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Abir Moussi, Sami El Fehri, Nabil Karoui, les militants qui créeront la IIIème République
Publié dans Business News le 13 - 12 - 2019

Qui a milité plus que l'autre et qui mérite le titre de « militant » Sihem Ben Sedrine ou Abir Moussi ? Moncef Marzouki ou Nabil Karoui ? Noureddine Bhiri ou Sami El Fehri ? La question, aussi provocatrice soit-elle, n'est pas aussi farfelue et la réponse n'est pas aussi évidente qu'il n'y parait. Analyse du « militantisme » des uns et des autres et la manipulation médiatique au profit des uns et contre les autres.

Moncef Marzouki, Sihem Ben Sedrine, Ali Laârayedh, Hamadi Jebali et quelques dizaines d'autres sont présentés à l'opinion publique comme étant de véritables militants contre la dictature de Ben Ali. Depuis la révolution, la majorité de ce beau monde s'est fait payer son militantisme avec des dédommagements financiers ou moraux, directs ou indirects. Ceux qui n'ont rien touché encore attendent leur tour avec des certificats en bonne et due forme. Moncef Marzouki est passé par la case « présidence de la République », Sihem Ben Sedrine par la case «présidence de l'Instance vérité et dignité », la majorité des grands dirigeants d'Ennahdha par la case « gouvernement ». En matière de dédommagements, c'est une évidence, les « militants » ont été bien dédommagés depuis 2011.
Qu'ont fait tous ces gens-là pour « mériter » ce titre honorifique souvent auto-attribué et/ou accordé par les médias, les ONG et plusieurs laudateurs intéressés ? La réponse officielle est qu'ils ont milité contre la dictature. Cela consiste en quoi ? La palette est large, cela va de la simple participation à quelques conférences et la rédaction de quelques communiqués à des peines de prison et d'isolement se comptant jusqu'à 15 ans d'incarcération. Si pour des personnes comme Ben Sedrine et Marzouki, la cause défendue a toujours été liée aux libertés et aux droits humains, il n'en est pas de même pour les islamistes (tous « militants » confondus) qui ne militaient que pour l'instauration d'un Etat islamique gouverné par la chariâa et divers textes religieux.

En 2011, avec la révolution, et pour pouvoir recueillir au mieux les fruits de leur militantisme, tout ce beau monde a joué à fond la victimisation. Histoires de répression, de torture, de viol, d'incarcération ont fait florès et ça continue encore, neuf ans après. S'il est indéniable et indécent d'omettre qu'une partie de ces gens là a bel et bien payé le prix fort, il n'en demeure pas moins qu'une autre partie n'a fait que profiter de la révolution pour rejoindre sur le tard le grand cortège des révolutionnaires réprimés. On parle ici de ceux qui étaient du côté de l'Etat répressif et qui ont retourné leur veste, des mercenaires qui se faisaient payer leur « militantisme », des véritables fausses victimes…
Des exemples ? Moncef Marzouki crie sur tous les toits qu'il a fait de la prison, alors qu'il a été parmi ceux qui encourageaient à voter Ben Ali en 1989. Ce qu'il a réellement enduré sous la présidence de son prédécesseur ? Quelques jours de garde à vue, sans aucune torture, sans aucune violence physique, mais ces quelques jours l'ont poussé à jeter l'éponge et à rejoindre son épouse française à Paris, laissant les Tunisiens seuls face à leur dictateur.
Sihem Ben Sedrine ? Moins de six mois de prison. L'ancien régime l'accusait de mercenariat ce qui peut être considéré comme vrai vu qu'elle a avoué elle-même recevoir de l'argent européen. C'est d'ailleurs avec cet argent européen qu'elle a pu vivre tranquillement en Europe et lancer sa radio Kalima.
Noureddine Bhiri, Salim Ben Hamidane, Mehrezia Laâbidi (la fameuse Française d'origine tunisienne), Sihem Badi, Mustapha Ben Jaâfar et des dizaines d'autres grandes figures du militantisme qu'on voit aujourd'hui n'ont jamais fait un jour de prison. Jamais, pas un jour !
Les autres ? Ils étaient accusés de terrorisme et de complot contre l'Etat, ce qui explique (et ne justifie pas) les séances de torture et les années d'isolement qu'ils ont subi.

Si pour ces faits historiques, l'adjectif de « militant » devient justifié, il devrait en être de même pour ceux qui ont lutté contre le régime de la troïka et des islamistes après la révolution. En poussant cet argumentaire plus loin, on se demanderait pourquoi un ancien terroriste devient militant et non un ancien fraudeur ?
Après la révolution et la fameuse amnistie, on a décidé que les terroristes sont devenus victimes de manipulations judiciaires grotesques. Il devrait donc en être de même pour Nabil Karoui ou Sami El Fehri qu'on accuse partout d'être mafieux et voleurs. Eux aussi, et ceci est une évidence, subissent un acharnement et une manipulation judiciaire !
Après la révolution, on aurait dû restreindre « le militantisme » à ceux qui l'ont réellement fait à des fins patriotiques et sans rien réclamer en retour et qui n'en ont récolté ni récompenses ni pouvoir. On pourra en citer Ahmed Brahim et Maya Jribi – paix à leurs âmes – mais aussi Ahmed Néjib Chebbi. Aucun des trois n'a volé le titre de militant et leur militantisme ne fait pas débat. Seulement, deux d'entre eux ne sont plus de ce monde aujourd'hui et le troisième a disparu de la scène politique.

En suivant le même raisonnement, dans les faits, et les faits sont têtus, la période de détention de Nabil Karoui a dépassé de loin celle de Moncef Marzouki. Celle de Sami El Fehri (considéré comme voleur) a dépassé de loin celle de Sihem Ben Sedrine (considérée comme mercenaire). Les actions militantes de l'avocat Noureddine Bhiri avant la révolution sont de loin inférieures à celles de sa consœur Abir Moussi après la révolution. Les violences verbales et morales subies par cette dernière sont de loin supérieures à celles subies par Samia Abbou.
Samia Abbou a milité contre la répression politique de Ben Ali, Abir Moussi milite contre la dictature religieuse qui se met en place.
La cabale judiciaire subie par les islamistes non terroristes n'était pas moindre que celle subie aujourd'hui par Sami El Fehri et Nabil Karoui. La cour de cassation a carrément considéré que ce qu'a subi M. Karoui est assimilable à un déni de justice. Il est bon de rappeler que cette cabale judiciaire s'est lancée avec la popularité grandissante du patron de la première chaîne de télévision en Tunisie en même temps candidat à la présidentielle.
L'acharnement judiciaire contre Sami El Fehri est identique à celui subi par plusieurs « militants » d'hier. Il est bon de rappeler à ce titre que le patron de la deuxième plus grande chaîne de Tunisie a été incarcéré (la première fois) quelques mois après le lancement de sa chaîne et le succès de plusieurs de ses émissions. Il est bon aussi de rappeler que son incarcération (la deuxième fois) s'est faite quelques jours après l'annonce d'un reportage sur le financement illicite et frauduleux d'Ennahdha. Il est enfin de bon de rappeler que le juge d'instruction chargé de son affaire n'a jamais émis de mandat de dépôt à son encontre. Tout comme le juge chargé de l'affaire de Nabil Karoui. On rappelle, à ce titre, que l'incarcération de Sami El Fehri survient après un appel du parquet (théoriquement dépendant du ministre de la Justice) violant ainsi un principe universel de justice consistant à ce que l'incarcération soit l'exception et non la règle. Pourquoi donc chercher à mettre sous les verrous quelqu'un alors que le juge chargé de son dossier a estimé qu'il n'y a pas de raison pour cela et que le prévenu n'est pas considéré comme dangereux ou susceptible de s'évader ? Ici aussi, comme pour Nabil Karoui, on frise le déni de justice.
Dans un cas comme dans l'autre, tout comme le cas de Abir Moussi violemment agressée verbalement au sein même de l'ARP, l'adjectif « militantisme » sied à merveille si l'on applique la définition à la lettre après avoir pris de la distance.

Neuf ans après la révolution, le constat est que l'on n'a rien retenu de nos erreurs du passé. On ne retient même pas les leçons que l'on observe chez nos voisins algériens où l'on voit que plusieurs ministres (dont deux Premiers ministres) sont actuellement sous les verrous.
Neuf ans après la révolution, nos gouvernants actuels (essentiellement islamistes) utilisent l'arme judiciaire pour attaquer leurs adversaires politiques et les médias qui les dérangent. Aucune différence par rapport à ce qui s'observait sous Ben Ali. Même que Ben Ali a été plus clément à partir des années 2002-2003 avec la remise en liberté de l'écrasante majorité des islamistes à qui il a remis leurs passeports. Janvier 2011, par exemple, Samir Dilou a pu fuir à l'étranger quand il a constaté que la situation empirait. Mehrezia Laâbidi achetait et vendait librement des terrains. Mohamed Abbou pouvait louer son foyer au ministère de l'Enseignement supérieur sans problème !
On accuse Ben Ali et son régime d'avoir été des mafieux, d'avoir utilisé l'Etat pour s'enrichir et d'avoir volé le petit peuple. Soit. Mais les islamistes qui nous gouvernent aujourd'hui ne se sont-ils pas enrichis ? Le rythme de vie de certains parmi eux frise parfois l'indécence. Sihem Ben Sedrine n'est-elle pas accusée d'avoir violé les droits de ses journalistes à Kalima et ceux de ses collègues (élus comme elle) l'IVD ? Ce n'est pas elle qui a organisé une conférence de presse pour exiger un passeport diplomatique que ses collègues de cette même IVD n'ont pas ?
Les nouveaux députés Rached Khiari, Maher Zid et Yassine Ayari ne trainent-ils pas des affaires en justice ? L'élu Seïf Eddine Makhlouf n'a-t-il pas un redressement fiscal de 260 mille dinars et n'a-t-il pas été condamné à 20 mois de prison pour s'être attaqué à un procureur ? Ce n'est pas tout ce beau monde qui s'est présenté aux législatives pour bénéficier de l'immunité judiciaire ?

La situation politique dans le pays est fort tendue et tout indique que les choses vont empirer. A l'origine tous ces problèmes, une crise économique qui perdure (bien avant la révolution) à cause d'un système politique inefficace. Le système parlementaire créé de toutes pièces après la révolution n'a pas résolu le problème. La réforme de ce système, la modification de textes de la constitution voire sa révision toute entière est de plus en plus nécessaire. Le président de la République lui-même a envie de cela et il en a parlé longuement durant sa campagne électorale. La constitution est d'ailleurs truffée de textes contradictoires et inégalitaires. Et nos lois, que les gouvernants actuels refusent de changer pour des considérations religieuses, sont contraires à la constitution. Ainsi le cas de la question de l'égalité de l'héritage par exemple. L'aberration constitutionnelle qui permet à un citoyen étranger d'origine tunisienne de devenir président de la République et interdit en même temps un Tunisien de souche de le devenir, juste parce qu'il est athée, agnostique, chrétien ou juif est une autre mesure contraire aux principes mêmes de cette même constitution qui considère les Tunisiens comme égaux et interdit tout type de discrimination basée sur la croyance.
Tout cela devrait mener vers un référendum et une révision constitutionnelle aboutissant à la naissance de la IIIème République. L'échec total de la classe politique actuelle, et à sa tête les islamistes d'Ennahdha qui ont été présents à tous les gouvernements depuis 2011, devrait mener à une révolte populaire inévitable au vu de la crise économique aigüe et appelée à s'accentuer davantage.

C'est là où des gens qui ont subi les injustices et les violences de cette injustice subie depuis 2011 vont émerger sur le devant pour s'imposer en évoquant une légitimité militante indéniable. Ils s'appellent, entre autres, Abir Moussi, Nabil Karoui et Sami El Fehri. Et s'ils vont prétendre demain à ces titres, c'est uniquement « grâce » à cette classe politique aveugle, ces juges aux ordres et ces médias complices par leur silence. Et même chacun de ces « nouveaux militants » l'aura été en courant derrière le pouvoir, leur légitimité sera d'autant plus méritée que la période de « répression » de Ben Ali est déjà inférieure à celle subie sous nos dirigeants actuels.


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