Après quelques semaines de la Révolution du 14 janvier, des avocats ont élaboré un projet de loi ayant pour objectif de limiter ou même de négliger le champ d'intervention des comptables, des experts comptables, des conseillers fiscaux et des huissiers notaires. La Compagnie des Comptables de Tunisie a dénoncé ce projet de loi. Elle a organisé, le 19 mars 2011, une manifestation de protestation devant le ministère de la Justice et des Droits de l'homme. Pour avoir plus de détails, Investir en Tunisie a contacté M. Nassir Hbaili, Comptable et Commissaire aux comptes. 1/ Présentez-nous l'origine des contestations et des revendications ? Les avocats défendent leurs champs d'action et veulent réglementer leur périmètre d'intervention. Pour y faire, ils ont élaboré un projet de loi qui a été dénoncé par nous- même, en tant que Compagnie des Comptables de Tunisie. Pour nous, il est strictement inacceptable d'ignorer nos droits, de favoriser le monopole des avocats qualifiés sous prétexte de protéger la Révolution. Ces derniers ont profité des activités récentes afin de nous priver de nos missions reconnus depuis des années, intégrant les avocats chômeurs au marché de l'emploi. Ces avocats demeurent et restent symbole de la justice et de la liberté. Mais la question qui se posait est la suivante : Comment peut-t-on défendre la justice et la liberté, et d'un autre côté violer les droits d'autres ? D'ailleurs, Il est plus légitime qu'au lieu de nous attaquer, d'imposer leur loi et se soucier des nos intérêts marginalisés, ils pouvaient avoir recours à une révision de la législation tunisienne et négocier les propositions qui figurent dans ce projet de loi avec tous les acteurs concernés. A noter que nos missions sont complémentaires depuis toujours… Les avocats jouent un rôle important dans tous nos domaines d'intervention. En revanche, ce projet de loi ancre le monopole des avocats et marginalise notre rôle. Ce qui est inadmissible ! 2/ Vous avez considéré le deuxième article de ce projet de loi comme étant le point le plus contesté… «L'avocat est le seul à représenter juridiquement les différentes parties, quel que soit leur statut juridique : des personnes physiques ou morales, à les assister en matière de conseil, à accomplir toutes les procédures administratives et à défendre leur cause auprès des tribunaux et toutes les instances juridiques et administratives et disciplinaires, et auprès de la police judiciaire » ; ce deuxième article du projet de loi accorde aux avocats SEULS des missions pratiquées depuis des décennies par les comptables puisque ces derniers ont toujours servi leurs clients à travers l'étude de rentabilité, l'étude de faisabilité, l'assistance, les impôts, les charges de la CNSS... Nous sommes la vitrine des investissements et des opportunités d'affaires. Autrement dit, nous sommes la vitrine d'une grande partie de l'économie tunisienne. De ce fait, c'est illégitime de nous écarter et que l'avocat aura désormais le monopole pour des services toujours accomplis par les comptables, qui sont de l'ordre de 1900, y compris quelques 200 commissaires aux comptes. 3/ Quelle sera la prochaine étape selon vous ? Après la manifestation de 19 mars et le communiquée rendu public le jour- même, M.Faycel Ben Ayed, Vice-président de la Compagnie des Comptables de Tunisie a été accueilli par M. Mohamed El Askri, chargé de mission auprès du ministre de la Justice et des Droits de l'homme pour discuter les lacunes de ce projet de loi qui risque de menacer notre profession et nos intérêts. Un intérêt particulier a été accordé, lors de cette rencontre, aux revendications, notamment concernant l'article 2 de ce projet de loi qui sanctionne strictement nos droits et à l'intégration des représentants de tous les métiers qui peuvent être affectés par ce projet. Actuellement, nous sommes encore en mode de veille en attendant les décisions du ministère de la Justice et des Droits de l'homme. En parallèle, Nous tiendrons, le 30 avril 2011, une réunion dont l'ordre de jour sera axé sur ce problème. Une politique et une stratégie d'avenir émergeront de cette rencontre. Propos recueillis par I.Zine