Khadija Mohsen-Finan, chercheure associée à l'IRIS (Institut de relations Internationales et Stratégiques) a analysé la dernière visite de François Hollande en Tunisie. Elle fait remarquer que la France a révisé son appréciation du pays et après que son président a qualifié le printemps arabe de « porteur de risques», il considère, aujourd'hui que la Tunisie est plutôt porteuse d'espoirs, qu'elle est un véritable laboratoire et que la transition démocratique du pays mérite d'être accompagnée. La France se rend compte, aujourd'hui, que malgré des difficultés, la transition s'opère progressivement et qu'elle est réelle, fondée sur un compromis entre les différentes forces politiques. Elle se doit donc de la saluer et de l'accompagner. Evoquant la non-rencontre de Hollande avec Ghannouchi, la chercheure a indiqué qu'elle ne pouvait se faire au même titre que les trois présidents, une distinction normale et appréciée, dit-elle, après les nombreuses confusions sur les représentants du parti islamique. Pour ce qui est des équilibres politiques en Tunisie, la chercheure a relevé le très important maillage mis en place sur l'ensemble du territoire par Ennahdha, en prévision des prochaines élections et que le regroupement des partis de l'opposition permet de distinguer un schéma particulier où les islamistes possèdent le nombre et les « libéraux » l'influence. De ce conflit doit naître une coexistence politique, fait-elle remarquer. Sur le plan de la liberté d'expression, l'auteure considère que les Droits de l'Homme continuent à être bafoués. C'est, analyse-t-elle, parce que la Justice n'a pas été réformée. Cette institution, pourtant essentielle pour assurer le bon fonctionnement de la démocratie, est restée inféodée au pouvoir. Les dérives envers les journalistes et certains activistes sont nombreuses, relève-t-elle, et tout en appelant la société civile à la vigilance, elle souligne qu'il est du rôle de la France d'accompagner la société civile dans cette vigilance, car la justice et l'exécutif semblent éprouver des difficultés à agir devant ces cas de violation des droits humains, conclut la chercheure.