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La révolution : quel bilan cinq ans après ? (2e partie et fin)
Opinions
Publié dans La Presse de Tunisie le 22 - 03 - 2016


Par le Col.( r ) Boubaker BENKRAIEM*
La première partie de l'article a relaté certaines des nombreuses erreurs commises par les gouvernants de ces cinq dernières années. La suite fait le constat de la situation et propose, à tous les intéressés, partis politiques, organisations nationales, société civile et les hommes du pouvoir, des recommandations, des idées et des avis pouvant aider à remettre les pendules à l'heure.
Aussi, certains problèmes qui gâchent et déprécient la vie à une bonne partie de nos concitoyens n'ont pas eu d'issue heureuse et se sont même, plutôt, accentués sans avoir été traités sérieusement pour être solutionnés.
Le domaine qui inquiète et indispose toute la population et en particulier les plus démunis dont le nombre a énormément augmenté, après la révolution, est le renchérissement du couffin de la ménagère qui a, pour certains produits, doublé de prix. S'agissant d'un secteur vital, il est malaisé de convaincre nos concitoyens quant aux raisons de cette situation et ils n'excusent, en aucune manière, les gouvernants qui n'ont pas fait beaucoup d'effort et n'ont pas pris de mesures coercitives contre les spéculateurs et les contrebandiers qui en sont la cause.
De même, malgré la décennie rouge des années quatre-vingt-dix du siècle dernier, vécue, à nos frontières ouest, par nos frères algériens, notre pays n'a connu, par le passé, qu'un seul acte terroriste en 2008, celui de Soliman. Celui-ci a été, immédiatement et sans perte de temps, circonscrit et contré avec toute la rigueur, la puissance et la fermeté nécessaires et ses membres ont été éliminés ou arrêtés. Certains parmi ces derniers, condamnés à de longues peines de prison, ont malheureusement et malencontreusement, bénéficié de l'amnistie prononcée, à l'occasion de la révolution et ont repris les armes contre leur pays.
Le terrorisme, ayant exploité la période transitoire qui a suivi la révolution suite au laxisme des gouvernants post-révolution, et de la dissolution de la direction de la sûreté de l'Etat, a eu tout le temps et le loisir de se constituer tranquillement, de s'équiper correctement, de s'entraîner fermement et d'agir intensément à plusieurs reprises causant d'importants dégâts en vies humaines tunisiennes et étrangères et occasionnant, à notre pays, des pertes et des difficultés économiques incalculables. Il est bon de rappeler que cela a été facilité par le comportement de certains imams qui n'ont de cette qualité que le nom et qui, par des discours et des prêches haineux, malveillants, venimeux et malintentionnés, et n'ayant été aucunement dérangés par les gouvernants en place, se sont distingués pour convaincre, recruter, encourager et aider des jeunes Tunisiens, de milieux sociaux variés, à s'engager et à participer au jihad où qu'il soit, en Syrie, en Afghanistan, en Irak, au Sahel, et dans d'autres foyers du terrorisme. Certains ont même rejoint et renforcé les groupes terroristes agissant dans notre pays. Cependant, il est à déplorer l'absence totale des cheikhs zeitouniens dont les connaissances théologiques sont indéniables mais qui n'ont pas répondu à ces prétendus prédicateurs et se sont, surtout, fait remarquer par leur mutisme à tel point qu'on s'est, souvent, demandé les raisons de ce silence. Ces pseudo imams ont même inventé, à nos jeunes filles, le plus ignoble des jihads, celui de ‘‘jihad ennikah'' qui est en lui-même une honte et pour l'islam et pour notre pays. Ce qui est paradoxal, c'est qu'aucun de ces remarquables imams n'a été, à ce jour, inquiété, interrogé ou sanctionné. Pourquoi ces imams ont-ils bénéficié d'un sauf conduit et de cette liberté de prêche occasionnant, à notre jeunesse et au pays, les désastres que nous connaissons?
Cependant, le gain le plus précieux de la révolution est, sans conteste, la liberté d'expression dont tous les Tunisiens ont usé et souvent abusé. Mais du fait que ce privilège était attendu depuis plus d'un demi-siècle, nos concitoyens l'utilisent, un peu, à tort et à travers. Et puis comme les citoyens se sont sentis libres et disposant de cette liberté d'expression, chèrement acquise, ils se sont mis à formuler toutes sortes de réclamations et de demandes, y compris les plus insensées et les plus illogiques. Pêle-mêle, celles-ci étaient en rapport avec : l'emploi pour les diplômés du supérieur et pour les autres, la baisse du coût du couffin de la ménagère, davantage de sécurité, toutes légitimes jusque-là, les revendications salariales de tous les secteurs d'activités sans exception, un peu abusives celles-ci, de meilleurs soins dans les hôpitaux, le développement des régions de l'intérieur, de l'eau potable et de l'électricité pour les douars les plus reculés, plus de sécurité pour les populations limitrophes aux montagnes abritant des terroristes, et le tout doit être réalisé, sans faute, sans délai et coûte que coûte, illico presto, et cela grâce à la ‘‘baguette magique'' !o
A toutes ces demandes dont la réalisation nécessite beaucoup de moyens financiers et du temps, les partis politiques, sachant pertinemment que ces requêtes sont exagérées et dont la réalisation immédiate est impensable, n'ont pas réagi pour expliquer, à leurs adhérents et au peuple l'irrationalité et l'absurdité de pareilles demandes. Aussi, les gouvernants successifs, n'ayant pas ce charisme qui caractérise les grands hommes d'Etat, n'ont pas eu le courage, l'audace et le cran pour s'adresser à la nation, avec toute la rigueur nécessitée par la situation, en utilisant beaucoup de pédagogie, pour mettre le holà à ces demandes exagérées et pour rappeler tout le monde à l'ordre, et siffler la fin de la récréation. Cela voudrait dire qu'il aurait fallu associer comme témoins et acteurs, les organisations nationales, les partis politiques et les associations de la société civile et interdire pour plusieurs années, c'est-à-dire jusqu'à la reprise du développement conséquent du pays, les sit-in, les arrêts forcés du travail dans les entreprises, les revendications salariales ainsi que les grèves de toutes sortes et exiger que tous les travailleurs des secteurs public et privé assurent, obligatoirement, une amélioration sensible de leur productivité, dans le but de participer à la richesse de la Tunisie et lui permettre de faire face, en toute quiétude, au remboursement de ses nombreuses dettes qui deviennent, de plus en plus, inquiétantes.
Mais, faut-il rappeler que le côté négatif de cette révolution a été la durée de la période transitoire qui a été trop longue. La Constitution aurait pu être préparée, dans un délai maximum d'un an mais les Constituants, pour plusieurs raisons qui ne sont pas difficiles à deviner, ont porté celui-ci à trois ans.
Mais ce qui est alarmant et incompréhensible est que presque rien n'a été réalisé au point de vue développement malgré la disponibilité du financement de plusieurs projets programmés depuis longtemps. Ceci ne peut s'expliquer que par une certaine incompétence des gouvernants post-révolution et notamment ceux de la Troïka qui n'avaient ni expérience ni connaissances dans la gestion des affaires de l'Etat, d'une part, et, d'autre part, par le fait que les directeurs généraux des ministères, ceux qui ont, relativement, bien géré le pays durant la première année post-révolution avec compétence, aptitude et efficacité, ont été, purement et simplement, mis à la retraite ou au ‘‘frigo''.
En conclusion, cinq ans après la révolution, le pays n'a pas avancé d'un iota parce que la première année post-révolution a été la pire des années, celle de tous les dépassements, de toutes les sottises humaines, de la montée d'un incivisme qui a détruit tout lien social, de la création de syndicats dans des corps qui ne devraient pas en avoir comme cela se passe dans la plupart des pays et on commence, déjà, à en percevoir les résultats, et de l'éclipse de l'Etat dont les symboles et l'autorité n'ont plus de sens pour la majorité des Tunisiens. Cette première année a été suivie par la gestion calamiteuse du gouvernement de la Troïka qui a été négative à tous les points de vue. Nous souffrons de tous ces maux et de l'atonie économique, de la grogne sociale permanente, de l'explosion des activités informelles, de la contrebande, de cette insécurité aux frontières, et dans certaines régions montagneuses et forestières et jusque dans les grandes villes, et nous endurons toutes ces épreuves dont souffre encore aujourd'hui tout le peuple et que personne ne semble en mesure d'endiguer. Le pays manque de finances alors que l'économie informelle, par définition, échappe à tout impôt et représente, selon des sources assez crédibles, près de 40% de la richesse nationale. Lorsqu'on ajoute à ce fléau celui de l'évasion fiscale, évaluée à près de 70 % des recettes actuelles, près du tiers du budget, le manque à gagner pour l'Etat est, bien sûr, considérable et permettrait, certainement, l'amélioration des conditions de vie des régions de l'intérieur. Face à une telle dégradation, le gouvernement semble dépourvu de stratégie et surtout d'une vision globale de l'avenir vers lequel il souhaite conduire le pays. Chaque membre du gouvernement essaie de naviguer à vue, en évitant, surtout, de froisser les intérêts représentés par les puissants lobbies.
Tout le monde se plaint des ravages causés par la contrebande dont l'ampleur a dépassé le niveau admis un peu partout dans le monde. Aussi, étant informé du développement de la corruption, de l'existence de ce grave fléau, la contrebande et de l'évasion fiscale, l'Etat doit, pour les éradiquer, constituer le plus important de ses corps jamais créés, celui des contrôleurs de l'Etat qui ne dépendra que du chef du gouvernement et qui doit être très bien étoffé, très bien structuré, dont les membres doivent être superbement rétribués et surtout composé de cadres absolument, certainement et parfaitement incorruptibles. Le corps des intendants militaires est en mesure d'en fournir un bon nombre que ce soit parmi les actifs que les retraités. C'est la meilleure solution pour supprimer tous ces catastrophiques, ces désastreux et ces destructeurs fléaux. Aussi doit-on, en même temps, légiférer pour incriminer l'évasion fiscale, la contrebande et le commerce parallèle en prévoyant des sanctions très sévères (lourdes peines de prison et amendes très rigoureuses).
D'autre part, le terrorisme devant être éradiqué, beaucoup d'anciens responsables ont, à plusieurs reprises, proposé, demandé et réclamé avec insistance la création, en urgence, de l'Agence nationale de renseignements dont le besoin et l'intérêt ne sont plus à démontrer. Rien ne semble être fait jusqu'à présent et un tas de questions se posent à ce sujet.
Aussi, l'Armée nationale, en situation opérationnelle depuis cinq ans, a besoin de renfort en vue de se refaire une santé, de s'entraîner, de se recycler et de se reposer. Le rappel de quelques milliers de réservistes est tout indiqué, en vue de permettre à nos services de mobilisation de se remettre en cause et d'améliorer leur plan d'action. Cependant, par un communiqué publié il y a quelques semaines, le ministère de la Défense nationale a, dans un souci de satisfaire certains besoins pressants des armées, d'une part, et de contribuer à la lutte contre le chômage, d'autre part, invité les jeunes à se présenter pour l'accomplissement du service national avec la promesse d'engager par la suite les volontaires pour suivre une carrière militaire en leur accordant un grade correspondant à leur diplôme. Je voudrai, à ce propos, attirer l'attention de M. le ministre de la Défense nationale sur le fait que le grade, surtout d'officier, est tributaire d'abord d'une formation à l'Académie militaire, ensuite d'une ancienneté, enfin d'un commandement et surtout d'un mérite.
Le quatrième pouvoir, les médias qui font et défont l'opinion et qui ont un rôle didactique de premier ordre, investi de cette responsabilité morale quand il s'agit de l'avenir et du devenir du pays, ne doit pas courir après le buzz. Au contraire, il doit calmer le jeu et être, constructif, instructif et surtout, positif.
La justice, notre justice que nous voulons être indépendante, absolument indépendante, doit, au plus tôt, commencer à juger et, publiquement grâce à la Télé, les terroristes arrêtés. Pédagogiquement parlant, pareils jugements qui seront, certainement sévères vu la gravité des crimes commis, donneront à réfléchir aux éventuels candidats à ce prétendu jihadisme. Les peines prononcées, y compris les condamnations à mort, doivent être exécutées sans retard. Il est, par ailleurs, demandé à ces messieurs des droits de l'Homme de s'abstenir de défendre le droit à la vie à ceux qui n'ont pas hésité, un seul instant, à l'enlever à des innocents ( enfants, vieillards et dames).
Notre pays, grâce aux quatre représentants des plus importantes organisations de la société civile ( Ugtt - Utica - droits de l'Homme et Association des avocats), s'est vu décerner le prix Nobel de la paix, le plus prestigieux des prix internationaux, pour avoir, ensemble, réussi, en 2013, à dénouer l'une des crises les plus graves qu'a connue la Tunisie post-révolution. Cette distinction qui a permis d'avoir beaucoup d'espoir et un avenir plein de promesses, n'a, malheureusement, pas été exploitée comme il se doit et n'a pas rapporté, au pays, les dividendes escomptées. Cela mérite réflexion.
Un appel pressant aux trois grands responsables du pays, MM. le président de la République, le président de l'ARP et le chef du gouvernement : depuis quatre ou cinq ans, nous tournons en rond, le peuple n'en peut plus tellement la cherté de la vie l'assomme et sa situation matérielle, au lieu de s'améliorer, se déprécie davantage; le chômage, on n'en parle plus étant donné le manque de moyens ; le terrorisme on continuera à le combattre avec les moyens du bord et on le vaincra pour peu que le citoyen soit conscient de son rôle capital dans cette lutte ; il doit aussi être mobilisé et participatif; les projets de développement ne sont pas encore lancés et bougent à peine, et le peuple est fatigué par les conditions dans lesquelles il continue à vivre.
Quoique les deux changements de régime intervenus dans notre pays au cours des trente dernières années, celui du 7 novembre 1987 et celui de la Révolution de 2011, ne sont pas, politiquement et socialement, comparables, certains comportements des responsables des deux régimes peuvent être confrontés par rapport à certains aspects: quand Ben Ali a remplacé le grandissime Bourguiba, en 1987, le pays était, dans un état économique et financier plus catastrophique et plus lamentable qu'il ne l'est actuellement puisqu'il n'était pas loin de la banqueroute. Mais la différence dans la perception des solutions aux problèmes est évidente : Ben Ali, malgré les erreurs commises à partir du second quinquennat et dont je condamne sa gestion des affaires du pays, aurait pu demander des comptes à des centaines de personnes mais, loin de tout esprit revanchard, il n'a pas interdit aux hommes d'affaires de quitter le territoire, n'a pas instauré des tribunaux d'exception et a préféré, plutôt, médicaliser, d'urgence, l'économie de la Tunisie et renflouer les caisses, déjà vides. Il n'a pas entrepris la chasse aux sorcières et arrêté pour juger, sanctionner et punir ceux qu'on prétend être les responsables des difficultés économiques et financières du pays. Il a recherché, plutôt, l'efficacité car il était en compétition avec le temps et avec la situation catastrophique du pays. Repoussant toute intention de revanche, il a eu le mérite de réussir une réconciliation nationale digne qui lui a permis de remettre, sans perte de temps aucune, tout le monde au travail dans une ambiance saine, laborieuse et prometteuse. Les résultats ne se sont pas fait longtemps attendre ; et grâce à un emploi judicieux de toutes les compétences, le pays s'est relevé en très peu de temps.
Par contre, le régime issu de la révolution, obnubilé par ce qu'on disait de la corruption, de l'injustice et des dépassements de tout genre, institua une justice transitionnelle pour traduire les fautifs en justice, et essayant de se coller à certaines valeurs morales, mais négligeant l'essentiel des difficultés quotidiennes de nos concitoyens, s'est laissé déborder à tel point que les problèmes qu'il voulait combattre, ont, contrairement à toutes les attentes, sérieusement augmenté, après la révolution.
Aussi, nous savons tous qu'un pays ne peut être ni géré, ni administré, encore moins gouverné par des personnels sans compétence, sans expérience, quel que soit leur degré de militantisme. La Tunisie a toujours eu de brillants cadres, dans tous les domaines. Qu'attendons-nous pour faire appel à eux car il n'y a pas d'autre solution. Ils sont disposés à servir la patrie en danger, ils sont prêts à donner le meilleur d'eux-mêmes pour redorer le blason de notre pays qui s'est tellement terni ces dernières années. Nous sommes en train de perdre un temps précieux alors que notre pays est en grande difficulté. Nous sommes entrain de payer cash les erreurs, de toutes sortes, des trois premières années post-révolution dont l'amnistie générale qui n'aurait pas dû être appliquée à tous les prisonniers, les dédommagements qui auraient dû être échelonnés sur plusieurs années, l'intégration de milliers de partisans dans la fonction publique qui n'en avait pas besoin, etc...avec les conséquences qui ont généré l'état des finances que nous connaissons !! Voulez-vous que nous continuons dans le même sens ? Il est urgent et très urgent de rappeler ces grands commis de l'Etat qui ont maintenu, tout de suite après la révolution, les Institutions en fonctionnement, malgré l'absence effective de gouvernants et penser à l'avenir et au devenir de notre chère Tunisie qui est en train de couler, de se perdre et de péricliter. Nombreux sont les cadres spécialisés dans les domaines économiques et administratifs. Qu'avons-nous réalisé au cours de ces cinq dernières années, à part la constitution et la liberté d'expression ? Le devoir nous oblige à faire appel, au besoin, au diable pour sauver notre pays.
Cependant, tout cela ne suffirait pas si l'Etat ne retrouverait pas, d'extrême urgence, son autorité, son prestige et sa puissance perdus depuis la révolution, ne montrerait pas ses dents, ne sévirait pas, au besoin, et ne démontrerait pas ses capacités et sa détermination irrévocable à :
a- réformer la fiscalité,
b- éliminer le commerce parallèle,
c- mettre fin à la contrebande,
d- mener une vraie guerre pour endiguer toutes les formes de corruption.
Dans tous ces domaines, nous avons toutes les compétences nécessaires pour y arriver si la volonté politique est ferme et implacable. D'ailleurs ce qui se passe, depuis des mois, à l'hôpital de Sfax, par les syndicats locaux, avec l'observation bienveillante de la centrale syndicale, et ce qui s'est passé, fin février, à la Kasbah, devant la Primauté par des syndicats des Forces de l'ordre, est inquiétant, inacceptable et ne peut être ni admis ni toléré.
Peu de temps après l'attribution du prix Nobel de la paix à notre pays, le parti politique Nida Tounès qui a réussi à remettre les pendules à l'heure en équilibrant le paysage politique dominé par le parti Ennahdha qui, en remportant, haut la main les élections de 2011, continuait, malgré l'opposition des associations de la société civile qui se mobilisèrent pour alerter l'opinion publique, à mener la barque. C'est alors que le quartette, intervint pour appeler au dialogue national qui a abouti à la désignation d'un gouvernement de technocrates. Nida a pu, grâce au charisme de son chef, gagner les élections de 2014, les législatives et la présidentielle mais retomba, avec le départ de son président au Palais de Carthage, plus bas que terre, en offrant aux Tunisiens un spectacle désolant et indigne de la démocratie tunisienne tant saluée aux quatre coins du monde. Ceci est arrivé par le désir de positionnement de deux membres du directoire du Parti dont l'un était secrétaire général et l'autre vice-président et, surtout, fils du fondateur du parti et président de la République. Le long silence et le manque d'intervention énergique du fondateur du parti à ce propos, critiqués par de nombreux sympathisants et adhérents à Nida, ont été la cause de l'état d'implosion de ce dernier-né des mouvements politiques qui a été très vite adopté et soutenu par une grande majorité de Tunisiens qui ont cru en lui mais qui les a, malheureusement, fort déçus et qui semble, actuellement, en agonie. Nous espérons, tous, qu'il renaisse au plus tôt, de ses cendres, qu'il replâtre les pots cassés, qu'il se ressaisisse, qu'il fasse son autocritique, qu'il renforce ses rangs, et ce, dans l'intérêt du pays.
Alors que je terminais cet article, eut lieu le traître coup des terroristes qui ont attaqué Ben Guerdane, à l'aube du 7 mars 2016, et au cours duquel nos hommes, sécuritaires et militaires, ont fait preuve de courage, d'abnégation et de comportement remarquables. Aussi, je veux rendre à toutes nos forces, celles de la Sécurité intérieure, de la Douane et de l'Armée, ainsi qu'aux courageux citoyens de Ben Guerdane, les soldats de l'ombre qui ont émerveillé le monde, le plus vibrant des hommages pour la célérité et l'efficacité de leur riposte qui a été fulgurante et qui a, tout de suite, fait douter les assaillants quant à l'issue de leur sale besogne. Je veux aussi les féliciter pour la vigueur, la puissance et la détermination nécessitées par cette noble cause, et pour la manière et pour la coordination opérationnelle qui ont donné ces brillants résultats. A tous nos martyrs, les immortels, que Dieu aie leur âme et qu'ils reposent en paix.
Cependant et en marge de ce qui vient de se passer à Ben Guerdane, est-il, encore, besoin de rappeler pour la dixième fois, la nécessité de créer l'Agence nationale de renseignements dont le besoin devient plus qu'urgent ; nous ne comprenons pas les raisons de ce retard ou de ce refus inexpliqué alors que nous disposons du potentiel humain nécessaire, que ce soit parmi les civils que parmi les militaires; de même, étant donné la difficulté et la longue durée nécessitée par la formation de tels spécialistes, il est instamment recommandé de faire appel aux personnels qui ont une grande expérience dans ce domaine et qui ont été soit remerciés, soit mis à la retraite en 2011.
Notre pays, étant donné sa situation économique et sociale, doit s'engager, au plus tôt, dans un processus de réconciliation nationale pour se remettre sérieusement au travail, ne compter que sur soi-même et gagner la bataille du développement. Les investisseurs, tunisiens et étrangers, doivent être davantage encouragés, l'administration doit reprendre confiance et avoir l'appui de l'autorité politique , pour qu'elle joue, pleinement, son rôle ; les syndicats doivent être moins gourmands, les travailleurs doivent retrousser les manches, et tout cela sans porter atteinte au droit de manifester et de s'exprimer mais sans jamais arrêter ou perturber le bon fonctionnement de la machine de production ; nos citoyens doivent, partout, se comporter comme nos parents, nos proches et nos amis de Ben Guerdane qui se sont levés comme un seul homme pour appuyer et soutenir nos forces de Sécurité intérieure et notre armée nationale, le 7 mars dernier, dans leur bataille contre les terroristes donnant, ainsi, au monde entier, le message d'un peuple héroïque qui, malgré ses modestes moyens, est capable de se battre, seul, avec les moyens du bord, contre le terrorisme et le vaincre pour peu que les pays amis lui fournissent l'armement et les équipements de défense dont il a besoin.
Aussi, nous avons besoin de chefs francs, rigoureux, et déterminés, d'un Etat fort et même très fort. Cet Etat doit, au plus tôt, affirmer son autorité et son prestige, sévir quand il le faut et montrer ses dents au besoin. Il doit être respecté et si nécessaire, craint et redouté.
A cette grande institution qu'est l'Armée nationale qui nous a vus naître et que nous avons vue grandir, à cette école unique de l'ordre et de la discipline, du sacrifice, du don de soi et du patriotisme, à ce corps exceptionnel à qui nous avons offert notre jeunesse pour la défense de notre pays, ce pays auquel nous avons tout donné sans jamais rien demander, nous lui avons légué tout ce que nous avons de plus cher : la Tunisie, notre Patrie ; qu'elle soit toujours fin prête à assurer sa défense et garantir son invulnérabilité.
Je veux associer à cet hommage nos forces de sécurité intérieure et en particulier la Garde nationale qui, cette fois-ci , a payé un lourd tribut, en participant, à Ben Guerdane, à la défense du territoire, en arrosant, par le sang de ses nombreux martyrs, le sol sacré de notre pays. A tous ses hommes, courageux, téméraires et audacieux, toute notre reconnaissance et notre grande estime.
Je veux rendre un hommage particulier à nos soldats, à nos sous-officiers, à nos officiers et à nos camarades les chefs de l'Armée, ces brillants cadres dont nous sommes très fiers et qui perpétuent, par le relais des promotions d'officiers qui se succèdent, cette devise que leurs anciens ont écrit de leur sang ‘‘Dévouement à la Patrie et Fidélité à la République''.
Que Dieu veille et protège la Tunisie éternelle.
* (Ancien sous-chef d'état major
de l'Armée de terre, ancien gouverneur)


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