général près la Cour d'appel de Tunis a émis, le 14 août 2025, un nouveau mandat de recherche contre le magistrat, en invoquant paradoxalement un jugement par défaut déjà caduc. Pour Me Ben Amor, il s'agit d'un « retournement gravissime de l'Etat de droit » et d'une illustration de la « toute-puissance de l'arbitraire judiciaire ». L'avocat parle même de « retour à l'âge des ténèbres », où la justice cesse de protéger les droits des citoyens pour devenir un instrument de pression.