La visite du milliardaire américain George Soros, lundi 9 mars, n'est pas passée inaperçue. La polémique est déclenchée immédiatement et pour cause ! La philanthropie affichée de l'Américain ne serait qu'une vitrine pour des projets nettement plus sordides. L'historique de précédents projets de M. Soros en Tunisie le prouve. George Soros né en 1930 dans une famille juive hongroise est devenu célèbre pour ses activités de spéculation sur les devises et actions, d'après la biographie non officielle sur Wikipédia. Bien qu'elle ne soit pas suffisamment crédible, cette biographie mérite le détour (cliquer ici) pour comprendre comment cet octogénaire a démarré comme maître-nageur et porteur de bagages pour devenir ensuite milliardaire. Sa fortune est estimée à 22 milliards de dollars en 2012, selon le magazine de référence Forbes. Soit près de deux fois le budget de l'Etat tunisien. George Soros ne fait pas peur, mais il inquiète. Son historique en Tunisie n'est pas suffisamment clair pour qu'on lui fasse suffisamment confiance. La polémique déclenchée suite à sa visite lundi dernier est donc fondée et le fait qu'il soit reçu par le président de la République en personne a de quoi susciter l'inquiétude. Notamment pour ceux qui ont voté BCE et Nidaa, ceux-là mêmes qui étaient vilipendés matin, midi et soir par les « hommes » de Soros.
Un des projets phares de George Soros en Tunisie est le blog participatif Nawaat. Ce site a été financé, à fonds perdus, par l'Américain durant des années. Jusqu'à après la révolution, ce blog a servi de relais pour les tribunes des différents opposants au régime Ben Ali. Ses membres vedettes, Malek Khadhraoui, Sami Ben Gharbia, Ramzi Bettibi, Sana Sbouï et Amine Mtiraoui se présentaient bruyamment comme le fer de lance de « l'intégrité » du « journalisme de qualité » et de « la lutte contre la corruption ». Est-ce vrai ? Concrètement, et quand on voit les articles publiés, on constate que d'intégrité il n'y a que le nom. Que la déontologie n'est respectée que lorsqu'elle sert certaines parties. Durant des années, Nawaat a publié des dizaines d'articles d'intox pour déstabiliser tel ou autre opposant à la troïka. Des tribunes libres sont offertes aux CPR et autres néo-révolutionnaires et des articles diffamatoires et salissants contre ceux qui sont mêlés, de près ou de loin, à l'ancien système, voire même ceux qui défendent (tout simplement) une Tunisie républicaine et laïque et une justice sans revanche. Des publications sans vérification et des articles violant les données personnelles, il y en a eu des masses. Deux exemples restent dans les annales, la publication des communications privées de Kamel Letaïef, dévoilées alors par l'avocat Chérif Jebali, et l'affaire Sebsi Gate derrière laquelle se trouvait l'avocate personnelle de Moncef Marzouki. Nawaat se presse de salir le lobbyiste et le fondateur de Nidaa Tounes, mais n'offre en aucun cas un droit de réponse ou des explications quand ont été prouvées par a+b que les données publiées étaient erronées ou trompeuses. On ne se donne même pas la peine de dire qu'un avocat comme Cherif Jebali traine des procès en justice pour … escroqueries à l'encontre de ses clients. Quant à Béji Caïd Essebsi, son parti et ses fans, ils étaient (pour très longtemps) les souffre-douleur de l'équipe de Nawaat. Où sont aujourd'hui ces « vedettes intègres » de Nawaat ? Ramzi Bettibi a rejoint le lobbyiste Chafik Jarraya et fait tout pour blanchir le Libyen (accusé par certains de terrorisme) Abdelkrim Belhadj. Amine Mtiraoui a rejoint l'équipe de Nidaa Tounes et a bien sué dans la campagne présidentielle pour que Béji Caïd Essebsi aille à Carthage. Sami Ben Gharbia est resté là où il est, alors que Sana Sbouï et Malek Khadhraoui ont fondé un nouveau site d'information financé en partie par les Européens qui prétend faire du « vrai journalisme » différent de ce que font les médias tunisiens. Un financement totalement illégal, au regard de l'article 28 du décret-loi 2011-115. Ici aussi, tout comme Nawaat, le curseur de l'intégrité s'arrête à un niveau bien déterminé.
L'autre projet phare de George Soros en Tunisie est l'antenne de Human Rights Watch. Cette ONG qui dénonce les abus contre les droits de l'Homme en Tunisie. Présidée par Emna Guellali, l'antenne tunisienne de HRW ne s'est pas spécialement manifestée par des écarts de conduite ou de violation de la déontologie, comme Nawaat. N'empêche, sa présence intrigue, surtout que la Ligue tunisienne des droits de l'Homme (la plus ancienne du monde arabe) est connue pour son intégrité et sa droiture.
Durant sa rencontre avec Béji Caïd Essebsi, George Soros a parlé de différents nouveaux projets en Tunisie qui seront créés par le biais d'une nouvelle antenne tunisienne de son organisation philanthropique Open Society. Parmi ces projets, la restauration des maisons de culture. On en saura davantage dans les prochains mois, mais s'inquiéter sur les véritables intentions du milliardaire est tout à fait justifié. Sans pour autant tomber dans la théorie du complot, il est bon de rappeler les accusations qui ont ciblé par le passé le « philanthrope ». A commencer par l'origine de sa fortune amassée par la spéculation. Certains iraient jusqu'à l'accuser de blanchiment d'argent, de trafic de stupéfiants et d'évasion fiscale, sans pour autant qu'il n'y ait d'accusation officielle en bonne et due forme. D'autres l'accusent de chercher à établir des positions dominantes à travers le monde à des fins de profit personnel, le tout sous couvert de philanthropie. Ce qui reste à prouver. Si certaines accusations sont fantaisistes ou infondées, d'autres le sont moins. Durant la crise financière asiatique de 1997, l'ancien Premier Ministre de Malaisie, Mahathir Mohamed, l'a accusé de spéculer sur la monnaie de son pays, à l'origine de tous ses malheurs. Cinq ans plus tôt, au Royaume-Uni, on l'accuse d'avoir fait sauter la banque d'Angleterre après sa spéculation sur la livre sterling, d'où il aurait tiré une plus-value de 1,1 milliard de dollars. En 2011, la Cour européenne des droits de l'Homme le déboute dans son long procès en France dans lequel il a été condamné pour délit d'initié dans l'affaire de la banque Société Générale.
Outre les affaires d'argent, on retrouve George Soros dans des crises politiques aigües de plusieurs pays. Avec le groupement politique serbe Otpor qui entraîne des activistes du monde entier à renverser des gouvernements opposés aux intérêts des Etats-Unis ; avec les activistes d'Euromaïdan en Ukraine (en 2013-2014), à travers l'International Renaissance Foundation… Cet historique national et international fait que George Soros ne soit pas vu du meilleur œil en Tunisie. S'il est indéniable qu'il a plusieurs projets réellement de bienfaisance et servant la science et la démocratie, il en a d'autres qui laissent les observateurs sceptiques sur les réelles intentions du « philanthrope » en Tunisie, d'autant plus que ses antécédents projets dans notre pays n'étaient pas assez transparents et suffisamment intègres pour être rassurants.