Relations Tunisie-Cuba : un nouvel ambassadeur prend ses fonctions    Chrome booste le remplissage automatique : plus rapide et plus précis !    Tunisie : l'âge moyen du mariage atteint 34 ans pour les hommes et 29 ans pour les femmes    In mémorium - Hammadi Ben Saïd, un journaliste qui a honoré le métier    Kia célèbre ses 80 ans en dévoilant son concept Vision Meta Turismo    Roche Tunisie & Libye accueille un nouveau directeur général : Matthieu Galais    La photographie comme mémoire vivante: l'œil, le regard et la vérité    La résolution 2803 du Conseil de sécurité: Est-elle un prélude à une paix durable et juste à Gaza?    Un séisme de magnitude 5,8 frappe la Turquie    Ooredoo Tunisie collabore avec Oredata et Google Cloud : transformer l'engagement client via l'IA    Les prix des voitures baisseront-ils en Tunisie en 2026 ?    Vente des billets 2026 : la ruée mondiale continue    Trabesli : « On a montré notre vrai niveau contre le Qatar »    Aigles de Carthage : Affrontement décisif contre le Botswana avant la CAN 2025    Jendouba : affluence record de touristes algériens avant le Nouvel An    L'ambassade du Canada en Tunisie recrute dès maintenant    Météo en Tunisie : temps passagèrement nuageux sur l'ensemble du pays    Naissances hors mariage : près de 1 000 cas par an en Tunisie    La Douane tunisienne saisit 13 millions de comprimés de stupéfiants au cours de l'année    Tahar Bekri: Je voudrais t'aimer monde    Le palais Ahmed bey à la Marsa célèbre le nouveau livre de Mohamed-El Aziz Ben Achour : La médina (Album photos)    Hafida Ben Rejeb Latta chez les rotariens de Tunis, Carthage, la Marsa et Sousse (Album photos)    Match Tunisie vs Qatar : où regarder le match de Coupe Arabe Qatar 2025 du 07 décembre?    Au cœur des visages de Walid Zouari : une captivante humanité    L'ambassade des Etats-Unis en Tunisie reprend ses activités normales !    Entrée gratuite demain dans tous les sites historiques et musées : profitez-en !    LG présentera "Innovation en harmonie avec vous" au CES 2026    Slaheddine Belaïd: La Main rouge, au cœur de multiples assassinats en Tunisie à l'époque du colonialisme français    Météo en Tunisie : températures en baisse    JCC 2025, la Palestine au coeur des journées cinématographiques de Carthage : jury, hommages et engagements    nouvelair dévoile sa nouvelle offre tarifaire au départ et à destination de la Turquie    Match Tunisie vs Palestine : où regarder le match de Coupe Arabe Qatar 2025 du 04 décembre?    Patrimoine tunisien : le musée de Carthage retrouve les visiteurs    Tourisme en Tunisie : les Britanniques encore plus nombreux    Prix Abdelwaheb Ben Ayed de la Littérature 2025 : lauréats de la 5ème édition    La sélection tunisienne féminine de handball marque l'histoire : 1ère qualification au tour principal Mondial 2025    Article 69 : le garde-fou qui protège les caisses de l'Etat tunisien    Des élections au Comité olympique tunisien    Ciné-Musée 2025 : un programme culturel riche entre Sousse et Tozeur    La Poste Tunisienne émet des timbres-poste dédiés aux plantes de Tunisie    Décès de Nizar Cheikh Rouhou, président de la Chambre nationale des agents immobiliers    Samir Samaâli: Le ruban rouge, la stigmatisation et l'ombre des préjugés    Sonia Dahmani libre ! Le SNJT renouvèle sa demande de libération des journalistes Chadha Haj Mbarek, Mourad Zghidi et Bourhen Bssaies    Chine: L'Orient du développement, modèle d'avenir pour le Sud ?    Elyes Ghariani: L'Union européenne à l'épreuve des nouvelles dynamiques sécuritaires    Secousse tellurique en Tunisie enregistrée à Goubellat, gouvernorat de Béja    New York en alerte : décès de deux personnes suite à de fortes précipitations    Le CSS ramène un point du Bardo : Un énorme sentiment de gâchis    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Y a-t-il encore une classe moyenne tunisienne ?
Publié dans La Presse de Tunisie le 25 - 12 - 2015

L'endettement des ménages s'est accru à partir de 2011 de 261% et atteint 17.600 MD dont 60% sont destinés à la consommation
Envolée des prix, inflation, chômage, pertes d'emplois, endettement, appauvrissement, rien n'épargne la classe moyenne tunisienne. Cette frange, qui ne représente, désormais, que 67% de la population contre 80% auparavant, est la première à subir les ondes de choc des changements intervenus dans le pays. Enquête :
«Mes dépenses sont énormes et mon salaire ne dépasse pas les 500 dinars par mois », affirme Abderraouf, quinquagénaire qui faisait ses emplettes comme tous les dimanches au marché central de Tunis.
«Au point où en sont les choses, il devient de plus en plus difficile de subvenir à mes besoins d'autant que les prix des produits de consommation connaissent une hausse constante», affirme ce père de trois enfants.
Couffin à la main, Si Lahbib, retraité d'une entreprise publique, sillonnait lui, également, les rayons de ce marché.
«J'ai acheté deux kilos de viande bovine à 40 dinars, des fruits et des légumes à 15 dinars et des épices et autres ingrédients à plus de 10 dinars, note ce sexagénaire qui cherchait à s'approvisionner pour la semaine.
«Les prix sont exorbitants....J'arrive à peine à acheter le nécessaire», ajoute Si Lahbib désemparé.
Les difficultés que ressentent Si Lahbib et Abderraouf face à l'envolée des prix, ils les partagent avec plusieurs autres Tunisiens, dont la dégradation du pouvoir d'achat a commencé à se faire sentir, particulièrement, depuis le 14 janvier 2011 alors que l'amplification des disparités sociales et régionales comptait parmi les facteurs déclencheurs de la révolution.
Ainsi, durant les quatre dernières années, l'érosion du pouvoir d'achat du consommateur tunisien est estimée à 40% selon une enquête réalisée par l'Université de Tunis, soit une moyenne de 10% par an.
Cette dégradation s'explique, dans une large mesure, par la hausse de l'inflation réelle à 4,3%, d'après l'Institut national de la statistique (INS). Le président de l'Organisation de défense du consommateur (ODC), Slim Saâdallah, confirme : « il est devenu de plus en plus difficile de maîtriser la hausse des prix des produits de consommation après le 14 janvier 2011, période marquée par une nouvelle donne économique, sociale et sécuritaire».
La dérive sécuritaire, à l'origine de la hausse des prix
En raison des problèmes de sécurité qu'a connus le pays au lendemain du 14 janvier 2011, les petits agriculteurs (soit 80% de l'ensemble des agriculteurs) étaient obligés, de vendre leurs produits à l'intérieur de leurs fermes au lieu de se déplacer vers les marchés de gros, explique-t-il.
Certains intermédiaires (Gachara) ont profité de cette situation pour s'approvisionner auprès des agriculteurs à bas prix et pour vendre, par la suite, sur le marché à un prix plus élevé. Saâdallah évoque, également, la crise qui frappe encore de plein fouet les autres secteurs productifs et la montée du commerce parallèle qui représente 52% de l'économie nationale.
Cependant, le commerce parallèle, qui a contribué, activement, à l'accroissement de la consommation, a favorisé en même temps, la contrebande tirant vers le bas la croissance économique en Tunisie. Selon le responsable de l'ODC, l'arrivée en Tunisie en 2011, de 2 millions de Libyens, dont le mode de vie diffère, totalement, de celui des Tunisiens, n'est pas faite pour améliorer les choses. Elle a plutôt contribué à l'envolée des prix.
Face à cette situation, l'ODC, organisation dépourvue de ressources financières, s'est contentée d'appeler à travers les médias, les consommateurs tunisiens à boycotter l'achat de certains produits dont les prix enregistrent une hausse vertigineuse. Une première action a déjà ciblé les viandes rouges, dont les prix sont passés de 12 dinars avant la révolution à 17 dinars le kilo après.
D'après Saâdallah, environ 70% des consommateurs ont répondu, favorablement, à cet appel ce qui a permis de faire baisser le prix de la viande à 12,500 dinars le kilo, avant de reprendre de nouveau le chemin de la hausse.
Il a fait remarquer que le niveau des salaires n'a pas suivi l'augmentation des prix malgré les augmentations opérées. Les deux (hausses des prix et des salaires) ont plutôt favorisé l'inflation, en l'absence de croissance. A cet égard, le citoyen qui gardait chez lui une somme d'argent variant entre 300 et 500 dinars pour faire face à des dépenses imprévues, du coup ne pouvait plus le faire, selon le responsable. Afin de couvrir ses dépenses quotidiennes, il est même acculé à solliciter des avances sur salaire.
60% des salariés désargentés
Une étude de l'Observatoire de la défense du consommateur et du contribuable montre que 60% ou plus des salariés sont désargentés à partir du 8e jour du mois.
Le volume impressionnant des comptes courants débiteurs revenant aux ménages illustre l'ampleur du phénomène. Il est estimé à 8000 MD, soit le 1/3 de ce type de compte.
L'endettement des ménages, rien qu'auprès du système financier, s'est accru à partir de 2011, de 261,2% pour atteindre actuellement, 17 600 MD dont presque 60% destinés à la consommation.
L'économiste Mourad Hattab souligne l'apparition de nouveaux pauvres au sein de la classe moyenne largement composée des fonctionnaires. « Le phénomène est difficilement quantifiable, vu l'opacité des données statistiques» en Tunisie, affirme-t-il.
Ce constat est largement partagé par le directeur général de l'Institut National de la Consommation (INC), Tarek BelJazia qui évoque au début une démocratisation de la consommation en se référant à une étude sur les changements des modes de consommation réalisée à l'institut.
Il précise que la démocratisation de la consommation a été réalisée au bout d'une trentaine d'années (1985-2013), grâce, entre autres, à la modernisation du secteur du commerce (multiplication des grandes surfaces).
Toutefois, le changement de modes de consommation a été marqué parallèlement par « une dérive » au niveau des dépenses familiales avec l'émergence de consommateurs «Kamikazes » vivant au-dessus de leurs moyens.
Pour BelJazia, ces personnes sont victimes des «publicités attrayantes» , contrairement à la frange dite «raisonnable», qui gère ses dépenses en fonction de ses ressources financières.
Cela étant, la classe moyenne, fleuron de la société tunisienne et un des principaux facteurs de stabilité dans le pays, s'est réduite de 80 à 67% de la population au cours des quatre dernières années, selon l'enquête de l'INC. Quant à la pauvreté, elle est estimée, officiellement, à 21% de la population.
D'après Beljazia, «une frange de la classe moyenne a migré vers la couche la plus démunie et une autre fait partie désormais des plus nantis, lesquels sont qualifiés par plusieurs spécialistes de «riches de la révolution ».
Il explique, également, la fragmentation de la classe moyenne par, notamment, la multiplication des « accidents de la vie, tels que la perte d'emploi et la baisse des revenus. Le responsable évoque la recrudescence du chômage qui impose à plusieurs chefs de famille de prendre en charge toutes les dépenses de leurs enfants, y compris ceux en âge de travailler mais qui demeurent sans emplois.
Quant à Hattab, il assure que la dégradation du pouvoir d'achat constatée à partir de 2012, a concerné toutes les franges de la classe moyenne (classe moyenne supérieure, classe moyenne vacillante ou classe moyenne centrale).
Cette dégradation, due, selon lui, à des facteurs multiples, dont la perte du contrôle des prix et des circuits de distribution, la montée de la spéculation, les augmentations successives de salaires et l'explosion de l'informel, s'est également traduite par une inflation rampante à partir de 2013 de 5 à 6%, laquelle inflation a entraîné une baisse du dinar par rapport aux monnaies étrangères et des difficultés d'approvisionnement des agents économiques notamment les ménages.
L'inflation commence, dit-il, à prendre plusieurs formes, à savoir l'inflation par la demande, l'inflation spirale présalaire (augmentation, successives des prix et des salaires) et l'inflation comme phénomène monétaire, imputée à la disparition d'une partie de la masse monétaire annuellement et périodiquement dans le secteur informel, au point que les besoins en liquidité quotidienne des établissements de crédit varient entre 5 et 6 milliards de dinars quotidiennement. Selon l'expert, les dégâts ne s'arrêtent pas là, d'autant que le taux d'épargne nationale, rapporté au revenu disponible brut, a baissé de 6% pour se situer à 13% seulement à la fin 2014. Alors qu'en ce moment, le pays à plus que jamais besoin de mobiliser ses ressources financières nationales pour limiter un tant soit peu l'endettement et relancer la croissance.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.