Le président Kaïs Saïed cible réseaux criminels et pratiques spéculatives    Ordre des avocats, cybercriminalité, trafic de stupéfiants… Les 5 infos de la journée    Jeunesse et Sport: une cérémonie en l'honneur des athlètes qui se sont distingués aux championnats de Tokyo 2025    La France reconnaît officiellement l'Etat de Palestine    Saisie de plus de 4 mille kg de produits alimentaires impropres à la consommation    À Nice : un vol Nouvelair frôle un EasyJet, enquête ouverte et passagers sous le choc    Théâtre de l'Opéra de tunis: ce vendredi, hommage posthume à l'artiste Fadhel Jaziri    Tunisie Telecom acteur de référence en sécurité de l'information    Israël affirme qu'il empêchera la flottille de briser le blocus de Gaza    Wissem Ben Ameur : avec Liberta, profitez du paiement à l'avance pour une expérience spirituelle unique lors de l'Omra    Réunion à Sfax pour la saison oléicole : Fatma Mseddi évoque le dossier du domaine Chaâl    Lunettes connectées OpenAI : une révolution IA attendue pour 2026    Budget 2026 : Issam Chouchene critique un document sans chiffres précis    Caisses sociales – retard des délais de remboursement : les assurés sociaux lourdement pénalisés    Il ne manque plus qu'un militaire à la Kasbah    De la « fin de l'histoire » à la « fin de la mémoire»    La production Epson alimentée à 100 % par de l'électricité renouvelable    Le premier marathon de montagne « Ultra Boreas » à Bizerte    Dr Mustapha Ben Jaafar - La reconnaissance de l'Etat de Palestine, étape décisive vers la paix au Moyen Orient    Conseil de la presse : annonce de la composition des commissions internes    Perturbations climatiques attendues : l'observatoire de la sécurité routière appelle les automobilistes à la vigilance    Sousse–Tunis : Les voyageurs en colère après une semaine sans trains    Santé Internationale de COMAR Assurances : le contrat qui protège votre santé et celle de votre famille en Tunisie et à l'étranger    Les Ciments de Bizerte : déficit cumulé reporté de plus de 230 millions de dinars à fin juin 2025    Séisme de magnitude 3,2 dans le gouvernorat de Gafsa    Alerte rouge pour les PME industrielles en Tunisie : la moitié menacée de disparition    105 000 visas Schengen délivrés aux Tunisiens en 2024 avec un taux d'acceptation de 60 %    Météo en Tunisie : pluies orageuses attendues l'après-midi sur plusieurs régions    Port de Radès : saisie de drogue et arrestations dans les rangs de la douane    La JSK terrassée par l'ESZ : La défense, un point si faible    Ballon d'Or 2025 : à quelle heure et sur quelle chaîne voir la cérémonie    Clôture du festival du film de Bagdad: Le film tunisien « Soudan Ya Ghali » remporte le prix du meilleur documentaire    Cybercriminalité : Le Ministère de l'Intérieur passe à l'offensive !    Pluies diluviennes en Espagne : un mort, transports aériens et ferroviaires paralysés    Grève générale en Italie contre l'agression à Gaza : « Que tout s'arrête... la Palestine dans le cœur »    Séisme de magnitude 4,8 frappe la mer Egée en Turquie    Hasna Jiballah plaide pour un accès facilité des sociétés communautaires au financement    Saint-Tropez sourit à Moez Echargui : titre en poche pour le Tunisien    Le ministre des Affaires Etrangères participe à la 80eme session de l'Assemblée Générale des Nations Unies à New York    Incident sur le terrain : Gaith Elferni transporté à l'hôpital après un choc à la tête    Visas Schengen : la France promet des améliorations pour les Tunisiens    Moez Echargui en finale du Challenger de Saint-Tropez    Cinéma : Dorra Zarrouk et Mokhtar Ladjimi sous les projecteurs du Festival de Port-Saïd    Youssef Belaïli absent : La raison dévoilée !    Sfax célèbre l'humour à l'hôtel ibis avec ibis Comedy Club    La Bibliothèque nationale de Tunisie accueille des fonds de personnalités Tunisiennes marquantes    Fadhel Jaziri: L'audace et la norme    Fadhel Jaziri - Abdelwahab Meddeb: Disparition de deux amis qui nous ont tant appris    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



L'artiste-peintre franco-tunisien Marjan à La Presse: « Des œuvres qui ont pleuré à l'intérieur de moi... »
Publié dans La Presse de Tunisie le 20 - 11 - 2021

« Marjan », comme on l'appelle dans la vie et dans l'univers des artistes européens, est exactement Mounir Marjan Amara. Il est français, de père tunisien. Il est cet artiste-peintre qui ne cesse de faire sensation à Paris et qui gagne de plus en plus en notoriété et en rayonnement.
Révélé soudain au grand public, d'abord grâce au film « Marjan La lucarne » que le réalisateur Patrice Velut a consacré à son œuvre et son parcours, puis ensuite grâce au grand commissaire des expositions Didier Benesteau qui a exposé, en décembre 2018, sa collection personnelle au prestigieux musée de Laval qui garde maintenant de lui 3 œuvres majeures, Marjan rappellerait un peu, par ses peintures presque parlantes qui vous secouent de l'intérieur et vous interpellent avec une savoureuse puissance, Van Gogh, Henri Matisse ou encore Pablo Picasso. Seulement il n'y aurait là que de vagues similarités sans importance, car Marjan, par ses lignes et courbes frappantes, par ses captivantes couleurs, ne ressemble qu'à lui-même et il est « unique et inclassable », comme les connaisseurs en la matière l'ont déjà jugé et comme l'aurait trouvé Alexis Péron, l'ancien administrateur du Musée d'Art moderne, d'Art contemporain et d'Art Brut de Lille (LaM) qui fut le premier à acheter l'une de ses œuvres picturales.
Issu d'un couple mixte très vite cassé par un quotidien violent et dur, il a l'esprit profondément marqué par la souffrance, la sienne propre et celle des autres, la solitude et le souvenir de la violence du milieu où il grandissait avec des peurs, des angoisses et des larmes retenues ou enfouies entre des blessures mal fermées et des ombres fantomales obsédantes affluant du plus profond d'une mémoire grise. Une mémoire d'où tout son art semble jaillir au point que ses toiles qui, remarque-t-il, « ont pleuré à l'intérieur de lui-même », deviennent un peu comme le livre de sa vie. Un livre ouvert et avec plein d'enfants aux yeux tristes et aux regards hagards qu'il aurait tant aimé écrire avec tous ces mots merveilleux dont il est bien capable, lui qui se rêvait d'abord écrivain, mais qui a enfin écrit surtout avec son pinceau, toujours inspiré par une miraculeuse lumière naissante, comme chez les soufis, de ses ardentes prières qui s'élèvent en son âme, dans le silence de ses incessantes méditations.
En octobre dernier, après différentes expositions, ses toiles ont atterri, au bonheur des lecteurs et des amateurs d'art, à la grande « Librairie la Lucarne » de Paris où son succès fut grand. Interview.
Dans la préface du livre comprenant les photos des toiles de votre première grande exposition au Musée d'Art Naïf et d'Arts Singuliers » (Manas), de Laval, la directrice de ce Musée, Antoinette Le Father, écrit que votre univers pictural « rappelle que l'art peut être un exutoire à la souffrance ». Est-ce que votre travail d'artiste s'arrête à l'accueil de votre souffrance intérieure dans vos formes et couleurs, ou il va plus loin. Comment ?
Quand on a grandi et que l'on s'est développé dans un environnement où il y a eu de la violence et des manques essentiels, on projette assez facilement nos propres traumatismes intérieurs sur des personnes et des scènes qui réactivent inconsciemment nos ressentis de l'époque. Ainsi, on entend chez l'autre l'urgence de sa peur, de sa solitude ou de ses manques ! Je crois que, sur un plan psychologique, les êtres qui ont porté les mêmes blessures vivent sur une longueur d'onde identique et se reconnaissent. Je ne peux peindre que ce qui me traverse et que je porte dans mon être. Ma propre histoire que j'ai commencé à peindre pour m'exprimer, je la retrouve chez ceux qui me touchent et que je porte quelques heures, parfois quelques jours dans mes méditations et mes prières. Les peindre et les faire exister — pour ne pas que ce qu'ils sont et ce qu'ils vivent, tombent dans l'oubli — me soulage moi-même ! Ma propre solitude se prolonge dans celle d'un autre homme qui peut prendre vie dans l'une de mes peintures.
Quand on sait que les enfants aux regards hagards et à l'air perdu figurant dans la plupart de vos toiles ressemblent peu ou prou à vous-même et rappellent votre enfance pénible, votre solitude, votre quête de vous-même, pourrait-on parler, en ce qui concerne l'artiste-peintre que vous êtes, de peinture « autobiographique » ?
Il est surprenant de l'entendre, mais je n'ai jamais peint par moi-même, consciemment, des enfants aux regards désolés qui semblent vivre dans un isolement terrible ! C'est ce qui m'interroge et me bouleverse tout autant ! Ces enfants sont nés, je dirais, presque d'eux-mêmes ! Comme s'ils étaient apparus sur ma toile pour dire au monde leur souffrance et leur agonie profonde. Et je crois, après réflexion, que Marjan a été un de ces enfants et qu'il y a en lui la sensibilité idéale pour amener leur cri à se faire entendre !
Vous êtes entré dans l'art d'abord par l'écriture, puis, avant de trouver vraiment votre voie dans la littérature, vous avez découvert la peinture et êtes devenu un peintre important ?
Je n'ai pas découvert la littérature ou l'art en général, par un choix rationnel ou une décision personnelle. J'ai découvert l'écriture ou la peinture et j'ai continué à marcher avec ces disciplines dans ma vie quotidienne car elles me mettaient en contact avec une source transcendante.
Vous avez écrit dans vos mémoires : « Soit, je trouvais ma voie dans ce qui ne pouvait que faire partie de ma vie : écrire ! – Soit je pouvais mourir. Car je ne pourrais jamais vivre et m'adapter au monde en étant une autre personne ». Comment expliquez-vous ce rapport viscéral, existentiel, à l'écriture, et comment se fait-il que la peinture vienne soudain prendre dans votre vie bien plus de place que l'écriture que vous croyiez être votre destin ?
Ce que je souligne ici, c'est la différence que je ressentais entre le monde extérieur où j'évoluais et ce que je devenais moi-même, transformé par une vie psychique qui était intense, urgente et qui m'absorbait continuellement dans ses charmes et son amour. Mes aspirations peu communes et peu comprises autour de moi créaient une solitude nouvelle. L'écriture qui devenait un ciel sacré ne pouvait être que mon seul chemin car c'est à travers elle que je retrouvais la clé de mon monde spirituel. Plus tard, lorsque j'ai commencé à prendre le pinceau, je n'imaginais pas, qu'à travers la peinture, cette présence spirituelle s'y trouverait. L'amour ressenti alors est si fort et si viscéral que je ne pouvais que poursuivre sur cette route. En définitive, ce n'est pas le support qui importe le plus, c'est ce qui le traverse ! Ecrire, peindre ou prier c'est une même chose pour moi ! Une même aspiration !
Vous avez illustré le recueil de poèmes de Aline Recoura « Banlieue Ville ». Pensez-vous que les livres — en plus des expositions — sont un moyen plus simple pour faire parvenir l'art pictural au public qui fréquentent les livres mais pas les galeries ?
En effet, il y a beaucoup plus de personnes qui lisent des ouvrages qu'il n'y en a qui visitent des galeries d'art ! J'ai reçu des témoignages très émouvants de la part de lecteurs qui ont lu le livre de l'auteure Aline Recoura « Banlieue-ville » dont j'ai fait l'imagerie et qui ne songeaient aucunement qu'une peinture pouvait susciter autant de mouvements émotionnels en soi. Pour la plupart d'entre elles, elles m'ont confié avoir eu ensuite le désir de poursuivre leur initiation dans le domaine de la peinture.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.