L'interrogation préoccupe, effectivement, les générations présentes, mais, fait penser également, aux générations futures. Selon des études internationales dont la dernière en date présentée, le 17 juin dernier lors d'un colloque international tenu à Hammamet sur le thème « Energies, changements climatiques et développement durable », la Tunisie fait partie des pays les plus menacées d'une pénurie d'eau dans les deux décennies à venir. Le fléau est, pour ainsi dire, sans doute crucial qu'il ne cesse d'interpeller l'ensemble de la communauté nationale. Il faut reconnaître que la Tunisie a, depuis toujours, accordé un intérêt tout particulier à la question de l'eau. Et la gestion des ressources hydriques du pays connaît, depuis des années et des années déjà, une évolution remarquable. Toutefois, malgré cette évolution encourageante, il est nécessaire de mettre en place de nouvelles approches et d'approfondir encore plus nos programmes de gestion et d'économie d'eau. La Tunisie risque un déficit hydrique dans les années à venir. Et ce, en raison de la faiblesse de ses ressources en eau vu la modestie de sa pluviométrie. En outre, selon une étude réalisée par la direction générale des ressources en eau, l'infrastructure hydraulique du pays est constituée de 29 grands barrages, 223 barrages collinaires, 812 lacs collinaires, 9.500 puits de surface équipés et 5.000 forages exploités. Elle mobilise, ainsi, 88% des ressources en eau mobilisables. Pourtant, le potentiel hydrique tunisien est qualifié de fragile et doté d'une faiblesse de plus en plus préoccupante. Autrement dit, si on adopte la langue des chiffres, la dernière évaluation de nos ressources montre clairement que 4.503 millions de m3 dont 2.700 sont des eaux de surface et 1.803 sont des eaux souterraines. Des ressources que l'on qualifie de pratiquement faibles en comparaison avec celles des pays voisins. A l'origine, la taille modeste des bassins hydrologiques du pays et sa pluviométrie limitée avoisinant les 36 milliards de m3 par an. Une quantité pluviométrique multipliée par quatre durant les années bonnes, néanmoins, divisée par le même chiffre durant les années sèches. Autre fait marquant, la disparité des précipitations, donc, du potentiel hydrique entre les différentes régions du pays. Cela veut dire, également, que les ressources en eau sont souvent localisées dans les zones à faible demande en eau, à savoir le Nord-Ouest de la Tunisie, alors que les régions de développement à forte demande, dont le Grand- Tunis, le Cap Bon et le Sahel affichent un manque. D'où l'utilité de soutenir les interconnexions et les transferts d'eau, des actions très coûteuses, et qui nécessitent donc des investissements lourds. Question de rationalisation Consciente de l'ampleur de l'enjeu de l'eau dans le progrès et le développement durable, la Tunisie a très tôt procédé à la mise en place de certaines réformes allant de pair avec sa politique de gestion des ressources hydriques. Autrefois, la Tunisie s'est fixé pour objectif prioritaire une bonne maîtrise de l'offre et une meilleure expansion des services avec la mise en place de certains programmes d'investissement englobant réseaux de barrages, services d'approvisionnement en eau et d'assainissement et réseaux d'irrigation, tout en conseillant aux usagers une exploitation intensive des nappes. Trois plans directeurs relatifs au Nord, au Centre et au Sud ont été, ainsi, établis au cours des années 70 dans le but de réaliser des ouvrages de mobilisation et de transfert d'eau. Sans pour autant manquer de valoriser l'utilisation des eaux souterraines. Puis, on a assisté au lancement de la première stratégie nationale de mobilisation des ressources en eau qui s'est étalée de 1990 à 2000 et qui a prévu la mobilisation de 85% du potentiel des ressources en eau avec la réalisation de forages de reconnaissance et d'exploitation et de piézomètres de contrôle et de suivi, l'amélioration et le développement des réseaux de mesure et de contrôle des ressources en eau et la création d'autres barrages et lacs collinaires. Autant d'efforts ambitieux. Toutefois, face aux nouvelles exigences, il est nécessaire d'aller encore plus loin. D'où le lancement d'une troisième phase régie par une nouvelle stratégie traitant à la fois quantité et qualité de l'eau pour aboutir à une promotion de la gestion de la demande en procédant à la réforme des tarifs, à l'instauration d'un partenariat public - privé efficace, ainsi qu'au renforcement de la mise en application des réglementations sur la protection de l'environnement. Ces développements ont, par la suite, débouché sur l'instauration d'une nouvelle approche consistant à passer graduellement d'une gestion de l'offre à une stratégie de gestion de la demande. Cette nouvelle approche a cherché à rationaliser le comportement des usagers de manière à adapter la demande au potentiel des ressources. Pour conforter encore plus ces différentes approches, les dernières années ont été marquées par le lancement de multiples et importants programmes nationaux avec le souci prioritaire d'instaurer une stratégie d'économie d'eau fiable, efficace et durable. D'ailleurs, grâce à une vision toujours prospective, les autorités compétentes ont eu le mérite de concevoir une stratégie nationale à moyen et long termes (2030 et 2050) ayant pour objectif d'atteindre un taux d'économie d'eau de l'ordre de 30%. Une ambition tout à fait légitime et réalisable à condition d'y croire!