«Comment trouver quelqu'un comme toi Ali ?», une pièce autobiographique mise en scène par la libanaise Lina Abyad, écrite et interprétée par la palestinienne Raeda Taha, présentée vendredi et samedi derniers sur la scène d'El Teatro. Poussée par la forte volonté de s'exprimer, de dévoiler certaines vérités de son existence, de celles de son père, de sa famille et de tout un peuple, Raeda Taha défonce le mur du silence avec tendresse, amertume, mais aussi vie et humour, et donne sa propre vision du combat pour la cause palestinienne, l'image sociale du «Martyr» et sa répercussion sur sa famille. Au cœur d'une scénographie modeste mais joliment éclairée, Raeda Taha apparaît sur scène. Elle s'assoit sur un canapé et se confie aussitôt au public. Elle raconte son calvaire avec un homme qui a voulu abuser d'elle alors qu'elle travaillait avec le leader Yasser Arafat, également, son protecteur depuis la mort de son père. Elle est la fille du «combattant Tahar», tombé en martyr lors de sa participation en mai 1972 à la prise d'assaut d'un vol Bruxelles-Al Qods occupée. Elle nous raconte comment elle, sa mère et ses deux petites sœurs ont vécu le drame. Elle use d'une extrême sobriété pour donner à entendre un témoignage, une histoire dans l'Histoire, le vécu d'une jeune veuve après avoir perdu son mari, la lutte d'une sœur pour récupérer le corps de son frère et l'enterrer dignement, le vide qu'a laissé un père bienveillant dans la vie de ses trois filles. Un récit incroyablement riche, abordant quantité de sujets transversaux aux principaux, nous dressant un portrait peu connu de la société palestinienne. En dépit du sujet, la pièce n'est jamais tire-larmes. En effet, les répliques et les mimiques de la comédienne, qui se met dans la peau de plusieurs personnages qui ont marqué son enfance, prêtent souvent à sourire. Des chansons arabes classiques, des voix issues d'archives de l'époque, des photos et des vidéos projetées sur l'écran de la scène épousent le récit du protagoniste. Une pièce pleine d'humanité, traitant du devoir de mémoire et de transmission, évoquant la vie, l'amour, au milieu de l'horreur de la guerre à travers une interprétation nourrie en profondeur, dont la sincérité et la vérité nous atteignent en plein cœur. Une belle création, subtile et intelligente ...Le public a longuement applaudi.