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Congrès mondial des écrivains de langue française: L'avenir du français est dans une littérature-monde
Publié dans La Presse de Tunisie le 27 - 09 - 2021

Pendant deux jours, la Cité de la culture a résonné des musiques, accents et goût de voyage de près de 26 écrivains de langue française, venus des cinq continents. Une vraie symphonie des imaginaires.
Leila Slimani, Yamen Manaï, Abigail Assor, Maïssa Bey, Kamel Daoud, Boualem Sansal, Rachel Khan, Pascal Blanchard, Yvon Le Men, Sylvain Prudhomme, Velibor Colic, Alain Mabanckou... Tous ces noms prestigieux de la littérature maghrébine et mondiale, et bien d'autres personnalités littéraires et intellectuelles, ont investi pendant deux jours les arcanes de la Cité de la culture, lors du Congrès mondial des écrivains de langue française. Un événement organisé en amont avec le Sommet de la Francophonie qui se tiendra à Djerba les 20 et 21 novembre prochains. Transformée en une Tour de Babel mais parlant la même langue, la Cité de la culture a résonné du 25 au 26 septembre de toutes ces musiques, ces tempos, ces accents et ces imaginaires que peut porter la langue française lorsqu'elle adhère à l'idée d'une littérature monde émergée en 1993 et consolidée en 2007 par le manifeste de 44 écrivains. Un concept qui veut en finir avec la centralité qu'incarnait jusque-là une littérature franco-française omnipotente et imposant son diktat aux quatre autres continents où on écrit et crée pourtant depuis longtemps dans cette langue.
Kamel Daoud : «Le français me permet l'expérience du désir et du rêve »
«Lorsque le Président Macron m'a proposé en 2017 d'être sa représentante pour la francophonie et m'a confié la tâche de refonder ce concept, j'ai tout de suite pensé à l'Association Etonnants Voyageurs, qui organise un festival international du livre et du film, et avec laquelle nous partageons ce désir de «créolisation» et de «pollinisation», du français. C'est une francophonie «déringardisée» et décomplexée qui m'intéresse. Celle-là capable d'apporter au monde de la lumière et de l'espérance tout en disant aux jeunes : on ne trahit personne en apprenant une autre langue que celle des origines. Au contraire on ne peut que gagner en humanité et en expériences de vie nouvelles», explique la Franco-Marocaine Leïla Slimani, présidente du Comité littéraire du Congrès et Prix Goncourt 2016 pour son roman Chanson Douce.
Que signifie écrire en français lorsqu'on vient d'une culture autre ? Pourquoi choisit-on d'écrire en français ? Le français incarne-t-il toujours ce « butin de guerre » dont parlait Kateb Yacine ? Que peuvent apporter les migrations, les contrées lointaines et les écrivains puisant dans d'autres civilisations à la langue et à la littérature française contemporaines ? Voilà quelques-unes des questions, qui ont été posées au cours des débats de ces deux journées de congrès.
La Francophonie est un vieux projet émergé après les indépendances. Elle a entraîné la naissance en 1970 de l'Organisation internationale de la Francophonie, dont l'un des fondateurs est le président Bourguiba. Mais le monde a changé depuis. Beaucoup ont changé : la colonisation est dans l'Histoire, la guerre froide est finie et les échanges se sont accélérés grâce aux nouveaux dispositifs technologiques. Le rapport à la langue de l'ancien colon n'est plus le même que pour les générations précédentes. Les écrivains venus à Tunis l'ont rappelé à de multiples occasions et reprises. «On me pose plus la question : «Pourquoi écrivez-vous en français ?» que celle : «Qu'écrivez-vous ?». On m'interroge comme si je venais de déposer les armes ! Je n'ai pas fait la guerre ! J'écris en français parce que c'est délicieux. Parce que j'en ai envie. Parce que cette langue me permet l'expérience du désir et du rêve. J'ai découvert le français dans la sphère de l'intime. Elle m'a permis l'accès à la nudité et à l'érotisme », témoigne l'Algérien Kamel Daoud, auteur du roman à grand succès, Meursault contre-enquête (2014). «Une langue est une monture pour exprimer des émotions. Le français c'est l'outil que j'ai choisi spontanément pour le faire», ajoute, en écho aux propos de Daoud, le Franco-Tunisien Yamen Manai, dont le roman L'amas ardent a été couronné par de nombreux prix.
«C'est en la bousculant le plus qu'on sert une langue»
Même si Souleymane Bachir Diagne, essayiste et philosophe, est né en 1955 au Sénégal en pleine lutte pour l'indépendance et qu'il a reçu, comme il le dit, « le français dans les valises de la colonisation », il a fini par intérioriser cette langue. Elle exprime pleinement son identité et son humanité.
«Le français, je l'ai eu en partage avec des peuples dispersés sur les cinq continents. Les écrivains promeuvent la créativité d'une langue et explorent ses limites en la confrontant à d'autres dialectes. Le français aujourd'hui n'a plus de centre. Son avenir et son développement ne peuvent qu'avoir une dimension internationale», insiste Souleymane Bachir Diagne.
Laurent Gaudé, écrivain français, salué en 2004 entre autres par le Goncourt pour son roman Le soleil des Scorta, semble tout à fait d'accord avec l'essayiste africain : «C'est en la bousculant le plus qu'on sert une langue. Les mots inspirés d'ailleurs qu'on dépose dans les livres peuvent être féconds».
Instrumentalisée politiquement pour accuser de trahison et d'acculturation, les écrivains francophones et les élites s'exprimant en français dans les pays maghrébins, «Hizb franç». (Parti de la France) ou «Houthala francophoniya» (résidus de la francophonie), leur jette-t-on avec mépris, ils sont obligés de passer par la case justifications. Un débat éternel et pesant départageant les conservateurs et les progressistes malgré les transformations du monde. Cette polémique fatigue Karim Ben Smail, directeur de Cérès Editions. Mais l'éditeur persiste et signe : «Publier en français est pour moi un enjeu civilisationnel. Ce trésor, il faut l'entretenir et le garder. Je serai très triste si mes petits-enfants s'en détachent ».
Le rapport à la langue française reste complexe et ambigu, chargé parfois des affres d'un passé qui a du mal à passer, en particulier pour les écrivains résidant dans leur propre pays. Une problématique liée à cette question de l'identité, qui reste toujours irrésolue dans plusieurs contrées arabes et africaines.


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