Le vendredi 15 février 2013, à 10h13mn le magazine français de centre-gauche met en ligne une longue interview accordée à Martine Gozlan par Abdelfattah Mourou, vice-président du mouvement Ennahdha. A l'heure où nous mettons en ligne, cheikh Mourou n'a nullement démenti le fait. Le devrait-il ? La teneur de cette entrevue est assez sérieuse pour susciter nombre de réactions autant des disciples de cheikh Mourou que des représentants des autres partis politiques. Sous le titre accrocheur « le vice-président d'Ennahdha accuse son président », l'interview rapporte des propos de M. Mourou selon lesquels « Rached Ghannouchi doit quitter Ennahdha ! » accusant le président « de mener, par son extrémisme, le parti et le pays au désastre ». Après avoir esquissé, à la demande de la journaliste, son parcours politique et rappelé qu'il était le fondateur du parti islamiste, bien avant Ghannouchi, a-t-il soutenu, M. Mourou a indiqué qu'il avait « tenté de le tirer vers la modernité ». M. Mourou a dit que « pour guider les gens, il faut s'en faire aimer et connaître leurs besoins ». A ce propos, il a déclaré que Ghannouchi avait peur des gens mais qu'il avait éludé sa question de savoir pourquoi les Tunisiens voulaient le chasser. M. Mourou, dans son interview, dit vouloir demander la convocation d'un congrès extraordinaire d'Ennahdha qui devrait étudier la possibilité d' « en changer la direction qui mène le parti et la Tunisie au désastre », expliquant sa demande par la tentation de Ghannouchi et de sa direction de « faire de notre parti une affaire familiale. Il accuse Ghannouchi de se laisser contrôler par des gens « qui ne s'ouvrent pas à la réalité et à la modernité » considérant que cela est une véritable catastrophe. M. Mourou dénonce également les propos de l'ultra conservateur Habib Ellouze appelant les « laïcs tunisiens à dégager. » Concernant l'initiative de Jebali, M. Mourou dit en avoir eu le premier l'idée et qu'il l'a soufflée au premier ministre. Il réitère son appel à Ghannouchi de se retirer « pour que d'autres puissent instaurer la paix sociale en Tunisie » et déclare que « l'on n'a pas fait la Révolution pour donner les clés du pays aux salafistes et aux ultras de la gauche » Le vice-président d'Ennahdha dénonce, par ailleurs, le laxisme des autorités qui « a permis toutes les violences » qui ont émaillé la vie politique et sociale du pays. Plaidant pour un Islam ouvert, il fustige le mono culturalisme de Ghannouchi et de ses partisans qui s'oppose au multiculturalisme de la Tunisie. M. Mourou prédit que « Ennahdha » quittera le pouvoir dans quelques mois et que « sa place naturelle est dans l'opposition dans laquelle elle restera pendant 20 ans. M. Mourou soutient l'idée qu'une nouvelle génération d'hommes politiques devra voir le jour qui apprenne « à concilier l'islamité et la modernité » annonçant que la clé demeure dans une alliance entre islam et démocratie et que des gens travaillent là-dessus. M. BELLAKHAL