A l'époque où Ahmed Rahmouni, Kalthoum Kennou, Abderrazak Kilani et Ayachi Hammami sévissaient sur les plateaux TV et radio pour exiger «l'assainissement» de la justice en proposant, jour et nuit, leurs propres listes des magistrats et avocats corrompus à révoquer et aussi à envoyer en prison pour leurs crimes commis sous la présidence de Ben Ali, ils étaient — il faut avoir le courage de le reconnaître aujourd'hui — nombreux parmi les journalistes, les observateurs et les politologues dont les langues se sont déliées bien après le 14 janvier 2011 à avoir tiré la sonnette d'alarme et à prévenir les Tunisiens de tomber dans le piège de la République des juges ou des avocats, deux Républiques où les libertés publiques et privées et les conditions d'un procès équitable pour tout prévenu, quel que soit son crime, risquaient de s'évaporer et de faire partie d'un passé qui ne reviendra jamais. Aujourd'hui, il est malheureux, inquiétant et inacceptable d'observer l'émergence d'un nouveau phénomène s'imposant, de jour en jour, sur notre scène médiatique nationale, toutes composantes confondues, y compris le fameux Facebook et les réseaux sociaux et aussi du côté du paysage politique national ou pour être plus précis parmi les acteurs politiques et civils qui s'expriment encore sur ce qui se trame dans la vie politique nationale ou ce qu'il en reste. On assiste, en effet, au pullulement sans précédent de ces chroniqueurs et chroniqueuses qui «colonisent», désormais, les médias nationaux, les sites et les réseaux en prétendant, de par leurs interventions interminables, leurs fanfaronnades et leurs analyses «prospectives» à souhait, détenir non la vérité absolue mais bien la science infuse qu'ils inculquent aux Tunisiens, le plus souvent pour des desseins qui n'échappent plus à personne dans la mesure où les agendas et les intérêts qu'ils servent, sous le fallacieux principe de la transparence et de l'objectivité, sont dévoilés entièrement à l'opinion publique. L'heure n'a-t-elle pas sonné pour que les Tunisiens opposent un non catégorique et ferme à ces usurpateurs de leur volonté et de leurs choix ?