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La folie (des grandeurs) de Hafedh Caïd Essebsi
Publié dans Business News le 23 - 05 - 2018

La guerre entre Hafedh Caïd Essebsi et Youssef Chahed est désormais publique. Du côté de Youssef Chahed, l'opposition compte les points, les « victimes » de la guerre contre la corruption se frottent les mains et le public regarde éberlué ce qui se passe. Au vu des rebondissements des dernières 48 heures, la guerre intestine du sommet du pouvoir semble être à son dernier round.

Il y a 15 jours à peine, tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes. Les frères ennemis, le fils et le filleul du président de la République, se sont enfin rabibochés après plus d'un an de coups tordus. Hafedh Caïd Essebsi, directeur exécutif non-élu de Nidaa Tounes, est en pleine campagne électorale pour les municipales et il avait besoin d'un coup de pouce de Youssef Chahed et de ses ministres pour les remporter. Après avoir cassé en mille morceaux le parti fondé par son père, le fils n'avait plus d'autre choix que d'appeler au secours le chef du gouvernement.
En dépit de l'image négative dégagée pour sa personne et son gouvernement, Youssef Chahed a mouillé la chemise acceptant d'affronter toutes les critiques qui criaient au scandale sur ce mélange de genre auquel les Tunisiens ne sont pas habitués. En descendant sur le terrain, Youssef Chahed pensait pouvoir enfin fumer le calumet de la paix avec Hafedh Caïd Essebsi. Au lieu de quoi, ce dernier a exigé son limogeage immédiat dans le cadre de la discussion de l'Accord de Carthage II.
Un accord dans lequel participent les principales forces politiques et sociales du pays et qui a nommé Youssef Chahed, en août 2016, à la tête d'un gouvernement d'Union nationale.

Le hic c'est que ce gouvernement ne sied pas à Hafedh Caïd Essebsi qui n'a pas réussi à y nommer un bon nombre d'amis et qui a été totalement exclu des principales décisions engageant le pays.
Sa revendication est légitime dans le sens où il ne comprend pas comment son parti Nidaa Tounes, vainqueur des élections et un des acteurs majeurs de l'Accord de Carthage, ne soit pas impliqué dans les grandes décisions.
Une réflexion qui atteint ses limites rapidement quand on sait que Youssef Chahed lui-même est issu de Nidaa, ainsi qu'un bon nombre de ses ministres.
Mais ce que demande Hafedh est bien au-delà de ce qu'on lui a donné, car ce qu'il veut est que Youssef Chahed soit un exécutant des desiderata du parti. Un peu comme si Youssef Chahed était le directeur général d'une SA qui devait exécuter les décisions d'un conseil d'administration. Sauf que Hafedh Caïd Essebsi ne saurait représenter à lui seul un conseil d'administration, puisque Nidaa Tounes n'a pas de bureau exécutif, ni de structure élue, et que Youssef Chahed ne peut être ce simple exécutant, surtout qu'il doit aussi composer avec d'autres acteurs de la scène, à commencer par Ennahdha, l'UGTT et autres.
Face à la fin de non recevoir du chef du gouvernement, Hafedh Caïd Essebsi a commencé à mettre les bâtons dans les roues du gouvernement. On a d'abord commencé en sous-main avec l'aide de plusieurs contrebandiers et du sulfureux Chafik Jarraya, qui fut pendant un bon bout de temps le financeur principal de Nidaa Tounes. Un des tous premiers épisodes de cette guerre intestine, fut le sit-in du Kamour. Frappé par surprise et bien fragilisé, le gouvernement s'en est sorti bien renforcé au grand dam de Hafedh Caïd Essebsi.

Youssef Chahed a repris le travail et a abordé une de ses missions les plus délicates : la guerre contre la corruption. Plusieurs contrebandiers, parmi les proches de Nidaa, ont été arrêtés dont Chafik Jarraya, le grand ami de Hafedh Caïd Essebsi et plusieurs de ses conseillers. Pire, Chafik Jarraya ne s'est pas trouvé impliqué dans une simple affaire de corruption seulement, mais dans une très grave affaire liée à la sûreté de l'Etat dans laquelle sont tombés deux grands directeurs du ministre de l'Intérieur et l'ancien ministre de l'Intérieur, Najem Gharsalli.
Par cynisme ou par calcul pour éviter toute fuite d'information et d'ingérence dans le travail judiciaire et policier, on l'ignore, mais l'arrestation de Chafik Jarraya a coïncidé par le 1er jour du déplacement en Chine de Hafedh Caïd Essebsi et Sofiène Toubel, chef du bloc parlementaire de Nidaa.
Cette arrestation est considérée par Hafedh Caïd Essebsi comme un double coup bas impardonnable. Non seulement, Youssef Chahed lui a mis son ami en prison, mais en plus il prive Nidaa de son principal financeur. Nous sommes en mai 2017 et, depuis, la guerre fratricide est étalée publiquement.

En septembre 2017, mais aussi à l'occasion des discussions sur la Loi de finances ou au lendemain de l'inscription de la Tunisie sur la liste noire de l'Ecofin, Hafedh Caïd Essebsi ne rate pas une occasion pour tenter de fragiliser Youssef Chahed et l'éjecter de la présidence du gouvernement. Les noms des candidats vont du plus clownesque au plus sérieux, tel celui de feu Slim Chaker.
Pour l'aider dans sa mission, qui exige un grand tact politique dont il est totalement dénué, Hafedh Caïd Essebsi a fait appel à plusieurs profils et on en trouve de toutes les couleurs. Des couleurs qui ne se marient pas forcément ensemble et qui ont donné pour résultat un patchwork kitch digne d'un Bollywood, à l'extrême opposé de ce qu'était Nidaa en 2014 quand il a brillamment remporté les législatives et la présidentielle. On trouve ainsi le machiavélique Borhen Bsaïes qui a échoué à redorer le blason de Zine El Abidine Ben Ali et de Slim Riahi, Iyadh Ouedherni, l'ancien chef de cabinet de Ben Ali, Samir Laâbidi qui a multiplié les échecs cuisants sous Ben Ali en tant que ministre de la communication et avec Mondher Zenaïdi quand il s'est présenté à la présidentielle de 2014, Mohsen Hassen, qui n'a pas brillé comme ministre du Commerce et qui a mené Slim Riahi aux abîmes, Khaled Chouket, ancien réfugié islamiste totalement déconnecté de la réalité politique tunisienne et qu'on soupçonne d'être le cheval de Troie des islamistes. La liste ne s'arrête pas là, mais le nouvel entourage de Hafedh Caïd Essebsi (dont il n'a fait vraiment la connaissance que depuis deux ans) l'a totalement isolé des vrais nidaistes, qui ont été des premiers combats, et de la vraie société tunisienne.
On lui donne tellement du « monsieur le président », on lui fait croire qu'il est aimé et qu'il est un fin tacticien politique, qu'il a été rapidement propulsé au sommet de la tour d'ivoire du Lac.

La vérité est que Hafedh Caïd Essebsi est incapable de mener une véritable discussion politique et encore moins de dresser un programme et avoir une vision d'avenir. Malgré tous les appels de son ancien entourage de le raisonner pour se retirer, dans son propre intérêt et dans l'intérêt de son père, du parti et du pays, il s'est entêté à rester à la tête de Nidaa. On l'a alors poussé à se former politiquement pour être un vrai homme politique et non le simple « fils de », il est toujours incapable d'assister à un plateau télévisé en direct. Encore moins de présider un meeting politique. D'ailleurs, on ne l'a quasiment pas vu à la campagne des dernières municipales, alors qu'il était censé être partout et de tous les meetings. Sa seule sortie était catastrophique et c'était un appel au secours, pour faire face « au projet obscurantiste », prononcé dans une vidéo diffusée en plein silence électoral, trois heures avant la fermeture des bureaux de vote.
Très mal conseillé par ses nouveaux proches intéressés et opportunistes, têtu, Hafedh Caïd Essebsi joue la fuite en avant. Après les élections, c'est la tête et uniquement la tête de Youssef Chahed qu'il veut.
Ses conseillers l'ont jeté dans les bras de Noureddine Taboubi, secrétaire général de l'UGTT en qui il a trouvé un excellent allié de circonstance. Non seulement il veut éjecter Chahed, mais il veut aussi que tout le gouvernement s'engage à ne pas se présenter aux futures élections de 2019. Peu importe la polémique suscitée dans l'opinion publique et l'anti-constitutionnalité de sa proposition, Hafedh Caïd Essebsi n'entend plus personne à part Borhen Bsaïes, Mohsen Hassen, Khaled Chouket, Samir Laâbidi, Sofiene Toubel, Anis Ghedira… A chacun de ces conseillers ses propres objectifs personnels et qui cherchent, tous, à recouvrer un poste ministériel ou une virginité perdus.

Mardi 22, Hafedh Caïd Essebsi a pris tout le monde de court en annonçant un nouvel ordre du jour avec la présentation de sa proposition d'éjection de Youssef Chahed. Elle fut rejetée par cinq contre quatre à sa grande surprise. Deux de ses supposés alliés, l'Utica et Ennahdha, l'ont lâché. Ne sachant pas comment convaincre son père et encore moins l'opinion publique, face à ses désaveux successifs, il tente le tout pour le tout ce mercredi 23 mai 2018 en publiant un long post Facebook dont le style - fond et forme - ressemble comme deux gouttes d'eau à celui de Borhen Bsaïes.
Un peu comme la danse du coq égorgé, se moque-t-on de lui sur les réseaux sociaux, comme c'est le cas depuis plusieurs jours et particulièrement depuis hier mardi. Aussi bien sur les pages de l'opposition que des progressistes et des nidaistes, Hafedh Caïd Essebsi fait l'unanimité contre lui.

En face, Youssef Chahed adopte la parfaite stratégie chiraquienne : « Surtout ne rien faire et laisser son ennemi multiplier les erreurs ». Pour le moment, il réalise un sans-faute, sachant que quoi qu'il arrive, il va gagner. S'il reste à la Kasbah, il pourrait continuer son programme de réformes entamé il y a deux ans et se préparer éventuellement pour les élections de 2019. S'il est éjecté, il aura été la victime de Hafedh Caïd Essebsi et peut, dès lors, faire un putsch sur Nidaa et/ou se préparer pour 2019. L'autre option qui s'offre à Youssef Chahed est d'adopter la stratégie d'Emmanuel Macron qui a démissionné à l'été 2016, en pleine polémique et crise politique, pour se préparer à la présidentielle de mai 2017. Quelle que soit l'issue de cette guerre, l'actuel chef du gouvernement en sort vainqueur, ce qui n'est pas le cas de Hafedh Caïd Essebsi qui, à cause de son entourage fâcheux, risque carrément de faire subir à sa famille ce qu'ont fait subir les Trabelsi à Ben Ali.


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