La Tunisie vient de conclure avec succès une émission d'emprunt obligataire sur le marché international des capitaux, d'une valeur de 1 milliard de dollars. En deux jours, les autorités tunisiennes concernées ont pu lever cette somme auprès des investisseurs internationaux qui ont manifesté un engouement sans précédent, en souscrivant massivement à l'opération. D'aucuns considèrent cet emprunt comme une aubaine, nécessaire pour colmater le gap budgétaire, d'autres ont mis en garde contre les répercussions, pouvant être néfastes, de ce même emprunt. Afin de revenir sur les circonstances et les modalités de l'emprunt obligataire, une conférence de presse a été organisée, hier mercredi, en présence du ministre de l'Economie et des Finances, Hakim Ben Hammouda et du Gouverneur de la Banque centrale de Tunisie, Chedly Ayari. Les deux responsables ont donc présenté des éclaircissements sur l'émission de l'emprunt obligataire accordé à la Tunisie et qui équivaut en dinars tunisiens à deux milliards, avec un taux d'intérêt de 5,75 %. Chedly Ayari a expliqué qu'avec l'émission de cet emprunt, les autorités ont été agréablement surprises. Hakim Ben Hammouda affirme, en effet que « suite à l'émission de demandes d'offres d'une valeur égale à 500 millions de dollars sou forme d'obligations à un taux d'intérêt de 5,75 % , notre pays a reçu des offres de la part de 277 investisseurs montant à 4,3 milliards de dollars, parmi eux, 10 investisseurs des plus importants du monde ont donné confiance à notre pays et ont décidé de traiter avec les obligations de l'Etat tunisien ». Ainsi, il s'agit de 8 à 9 fois la somme demandée. Le Gouverneur de la BCT, précise qu'en empruntant sur le marché intérieur, le taux s'élève à 6,35%, soulignant l'importance d'avoir réussi à avoir un taux moindre et de surplus sur une durée de 10 ans. Et d'ajouter que « Le prochain ministre des Finances trouvera des ressources de 2 milliards de dinars, ce qui lui permettra de démarrer son mandat avec aisance». De son coté, le ministre de l'Economie et des Finances a estimé que ce résultat reflète la confiance accordée par les pays, les instances internationales et les investisseurs à la Tunisie, et ce en raison, principalement, de la réussite du processus électoral, de l'amélioration du climat sécuritaire et du progrès réalisé dans le dossier du terrorisme, d'autant plus que l'Etat tunisien est réputé de s'acquitter convenablement de ses dettes. Plusieurs voix se sont élevées contre le taux d'intérêt exagéré et la politiques d'endettement que le gouvernement a adopté. Répondant à cela, Chedly Ayari réplique que l'intérêt n'est pas exagéré et qu'il est plutôt raisonnable, tenant compte des transactions dans le marché international des capitaux. D'après ses dires, la BCT et le gouvernement tunisien, contrôlent bien l'endettement national et l'emprunt en question s'inscrit dans le cadre de la gestion de l'économie tunisienne et du financement de la vie économique. On apprend que parmi les facteurs ayant poussé à recourir à cet emprunt, l'augmentation du taux de compensation de l'ordre de 5000 milliard de nos millimes, la faiblesse du taux d'épargne qui ne dépasse pas les 13% du PIB et la pression qui s'exerce sur les finances publiques, pour réserver en particulier 800 millions de dinars par moi sa fin de couvrir les salaires de 800 mille fonctionnaires de l'Etat. Le gouverneur de la BCT a indiqué qu'il est possible de mobiliser les ressources budgétaires souffrant d'un déficit d'environ 30% en exerçant une pression sur les dépenses, en maîtrisant l'endettement interne, en rationalisant la dette extérieure et sur tout en augmentant la production et en élevant le niveau des exportations par la réduction du taux des importations. Il a souligné en conclusion que les marchés internationaux de financement sont les mêmes avec lesquels la Tunisie traite depuis l'indépendance, autant pour financer les projets d'investissement que pour couvrir le déficit budgétaire. Ainsi dans le but de renflouer les caisses de l'Etat et de mobiliser les fonds nécessaires à financer les dépenses qui s'amplifient davantage, le gouvernement Jomâa s'est employé à contracter cet emprunt. De l'avis de l'expert financier, Moez Joudi il s'agit là d'un faux pas monumental, vu que les 1 milliard de dollars ne servira pas à l'investissement, au développement et à la création de richesses, mais au contraire, à la consommation et "au colmatage des brèches qui deviennent bien profondes" selon ses propres dires. D'autre part, M. Joudi ne considère pas cette opération comme le succès annoncé, mais une démarche périlleuse, qui aura pour conséquence l'accroissement de l'endettement de la Tunisie. Il souligne que le nouvel emprunt "coûtera annuellement au budget de l'Etat plus de 200 millions de dinars"! Constat alarmant, certes, qui a poussé l'expert financier à tirer la sonnette d'alarme, d'autant plus qu'il estime qu'en 2017, "cette rubrique du budget de l'Etat dépassera même les 8 milliards de dinars". Consternant si on prend en compte le déficit budgétaire plus que critique. C'est à se demander si la situation tendra un jour à s'améliorer, dans un pays aux équilibres financiers, fragiles et fragilisés.