Après deux années difficiles, la Société nouvelle maison de la ville de Tunis, SNMVT Monoprix, a su renverser la vapeur et renouer avec la rentabilité, grâce son plan de transformation. D'ailleurs, le management s'attend à une croissance à 2 chiffres pour 2017, ce qui a certes rassuré les actionnaires minoritaires mais n'a pas apaisé leur colère, surtout qu'ils n'auront pas droit cette année à un dividende. Ceci dit, l'assistance a été plutôt dans un esprit de critiques constructives et globalement, l'assemblée générale ordinaire pour l'exercice 2016 qui a lieu ce vendredi 9 juin 2017 à Arena, sous l'égide du président du conseil Mohamed Mounir Ben Miled et du directeur général Fadhel Kraïem, s'est bien passée. Compte rendu. La SNMVT Monoprix clôture 2016 avec un résultat bénéficiaire de 1,92 million de dinars (MD) contre 4,73 MD une année auparavant. La société a dû payer un impôt de 1,13 MD et une participation exceptionnelle de 0,19 MD. Elle a enregistré un chiffre d'affaires (CA) HT en hausse de 0,27%, qui a évolué de 531,41 MD en 2015 à 532,84 MD en 2016. La charge nette s'est stabilisée au même niveau que l'an dernier à 17,95%. Ses charges d'exploitation ont évolué de 8,4%, sous l'effet de la hausse des frais de personnel de 15% et des dotations d'amortissements et des provisions de 21% à cause des ouvertures 2015 et 2016. Pour le groupe, le résultat net de l'ensemble consolidé passe de 3,99 MD en 2015 à 2,8 MD en 2016, avec un impôt de 3,52 MD et une participation conjoncturelle de 0,97 MD.
La crise économique a fini par rattraper la grande distribution. La baisse du pouvoir d'achat et la concurrence déloyale du marché parallèle en plus d'une conjoncture économique difficile ont fortement impacté ce secteur. En effet, depuis 2013, la société subissait un effet ciseau où la croissance du chiffre d'affaires était moins importante que celle des charges d'exploitation et à leur tête la masse salariale. Face à cette situation compliquée, l'enseigne a décidé de s'attaquer au fond du problème, avec une remise en question totale. Cette réflexion a abouti sur la mise en place d'un plan de transformation sur 2 ans. 2016 a été, ainsi, une année charnière avec un changement de l'équipe managériale et la définition d'une nouvelle stratégie. L'objectif étant de revenir à la normale et renouer avec la rentabilité, en développant le CA et en maîtrisant les charges. Au cœur de cette refonte, l'amélioration de l'expérience client et la motivation du personnel. La société s'est lancée dans la réorganisation de la direction d'exploitation commerciale avec la création de 6 directions régionales et d'une direction du réseau Mini. Elle a renforcé la gouvernance de l'entreprise, le conseil d'administration ayant accueilli deux nouveaux administrateurs indépendants. La société a, aussi, investi dans un nouveau système d'information de gestion de magasin, qui a fait ses preuves. Elle a étendu sa plateforme logistique avec un nouveau site à Radés de 7.200 m2. Elle a également démarré un programme d'économie d'énergie, avec pour objectif de réduire sa facture STEG de 15% en 2017. Egalement dans ses projets, la maîtrise des charges salariales, notamment avec le redéploiement d'une partie de l'effectif vers les nouveaux sites, la réduction des frais de fonctionnement et des frais généraux, le développement de la fonction achat et l'amélioration de la trésorerie.
En parallèle, la SNMVT Monoprix a continué ses investissements que ça soit avec de nouvelles ouvertures ou des rénovations. Entre 2016 et mi 2017, l'enseigne a ouvert 11 nouveaux points. Elle rénovera au cours de deux années 6.000 m2. Pour la première fois, l'enseigne a fermé deux magasins, ceux de Djerba et Chihiya (Sfax), jugés non-rentables par la commission d'évaluation des performances magasins. Une démarche qualité orientée client a été adoptée, avec une réduction du nombre de références et une optimisation du mix, pour améliorer la logistique de l'entreprise. Dans cette stratégie, les produits frais ont retrouvé une place préférentielle, avec le concept "Place de marché".
Ouvrant le débat, Moncef Ouaghlani, secrétaire général de l'Association de promotion du marché financier, s'est interrogé sur l'impact des redressements, fiscal et CNSS, sur les comptes de la société. Il a demandé si la société avait une stratégie pour redresser ses magasins en difficulté et pour contrer la concurrence qui devient de plus en plus rude. Ahmed Kodia a estimé, pour sa part, que la société n'est pas au meilleur de sa forme. Il a noté que l'action a été divisée par 3 en 3 ans. Il pense que les produits Land'Or a été écarté des rayons de Monoprix à cause de son conflit avec Saïda, ce qui pénalise l'enseigne. Il a demandé plus de précision sur la cession d'actifs opérée par le groupe. Pour lui, la société ne souffre pas de problèmes conjoncturels mais plutôt de problèmes structurels. Il a affirmé que beaucoup de petits-porteurs n'ont pas été présents à cette AGO tellement ils sont en colère. Mustapha Chouaïeb a, quant à lui, appelé à une augmentation de capital par incorporation des réserves et distribution gratuite d'actions. Il a aussi revendiqué un représentant des petits porteurs au conseil d'administration. Il s'est interrogé sur la manière dont la banque choisissait les banques pour l'octroi d'un crédit. Habib Bouzouita a applaudi le plan de restructuration avec cette culture d'entreprise que veut instaurer l'enseigne. Il estimé que, selon les prévisions annoncées, la société atteindra un résultat net de 15 MD en 2020, ce qui représentera un retour aux belles années de Monoprix. Il a soutenu l'appel de Chouaïeb pour une augmentation de capital avec distribution d'action gratuite outre la distribution de dividende, pour compenser les pertes des actionnaires ces dernières années.
En réponse à ce flot de questions, Fadhel Kraïem a indiqué que la société s'est lancée dans un chantier de réduction des charges. Ainsi, la rentabilité de chaque magasin est analysée. Pour ceux qui ont des ratios pas équilibrés, les actions nécessaires seront menées. L'enseigne n'hésitera pas fermer ceux qui n'arrivent pas à renouer avec la rentabilité, comme elle l'a déjà fait, a-t-il affirmé. Au sujet de la masse salariale, il a noté que l'effectif est resté stable alors que l'activité a augmenté, en 2016. Plusieurs actions ont été entamées, notamment en encourageant la mobilité interne, en cherchant l'expertise et en mettant en place un plan de départ volontaire à la retraite qui vise une centaine de personnes âgées de 55 ans et plus. Pour contrer la concurrence, l'enseigne mise sur la bonne qualité pour fidéliser ses clients ainsi que sur une dynamique des promotions et des prix. Son objectif est de devenir la marque préférée des Tunisiens dans quelques années. Si un plan a été mis en place, ce n'est pas pour maitriser le contexte économique, mais c'est justement pour résoudre les problématiques internes de la société. Ceci dit le commerce informel demeure une réalité très pénalisante. M. Kraïem a souligné que le choix de l'emplacement des ouvertures de magasin est très important et que le coût par m2 est situé entre 1.700 à 2.000 m2. Concernant le choix de la banque pour l'octroi de crédit, il a précisé que la société lance une consultation, et choisit la banque qui offre les meilleures conditions et avantages, l'intérêt de l'entreprise primant.
Le directeur financier a précisé, quant à lui, que la cessation d'actif pour un montant de 30 MD a porté sur des contrats de portage de 25 MD et la vente pour un montant de 4,6 MD d'un seul bien immobilier situé à La Marsa et qui appartient à l'une des filiales de la société. Les commissaires aux comptes ont soutenu que les deux redressements auront un impact infime sur les comptes. Ils ont précisé que la société a dû payer 0,2% de chiffres d'affaires en impôt, c'est pour ça que l'impôt payé est aussi important que l'année dernière alors que le bénéfice a baissé de 2 ?5 fois.
En réponse à Ahmed Kodia, Mohamed Ali Mabrouk a expliqué que si les petits-porteurs ont été pénalisés par la baisse du cours de l'action, les actionnaires majoritaires ont été, pour leur part, très pénalisé. C'est dans ce cadre que Fadhel Kraïem a été nommé pour justement redresser la situation. Il a rappelé qu'il y a eu beaucoup de spéculation sur le titre en 2014, notamment à cause projet libyen qui n'a pas marché. Concernant Saïda, il a précisé que le groupe est leader dans son secteur, mais que Monoprix travaille en générale avec tous les concurrents. Il a souligné que si Monoprix a cessé toute relation commerciale SOVIA-Land'Or s'est parce que la société à attaquer le groupe pour position dominante, et donc indépendant de son litige avec Saïda. Il ne faut pas imputer la baisse de performance de Monoprix à un fournisseur qui représente montant infime au CA réalisé par Monoprix. Le groupe Exis a été fortement pénalisé par la baisse du cours d'action et mis en place une stratégie pour redresser Monoprix, a-t-il martelé. Certes les 3 dernières année ont été difficiles, a-t-il admis, mais pour lui, aujourd'hui, le rôle des petits-porteurs est d'accompagner la société et de croire en son plan d'action, puis de laisser un minimum de temps pour que les choses évoluent. «Nous en tant que Exis, on y croit !», a-t-il souligné.
M. Ben Miled a promis, pour sa part, que si la société réalise le résultat attendu dans le business plan, elle distribuera un dividende l'année prochaine. S'agissant du représentant des petits-porteurs, il n'a pas soulevé d'objection, bien au contraire, il demandé aux actionnaires de soumettre des idées sur le cahier de charge, les conditions et la manière de choisir leur représentant.
La frénésie de la consommation passe par des hauts et des bas en Tunisie. Au mois de ramadan par exemple, la consommation augmente qui peut atteindre les 50%, mais la morosité de la situation économique pousse les Tunisiens à faire des arbitrages au détriment de certains produits. Ceci dit, le commerce structuré (les chaines de distribution, superettes, chaines spécialisées), qui représente à peine 25% du commerce (en comparaison avec la France où il est de l'ordre de 99%) a encore de la marge dans notre pays et de belles perspectives. D'ailleurs, l'Etat tunisien a accordé 7 nouvelles autorisations pour la création d'hypermarché. Le groupe Monoprix a eu deux parmi elles : son premier hypermarché Azuz City sera situé à Ben Arous alors que le second sera situé à Sousse. L'ouverture des deux est prévue pour 2019. La SNMVT Monoprix compte poursuivre, pour la période 2017-2020, le programme de développement de son réseau, avec un rythme de 5.000 m2 de surface de vente par an, pour atteindre une surface totale de 85.000 à 90.000 m2 en 2020. L'enseigne s'attend à une croissance annuelle de son chiffre d'affaire entre 8% et 10% pour cette période, pour atteindre un ratio EBITDA supérieur à 5% en 2018 et de 6% en 2020 (contre 2,49% en 2016). Elle vise à atteindre un ratio résultat net supérieur à 1,5% en 2018 et de 2% fin 2020 (contre 0,36% en 2016).
