En Tunisie, l'écolabellisation vient de connaitre un virage qui l'a fait passer du statut de lettre morte à celui d'action concrète. Attribuée jusqu'à présent sans une véritable législation et d'une manière tout à fait aléatoire, l'écolabellisation s'est dotée d'un cadre législatif et réglementaire approprié. Objectif : mettre en place un système, certes complexe, mais assez fiable, fixant les modalités d'octroi de l'écolabel tunisien. Mieux encore, sous arrêté du ministère de l'Environnement et du Développement durable, un écolabel touristique vient de voir le jour. En définissant ses critères écologiques et techniques, les autorités publiques affichent leur détermination à adhérer au plus haut niveau des standards internationaux, notamment en matière de respect de l'environnement. D'une manière générale, les écolabels distinguent les produits et les services les plus respectueux de l'environnement. Leurs critères garantissent l'aptitude à l'usage des produits et une réduction de leurs impacts environnementaux tout au long de leur cycle de vie. Créés à l'initiative des autorités publiques, les écolabels permettent d'apporter des garanties aux consommateurs en matière de qualité écologique des produits ou des services. L'adhésion par les acteurs économiques (fabricants, distributeurs ou prestataires) à cette normalisation constitue une marque de distinction vis-à-vis de la concurrence. Un nouveau cadre réglementaire en matière d'écolabellisation a été approuvé par le Sous arrêté conjoint du ministre de l'Environnement et du Développement durable, du ministre de l'industrie, de l'Energie et des Petites et Moyennes Entreprises et du ministre du Tourisme. Un décret dans ce sens a été publié le 16 octobre 2009. Il fixe les modalités de préparation, de validation, de diffusion et de révision des critères d'écolabellisation, ainsi que les modalités pratiques d'octroi de l'écolabel tunisien et du contrôle de son utilisation. Dans un premier temps, un comité technique permanent de l'écolabel tunisien sera chargé de l'identification préliminaire des catégories de produits à labelliser. Sa mission est de recueillir et d'analyser les propositions émanant des acteurs économiques, de s'initier aux expériences étrangères en la matière et de collecter les suggestions provenant de toute autre partie intéressée par l'écolabellisation. Une fois les catégories des produits identifiées, le comité examinera l'opportunité d'intégrer ces catégories à travers une étude de faisabilité. Les produits proposés à l'écolabel tunisien seront triés en fonction des critères ayant trait à la protection de l'environnement, à la santé, à la sécurité des consommateurs et aux expériences comparées en matière d'écolabellisation. Après la validation des critères techniques et écologiques pour chaque catégorie de produits, l'institut national de la normalisation et de la propriété industrielle (INNORPI) se charge de les diffuser. Bon à savoir : les exigences techniques et écologiques sont assujetties à une évaluation tous les cinq ans. Cette révision est indispensable afin de garantir que l'écolabel reste sélectif. D'autant plus que l'essence même de cette normalisation est de distinguer les meilleurs produits d'un point de vue performance d'usage et performance environnementale. D'autres variables, en l'occurrence le progrès scientifique et l'évolution technologique, doivent être prises en compte. Cette procédure est de nature à inciter les structures en charge à améliorer périodiquement, et en permanence, les performances environnementales des produits. Il est à noter que tout acteur économique peut demander volontairement l'apposition à l'écolabel tunisien. Un comité particulier pour chaque catégorie de produit, créé au sein de l'INNORPI et composé d'experts représentant l'administration, les producteurs et toute autre personne dont la participation est jugée utile, veille à l'octroi, la suspension ou le retrait de l'autorisation d'apposer l'écolabel tunisien. Le législateur souligne à cet égard que l'octroi de l'apposition est tributaire de la prise en compte de l'ensemble du cycle de vie des produits. Faut-il rappeler que les différents impacts environnementaux des produits doivent être étudiés depuis l'extraction des matières premières jusqu'à la fin de vie des produits, en passant par les étapes de fabrication, de distribution et d'utilisation ? C'est ce qui explique, en fait, que les exigences environnementales qui en résultent sont définies pour tous les produits d'une même catégorie, selon une approche multi-étapes et multicritères. Dans la pratique, seuls les écolabels apportent des garanties, notamment en matière de qualité d'usage des produits ou services ainsi que la réduction de leurs impacts environnementaux. C'est dans cette même veine de généralisation de l'approche de l'écolabellisation que le législateur tunisien a approuvé les critères techniques et écologiques de l'attribution d'un écolabel touristique. En vertu d'un arrêté, ces critères s'appliquent à la catégorie de produits "services d'hébergement touristique" qui comprend la fourniture payante d'un hébergement pour la nuit dans des chambres dûment équipées, contenant au moins un lit, en tant que service principal offert aux touristes, voyageurs et pensionnaires. L'hébergement peut comprendre la fourniture de services de restauration, d'installation de remise en forme et/ou d'espaces verts et autres activités culturelles et sportives. Les critères visent à limiter les principales incidences sur l'environnement des trois phases du cycle de vie du service (achats, fourniture du service, déchets). Plus particulièrement, ils visent la réduction de la consommation d'énergie et d'eau, l'optimisation de la gestion des déchets, l'incitation à l'utilisation de ressources renouvelables et de substances moins dangereuses pour l'environnement et la promotion de la communication et l'éducation en matière d'environnement. En attribuant au secteur touristique un écolabel, les autorités publiques tendent à révolutionner le tourisme en Tunisie. L'objectif de cette nouvelle certification n'est pas d'apprendre aux hôteliers à gérer leurs parcs touristiques, mais plutôt de les inciter à participer à un programme de mise à niveau " écologique". Les temps évoluent, et l'écologie prend désormais une place indispensable dans toute décision économique, voire politique. L'écolabel touristique permet de reconnaître ceux qui mettent en uvre des pratiques d'excellence environnementale en recherche, en enseignement et en évaluation des nouvelles technologies. Par l'adhésion à ce label, les établissements touristiques contribueront non seulement à la protection de l'environnement, par la mise en application de meilleures pratiques et procédures, mais également à lever haut le défi face à une concurrence acharnée. Vu sous cet angle, le "Vert" est désormais la couleur de la compétitivité. Walid Ahmed Ferchichi