Le pays est à l'arrêt, nul besoin d'être oracle pour le constater. La construction institutionnelle est en panne, la cour constitutionnelle, le conseil supérieur de la magistrature, le code régissant les collectivités locales et bien d'autres éléments censés fonder notre jeune démocratie peinent à voir le jour.
L'investissement productif est à l'arrêt, les opérateurs économiques, les consommateurs comme les entreprises, ne se sentent pas en confiance. Le gouvernement est privé d'une loi d'urgence économique censée permettre le déblocage de la situation. Le déficit des caisses sociales, le déficit commercial et le déficit courant se creusent de jour en jour. Les indicateurs macroéconomiques tels que le taux de chômage, le taux d'inflation, la parité du dinar vis-à-vis de l'euro et du dollar ne s'améliorent pas.
Des réformes de fond, qui concernent l'administration, les entreprises publiques et le financement de l'économie sont proposées par le gouvernement et s'empilent au bureau de l'assemblée des représentants du peuple, elles peinent à en dépasser le seuil. Une ARP qui manque de moyens, souvent de volonté voire d'ambition pour légiférer vite et bien.
On assiste en somme à un Etat affaibli après janvier 2011 avec une constitution consensuelle, tantôt archaïque, tantôt moderne, diluant de manière certaine le pouvoir et rendant par la même le pays difficilement gouvernable, certainement en réaction aux pouvoirs dirigistes anciens. Un Etat que des prédateurs de tout bord ont fini par mettre quasiment à genoux. Mais qui sont ces prédateurs ? Des rentiers de l'économie, des membres de syndicats, certaines corporations, des mafias de la contrebande, des populistes poujadistes, quelques chancelleries étrangères... Chacun y a sa part !
Un Etat qui, pourtant, résiste bien au terrorisme daechien et arrive cahin-caha à assurer la sécurité un peu partout dans le pays et qui malgré les tensions politiques, connait un calme relatif de la rue. Ce sont là, les deux plus grands actifs gagnés ces deux dernières années.
Les élections municipales prévues fin 2017 arrivent à point nommé pour espérer briser cet état de léthargie généralisée. Le consensus a été certainement utile pour un moment de notre histoire récente, mais aujourd'hui, il est temps de le dépasser. Avec l'avènement d'une démocratie locale, les citoyens pourront enfin s'emparer de leur destin dans leur espace commun le plus proche. Il faut qu'ils fassent preuve, avec leurs représentants, d'un sens aigu de la responsabilité et du don de soi pour le bien de leur collectivité et de leur pays, en somme pour leur propre bien. Ces échéances ne doivent pas être l'occasion de déchirements régionalistes voire tribaux avec l'émergence de velléités autonomistes ou sécessionnistes. En l'absence de tradition de la pratique démocratique au niveau local et en présence de forces extérieures occultes, dotées d'incroyables moyens financiers et médiatiques, qui ne visent qu'à semer le chaos, la vigilance est de mise ! Les municipales doivent être l'occasion pour les citoyens tunisiens de s'approprier le processus de démocratisation du pays en exploitant l'opportunité qu'offre davantage de décentralisation, tout en limitant les risques et possibles travers.
Oui pour des villes enfin propres, oui pour des cités où il fait bon vivre, oui pour des services communaux de qualité, oui pour des municipalités avec une bonne gouvernance, de la redevabilité et de la transparence dans la gestion. Oui pour construire une démocratie tunisienne partant du bas et allant vers le centre, oui à la concurrence saine entre les formations politiques, projets contre projets, dans l'intérêt exclusif du citoyen et de la Tunisie. Non à l'immobilisme et l'apathie de la vie politique et socioéconomique du pays.
Oui ! Nous avons grand besoin de cette compétition pour contrer l'immobilisme. En campagne et aux urnes citoyens !