On est de plus en plus convaincu que la sélection est désormais inaccessible à certains joueurs et que beaucoup n'y ont plus leur place... Faut-il s'habituer à répéter que l'avenir de l'équipe de Tunisie est fait de jeunesse. Le match d'avant-hier contre la Mauritanie pour le compte des éliminatoires de la Coupe du monde 2018 est le genre de repère qui laisse forcément des souvenirs et qui donne l'envie réelle de respirer l'air du foot. L'air du sport, seulement pour quarante-cinq minutes, le temps que Kasperczak et ses joueurs comprennent que l'avenir de l'équipe, leur avenir, est fait de jeu et d'attaque. Nous espérons que le sélectionneur sera finalement conscient du potentiel dont il dispose et qui se traduit par une comptabilité assez parlante. Les résultats ont tendance à effacer les choix les plus inadéquats, les choix les plus incompréhensibles. Si l'on ne doit retenir qu'une seule chose du match contre la Mauritanie, ça sera la réaction dans le jeu et dans le comportement de l'équipe et qui était essentiellement provoquée par la rentrée de certains joueurs, à l'instar de Moncer. Elle apporte que l'enjeu n'est jamais l'ennemi du spectacle. Il y a de ces joueurs qui poussent la démonstration jusqu'à la perfection. La nouvelle génération qui a besoin aujourd'hui qu'on lui fasse confiance a réussi à accréditer l'idée selon laquelle la sélection doit être le rassemblement de joueurs les plus costauds, avec notamment une expression à base de talents individuels additionnés. Dans ce domaine, certains joueurs que le sélectionneur a tendance à oublier ont bien du savoir-faire. Ils remettent ainsi la vocation et les prérogatives de l'équipe au centre des débats, prouvant qu'ils peuvent justement avoir une part capitale dans ce qui pourrait se réaliser et surtout dans ce qui est aujourd'hui exigé. Il s'agit en effet de joueurs qui progressent, qui ont connu récemment de belles choses et qui ont envie d'en connaître d'autres, même si un nouveau cycle s'ouvre à présent. On sent que l'effort compte beaucoup ici et plus qu'ailleurs. Ils mesurent aujourd'hui la chance qui leur est offerte. Ils la ressentent avant tout comme un privilège et une fierté. Il y en a même qui comprennent si bien l'essence du jeu et respirent si bien la cohérence dans son expression. Ils se situent si bien dans l'espace qu'il créent la complémentarité des gestes et des positions. Ils donnent ainsi au jeu une tout autre dimension. Le jeu pour le jeu, le jeu qui ne tue pas le jeu. Cette nouvelle génération a gagné du temps. Beaucoup d'épreuves l'ont rendue encore plus forte. Nous pensons qu'elle est capable de vivre quelque chose d'exceptionnel, même si elle n'a pas encore pris les choses en main. Il faut dire que l'image de la sélection dépend beaucoup de ce genre de métamorphose. On juge aux résultats. Mais aussi au jeu et à l'ambiance. Souvent à l'ambiance avant les résultats. La sélection est aujourd'hui appelée à avancer résolument dans le parcours que lui tracent ses jeunes joueurs. Elle devrait bousculer au besoin l'ordre établi, à la vitesse d'une équipe pressée de réussir. Cela témoigne de personnalités affirmées et d'un caractère bien trempé. Ceux qui se donnent le droit à un pareil rebondissement ont prouvé, depuis quelque temps, que leur qualité d'adaptation s'est fortement améliorée, qu'ils sont capables de surfer sur la vague des succès et qu'ils commencent à se rapprocher de la brigade d'exception qui fait la pluie et le beau temps. Un véritable plan de bataille En revanche, quand on regarde certains autres joueurs s'embrouiller et se débattre sur le terrain, il y a de quoi s'inquiéter sur l'avenir de la sélection. On est de plus en plus convaincu que l'équipe est désormais inaccessible à certains joueurs, que beaucoup n'y ont plus leur place. Surtout par rapport à ce qui est demandé dans la compétition de haut niveau. C'est une autre épreuve. Inaccessible aux joueurs ordinaires. A ce niveau d'exigence, ce n'est pas un autre football, mais c'est un autre monde. Depuis des années, ils ne cessent d'accumuler les défaillances et les déviances, sans qu'ils ne soient remis à leur place, et encore moins à leur vraie valeur. Certes, il n'est pas si simple de séparer le bon grain de l'ivraie. Mais quand on va droit au but et sans langue de bois, l'on n'hésitera pas à considérer les dernières périodes de l'équipe nationale et ses différents acteurs comme étant des années d'abaissement sportif, d'avilissement des résultats et d'un déchirement pathétique. A des années-lumière des méthodes qui avaient su définir une vraie identité de jeu et un collectif uni et solide, elle a longtemps avancé sans boussole, avec un groupe éparpillé et désemparé. Des années funestes pour le football tunisien, que l'on n'oubliera pas de sitôt et dont on voudrait, en même temps, ne plus jamais se souvenir. La victoire en déplacement contre la Mauritanie, bien qu'elle ne soit pas convaincante à tous les niveaux, devrait quand même servir à réhabiliter une équipe qui s'est longtemps égarée. Même si les interrogations sur l'avenir de la sélection restent encore sans réponses, il est aujourd'hui question d'un véritable plan de bataille destiné à rendre l'équipe plus performante. La présence de certains jeunes joueurs est plus que jamais souhaitée. Leur compétence encore davantage. Dans les différentes considérations individuelles ou collectives, personnelles ou publiques, il n'y a de place que pour le vrai football, les véritables projets sportifs. Dans un environnement où les repères, les jugements et les appréhensions ont pris une autre tournure, chacun avait essayé de trouver un style. Dans chaque équipe, on a pris l'habitude de trouver des joueurs réputés pour être de redoutables chambreurs. Leurs excès portaient souvent à conséquence puisqu'ils se contentaient de monnayer leur «talent» dans les médias avides de «bons mots», alors que sur le terrain ils manquaient lamentablement de discernement et de savoir-faire... A travers sa dernière victoire, la sélection se démarque un peu de ce qui a été conçu et réalisé auparavant. Il n'en demeure pas moins que beaucoup de choses restent à faire et un long travail attend toutes les différentes parties concernées de près ou de loin par les affaires de l'équipe. Cette nouvelle étape répond à l'impératif d'élaborer un plan de travail et une stratégie qui s'inscrivent dans la durée et qui tiennent compte des échéances futures. Des échéances dans lesquelles la sélection sera tenue par l'obligation de résultat. A court ou à long terme, elle aura toujours un statut à défendre. Une place à préserver. Ce ne sera certainement pas facile, mais le défi mérite d'être relevé.