Loin de la tension politique et de la polémique relative aux dates et à leur symbolique, la situation en Tunisie nécessite impérativement une trêve sociale et politique pour dépasser une situation économique extrêmement dangereuse. La Tunisie célèbre, aujourd'hui, la fête de la Révolution dans un climat de crise politique. Si pour le Président de la République, le 17 décembre doit impérativement représenter symboliquement la Révolution, puisque le 14 janvier marque son avortement selon ses dires, pour certains Tunisiens, au vu de la crise sociale et la dégradation du pouvoir d'achat, les dates n'ont plus aucun sens. En déclarant le 17 décembre fête officielle de la Révolution tunisienne, le Chef de l'Etat, Kaïs Saïed, semble vouloir redonner éclat à ce qu'il appelle «la date réelle de la Rrévolution du peuple». Sauf que pour cette année, la Tunisie commémore le 17 décembre dans des circonstances politiques, économiques et sociales extrêmement difficiles. Il suffit de rappeler qu'en dépit de l'annonce présidentielle d'un calendrier pour le processus du 25 juillet, la situation politique est toujours conflictuelle dans la mesure où la majorité des partis politiques se sont opposés au pas franchi par le locataire de Carthage. Sur le plan social, la crise persiste toujours et ne cesse d'empirer. Des informations sur un plan gouvernemental visant à réduire les salaires, confirmées par la centrale syndicale, ont enfoncé le clou, autant dire que les Tunisiens ne sont plus en mesure de faire de nouveaux sacrifices, leur pouvoir d'achat étant à son plus bas niveau. Economiquement, le constat est sans appel, le gouvernement, dos au mur, multiplie les efforts et active sa diplomatie économique pour clôturer le budget de l'année en cours et élaborer la loi de finances pour l'exercice 2022. Toutes ces données font que le 17 décembre soit fêté dans une ambiance de crise sociale et sous tension politique. Sauf que pour le Président de la République, l'enjeu est de taille, prouver à tout le monde que la date du 17 décembre doit représenter symboliquement la Révolution tunisienne, et que donner de l'éclat à ce jour est indispensable, pour ce faire. Si pour commencer, le 17 décembre a été décrété jour férié au lieu du 14 janvier, cette date devra marquer en effet le début d'un processus d'une année, pour donner lieu à des réformes politiques, économiques et constitutionnelles de taille. L'enjeu étant, selon Kaïs Saïed, de donner la parole au peuple tunisien, ce qui passe par la rectification du processus révolutionnaire. En tout cas, dans ce cadre, des festivités officielles sont attendues à Sidi Bouzid, connu comme le bastion de la Révolution tunisienne. Ce gouvernorat, qui peine depuis 11 ans post-révolution à trouver le chemin du développement, s'enfonce de plus en plus dans une crise sociale inédite. Le clan opposé promet l'escalade Si ce 17 décembre devait être fêté sous tension, c'est en raison des appels à descendre dans la rue lancés par le clan contre la mouvance du 25 juillet. En effet, l'initiative «Citoyens contre le coup d'Etat» a appelé à un mouvement de protestation aujourd'hui, vendredi 17 décembre, au niveau de l'avenue Habib-Bourguiba à partir de dix heures. Elle a appelé tous les citoyens de toutes les régions du pays à participer à cette manifestation dont le l'objectif est de «sauver le pays d'un coup d'Etat qui conduira à un effondrement économique et social». Ridha Belhadj, membre du comité exécutif de l'initiative «Citoyens contre le coup d'Etat», a estimé dans ce sens que la date du 25 juillet s'est peu à peu étiolée, même aux yeux de ceux qui ont soutenu les mesures exceptionnelles prises par le Président Kaïs Saïed. Belhadj a précisé qu'il faut mettre fin à cette déviation du processus démocratique, faisant savoir que l'initiative «Citoyens contre le coup d'Etat» a appelé à un mouvement de protestation à partir du 17 décembre et jusqu'au 14 janvier 2022 en vue de fermer la parenthèse de ce putsch perpétré par Saïed. En tout cas, loin de cette tension politique, et de la polémique relative aux dates et à leur symbolique, la situation en Tunisie nécessite certainement une trêve sociale et politique pour dépasser cette situation économique extrêmement dangereuse.