A compter du mois d'octobre, Canal+, renoue de nouveau ses relations avec la place médiatique et les téléspectateurs tunisiens, elle qui s'est trouvée en 2001 forcée à quitter la Tunisie, et par l'occasion le grand Maghreb, suite à une prolifération effrénée des chaînes satellitaires et la recrudescence du piratage. Moins de dix ans après, Canal+ revient au Maghreb. Après l'Algérie et le Maroc, en 2009, le groupe français débarque en Tunisie avec comme capitaine à bord : Slim Chiboub, l'homme d'affaires et la figure populaire du milieu footballistique. Les deux partenaires devront cependant faire face à toute une économie informelle puisque le bouquet qu'ils vont commercialiser (autour de 170 DT par an) est déjà proposé via les récepteurs satellites Dreambox et des « abonnements » pirates à 110 dinars par an. Une convention a été signée jeudi dernier entre Oussama Romdhani, ministre de la Communication et Jean-Noël Tronc, président directeur général de la société CANAL-OVERSEAS, filiale du groupe Canal+ (Groupe Vivendi) chargé de l'international et de l'outremer français. Une convention donnant le feu vert au groupe français, représenté en Tunisie par Slim Chiboub, à commercialiser un bouquet, en partenariat avec « Arabsat », proposant 36 chaînes de télévision internationales multidisciplinaires englobant le cinéma, la découverte, le divertissement, l'art de vivre, la jeunesse, l'information, la musique et le sport. La Tunisie, faut-il rappeler, a des souvenirs avec le groupe français grâce à qui, elle a connu sa première chaîne cryptée, en l'occurrence la défunte Canal Horizons, créée en 1992, et qui a révolutionné l'univers télévisuel tunisien par sa liberté de ton et l'impertinence de ses animateurs. Seulement, la chaîne a été forcée de plier bagages, encaissant à l'époque les affres des mutations du paysage médiatique satellitaire qui a connu un véritable boom sans précédent. L'artillerie des pirates n'a fait qu'accélérer un peu les choses. Les temps ont changé et Canal+ ne veut plus laisser ce marché entre les seules mains des pirates et du commerce parallèle. La chaîne française a choisi, pour le marché tunisien, un partenaire de taille, Slim Chiboub en l'occurrence. Charismatique, fort connu dans les milieux des affaires et du football, M. Chiboub et ses compagnons de Canal+, réservent quelques « mauvaises » surprises pour les pirates des « satellites ». Ils ont même mis en place une stratégie qui leur permettrait de lutter contre le piratage, notamment en proposant des prix d'abonnement mensuels attractifs (autour de 20 dinars/mois), certaines sources parlent même de 170 DT par an. On croit savoir également, que pratiquement, ça sera le même modèle de distribution avec des cartes prépayées qui existent actuellement en Algérie, tout en s'appuyant sur un réseau de distributeurs locaux. Côté piratage, le bouquet semble immunisé et ce malgré la redoutable ingéniosité dont font preuve les hackers de tous bords. Si le piratage demeure un état de fait qui ne disparaîtra pas, il n'en demeure pas moins que les nouveaux partenaires disposent déjà d'un système de cryptage sécurisé très avancé, grâce à la dernière génération de carte VIACCESS (PC 4.0). Il faut rappeler, encore une fois, que c'est justement le piratage qui aurait bloqué, il y a quelques mois, le dossier de Canal + en Tunisie. La chaîne française avait entamé des négociations avancées avec un groupe tunisien de renom pour qu'il lui distribue les abonnements dans le pays. Ce groupe, fort expérimenté dans le secteur de la grande distribution, aurait sérieusement étudié le dossier et le business plan et a décidé de rejeter l'offre. Motif : le piratage. A l'époque, les prix demandés par Canal+ étaient nettement supérieurs à ceux proposés dans le secteur parallèle, ce qui n'encouragerait guère le consommateur à se diriger vers le réseau officiel du distributeur. Mais apparemment, rien n'a été en mesure d'obstruer la volonté de la chaîne française à s'acclimater avec la nouvelle donne et les spécificités particulières du marché tunisien. Ce marché demeure porteur et, en s'alliant avec Slim Chiboub, la chaîne est plus que certaine qu'elle va coiffer les pirates au poteau et avec eux, bien entendu, la Dreambox, cette boîte à merveilles, pour les téléspectateurs privés de moyens pour payer les chaînes cryptés. Il n'y a pas si longtemps, les fanatiques du petit écran se jetaient sur le patch pour décrypter ces chaînes. Tout un commerce a vu le jour, notamment chez les petits dépanneurs du coin, et surtout chez les commerçants du fameux Souk Moncef Bey. Un épineux "Tom et Jerry" se jouait entre les deux camps. Les chaînes exploitent les technologies de cryptage les plus récentes et toujours plus coriaces, avec notamment un code qui change en permanence. Les pirates s'ingénient, pour leur part, à trouver la (ou plutôt les) parades « technologiques » nécessaires. Enfin, ils ont trouvé leur salut dans la Dreambox, un casse tête chinois pour les chaînes cryptées. Cet appareil est lié à un abonnement ADSL qui lui fournit les codes instanément. Ces codes sont générés par quelques abonnements réellement souscrits auprès des bouquets satellitaires. En d'autres termes, c'est un abonnement réel en bonne et due forme qui est exploité par des centaines de milliers de personnes en temps réel. D'après les informations dont nous disposons, Canal + semble plus que déterminé à faire la peau à toutes ces solutions et aux pratiques de pirateries « illicites », revigorée par un franc succès sur les « fronts » algérien et marocain, après l'implantation de Canal Cverseas. Déjà, un recul du piratage aurait été enregistré. Les gens préfèrant payer un peu plus cher et être dans la légalité la plus totale. Canal + Vs dreambox, sharing et Internet, c'est un duel qui s'annonce trop chaud d'autant plus qu'une source nous a soufflé que M. Chiboub réserve une autre « mauvaise » surprise pour la gente de pirates. Avec le bouquet Canal+, on croit savoir qu'ill va également commercialiser le bouquet d'Al Jazeera Sport et ce pour des prix d'abonnement annuels attractifs, autour de 170DT/an. Dans l'attente qu'elle soit confirmée, une chose est sûre : les pirates ne vont pas facilement apprécier ce répit obligatoire, même, ne serait ce que pour un petit moment, avant qu'ils ne reprennent du service. Cliquer ici pour voir la caricature liée à ce sujet Walid Ahmed Ferchichi