La décision d'interdire la tenue demain, samedi du congrès annuel du parti Attahrir ayant pour devise «le Califat sauvera le monde» est «une décision gouvernementale nationale souveraine et responsable basée sur un certain nombre de considérations objectives», a déclaré hier à l'agence TAP Kamel Jendoubi, ministre des Relations avec les instances constitutionnelles, de la société civile et des droits de l'Homme. Jendoubi a estimé que cette décision «est un choix politique approprié eu égard à la devise du congrès en relation directe avec la pensée takfiriste et fanatique des groupes terroristes islamistes». Pour le ministre des Relations avec les instances constitutionnelles, de la société civile et des droits de l'Homme, «le feu vert accordé à la tenue de ce congrès équivaudrait à la légitimité accordée à la revendication de l'instauration du Califat et partant la violation des dispositions de la Constitution qui fixe la forme de l'Etat civil tunisien et son régime politique, à savoir «la Tunisie un Etat libre et indépendant, l'islam sa religion, l'arabe sa langue et son régime la République». Le ministre a justifié l'interdiction de la tenue du congrès par «son atteinte à la sécurité publique, car il pourrait susciter des protestations et des affrontements qu'il importe absolument de prévenir». Il a rappelé à cet égard que «tout parti politique légal doit être soumis aux dispositions du décret 87», affirmant que «la Tunisie n'est pas tenue de s'adapter aux particularités de tout parti». «La loi est au-dessus de tous et tous les Tunisiens sont égaux devant la loi, la Constitution étant le cadre dans lequel coexistent tous les Tunisiens quelles que soient leurs divergences», a-t-il ajouté, rappelant «les violations commises par ce parti depuis sa création le 21 juillet 2011 avec la tenue d'activités et la diffusion de déclarations incompatibles avec les dispostions des articles 3 et 4 du décret 87 de l'année 2011 régissant les partis politiques». «Ce parti a été averti à trois reprises, le 10 juillet 2014, le 3 novembre 2014 et le 30 juin 2014», a noté Kamel Jendoubi, indiquant que «la liberté de conscience de tout Tunisien ou Tunisienne si elle est garantie par la Constiution, conformément à la garantie des libertés individuelles dont la liberté d'expression, de croyance et de conscience, les partis politiques sont des structures institutionnelles ayant leur propre cadre légal qui régit leurs activités». Il a tenu à préciser que «l'article 6 de la Constitution stipule que l'Etat protège la religion, la liberté de croyance et de conscience ainsi que l'exercice des cultes religieux, garantit la neutralité des mosquées et des lieux de culte, loin de toute récupération partisane et s'engage à propager les valeurs de modération et de tolérance et à protéger les valeurs sacrées tout en s'engageant à interdir les appels takrifistes, à la haine et à la violence». «Tant que les libertés individuelles se sont transformées en une demande collective et politique réunissant des citoyens tunisiens, la référence devient celle du cadre légal régissant les activités des partis sans ségrégation ou exclusion», a-t-il indiqué. Le parti Ettahrir avait souligné mardi son attachement à la tenue de son congrès annuel le 4 juin, malgré son interdiction par les autorités sécuritaires, rappelle-t-on. «La direction du parti a été surprise de l'interdiction par les autorités sécuritaires de la tenue du congrès sous prétexte de risque de trouble à l'ordre public», a indiqué Imededdine Haddouk, membre du bureau d'information, au sein du parti, lors d'une conférence de presse à Tunis. «Il s'agit là d'une décision abusive et d'une violation criante du droit des partis à exercer leurs activités», a-t-il martelé. Tout en dénonçant la politique de deux poids deux meures pratiquée par les autorités sécuritaires au sujet de l'octroi des autorisations, Haddouk a tenu à préciser que le parti a reçu, le 28 mai, une autorisation pour organiser son congrès annuel, alors que le district de police de Bab Bhar a refusé de lui délivrer ce document. Selon lui, le parti Ettahrir a l'intention de saisir le Tribunal administratif à ce sujet et d'user de tous les moyens pour organiser son congrès dans les délais impartis. Haddouk a tenu à rappeler que le parti Ettahrir avait tenu depuis 2011 quatre congrès sans pour autant obtenir une autorisation à cet effet, ajoutant que ces congrès s'étaient déroulés dans le calme et le respect de la loi. « De telles pratiques ne peuvent qu'augurer du retour de la répression et des restrictions appliquées aux activités partisanes», a-t-il averti. La présidence du gouvernement avait menacé de dissoudre le parti par voie légale après les attentats terroristes de juin 2015 à Sousse, l'accusant de propager des idées extrémistes incompatibles avec le régime républicain et l'Etat civil. Le parti Ettahri, qui avait obtenu le visa en 2012, ne reconnaît pas la Constitution et n'a pas pris part aux élections de 2014 pour son opposition au régime démocratique. Il prône la création du Califat et l'application de la Chariaa.