En 1984, l'entraîneur n'avait pas hésité à écarter pas moins de sept cadres de l'équipe... L'état dans lequel se trouve l'équipe senior de football n'autorise aucune attente ni tergiversation. Le moment est venu où il va falloir trancher dans le vif. Tout un chacun des dirigeants devra comprendre que l'équipe va de mal en pis. Sa chute vers le bas est déjà là et il n'y a aucun remède pour stopper le mal que d'avoir de l'audace avec une bonne dose de bon sens pour revoir toute la copie et remettre en cause la politique suivie jusqu'ici. Les recrutements effectués ne vont pas changer le cours des événements. L'entraîneur engagé récemment et sans juger de sa valeur ne pourra rien faire pour redresser la barre. Sa déclaration à la presse après la défaite de samedi dernier en dit beaucoup sur l'état d'esprit qui l'anime. Après avoir déclaré qu'il était déçu suite au match face à l'Etoile, il a réalisé deux semaines après que, parmi l'effectif dont il dispose, beaucoup de joueurs n'ont pas leur place au sein d'un club comme l'Espérance. Sur ce point, on est parfaitement d'accord avec lui, il a vu juste, même si ce constat a été déjà fait par d'autres avant lui, mais on n'en avait jamais tenu compte. Anigo a peut-être eu tort de ne pas procéder à une telle évaluation avant qu'il ne soit un peu tard. Mais mieux vaut tard que jamais d'autant que des circonstances atténuantes peuvent lui être concédées, sa venue à la tête de l'équipe était tardive et dès son arrivée, il s'est retrouvé avec une épreuve sur les bras. Il n'a pas eu le temps de connaître ses protégés. Et il a peut-être surestimé leur valeur, croyant avoir affaire à des professionnels dignes de ce qualificatif, d'autant plus qu'ils appartiennent à un club à la renommée continentale. Il s'était sans doute trompé sur leur compte, ce qui l'a contraint après cette troisième sortie, où la défaite était encore au rendez-vous, d'émettre son verdict. Une sentence sans appel et dont les dirigeants doivent tenir compte. Le président du club auquel revient le dernier mot devra ainsi trancher en donnant raison à son entraîneur et par là carte blanche pour entamer l'opération reconstitution de l'équipe ou continuer de faire confiance à ceux qui sont à l'origine de cette situation en lui faisant miroiter un hypothétique sursaut dans un proche avenir. Le président doit trancher L'EST avait certes connu au cours de son histoire des moments difficiles, notamment au milieu des années 1960, mais aussi au début des années 1970 après l'injustice de la saison 70/71. Cela fait certes partie de l'histoire, mais il est toujours utile de le rappeler pour dire que l'EST a toujours su se relever pour défendre son statut, grâce il est vrai à cette capacité de se remettre en question quand la nécessité se fait sentir et que l'intérêt du club l'exige. Les années 1980 étaient sans conteste celles des «sang et Or». Et ce n'était pas un hasard s'ils avaient dominé la compétition, surtout au cours de la seconde moitié de cette période, après avoir remporté une coupe en 1980 et un championnat en 1982. La saison 83/84 était déterminante pour l'équipe. Entraînée par M'rad Mahjoub, l'EST qui disposait du meilleur effectif de la place n'arrivait pas à s‘imposer et se laissait souvent prendre sans que l'on trouve une explication plausible à cela. Mais le ver était sans doute dans le fruit. Et l'on sentait que c'est du côté des joueurs que cela ne marchait pas. Leur manque de sérieux sur le terrain et leur indiscipline dans le jeu étaient les principales causes des mauvais résultats. M'rad Mahjoub, qui était à ses débuts en tant qu'entraîneur d'une équipe de division nationale, en dépit de toute sa bonne volonté, a échoué dans sa mission d'instaurer la discipline dans un effectif truffé de vedettes. Cela ne pouvait durer davantage et il fallait trancher. M'rad Mahjoub fut remercié et remplacé par Roger Lemerre. Ce dernier, précédé par son sens de la rigueur et son intransigeance en matière de discipline, n'a pas mis longtemps pour identifier le mal. Ayant carte blanche et l'aval des dirigeants il n'a pas hésité à écarter définitivement pas moins de sept éléments. Tous ou presque des cadres. Et c'est ainsi qu'il avait donné leur chance à des jeunes qui piaffaient d'impatience pour endosser le maillot «sang et or». Avec ses jeunes (S. Khémir, B. Jridi. A Latrech, N. Maâloul et nous en oublions), il est parvenu à mettre sur pied un groupe hautement performant. A preuve, quand Amarildo a débarqué, il n'a pas eu la moindre difficulté pour imposer son équipe et remporter dès sa première saison le titre de champion. Lemerre avait laissé à son successeur un fichier complet de tous les joueurs, leurs qualités physiques, leurs capacités techniques, leurs défaut, etc. Ainsi avait travaillé le Français auquel on aurait dû faire appel avant de chercher midi à quatorze heures en voulant engager un technicien qui n'a jamais tenu parole dans toute sa carrière. Cela dit, le travail effectué par Lemerre était à l'origine de l'envolée de l'EST et de sa domination du football national pendant trois décennies au cours desquelles, entre coupe et championnat, elle remporte 28 titres. Sur le plan régional et continental elle en a raflé dix autres. Ce palmarès est loin d'être le fait du hasard, ou d'un coup de chance. Loin s'en faut, car le point de départ était l'instauration de la discipline au sein du groupe, initiée par Lemerre et ancrée ensuite par tous ceux qui lui ont succédé, appuyés en cela par des dirigeants qui avaient de leur côté apporté leur touche en favorisant cette dynamique de la gagne et cet esprit combatif qui avaient fait la différence par rapport aux autres. Aujourd'hui, l'EST a besoin d'un second Lemerre et de la trempe des dirigeants qui l'avaient soutenu pour sortir de l'état dans lequel elle se trouve. A méditer!.