D'une source de nuisance et de pollution, nos ordures pourraient s'ériger en gisement d'emplois. Et même plus A force de recycler, la Suède doit importer des déchets. Seulement 1 % de ses ordures ménagères finit dans des décharges, contre presque 40 % pour la moyenne de ses voisins européens. Ces données chiffrées, déjà publiées dans le quotidien « Le Monde », il y a quatre ans, ont de quoi surprendre, à bien des égards. Chez nous, la tendance est, tout à fait contraire. L'on enregistre quelque six millions de tonnes de rejets, pêle-mêle, dont le tiers sont des déchets ménagers. Et pourtant, l'on ne voit pas assez d'initiatives de gestion, à plus forte raison de valorisation et puis d'exploitation à bon escient. La valorisation, un enjeu Plus souvent, à la capitale ou ailleurs dans les grandes villes, on risque de crouler sous d'énormes quantités d'ordures, créant, ici et là, des dépotoirs anarchiques, devenus à la longue source de nuisance et de pollution. Hiver comme été, l'on s'offre, par ignorance ou insolence, un paysage désolant, avec une odeur tellement fétide qu'on y passe à grand peine. Mais, dans une société de forte consommation, tout est bon pour recycler, afin de récupérer ce qu'on a déjà utilisé. En tout cas, on s'en tient à l'essentiel de nos résidus. Et c'est leur réutilisation qui leur donne plus de valeur. Tout le monde connaît l'utilité de l'utile, mais personne ne connaît l'utilité de l'inutile, dit Zhuangzi. En fait, l'enjeu de valorisation est de mise. Tout s'articule autour de l'économie verte, un créneau qui continue à avoir sa part du marché à l'international. Il s'impose ainsi de par ses vertus écologiques incontestées, mais aussi de par son gisement d'emplois jusqu'alors sous-exploités. En d'autres termes, un secteur qui produit propre et dont l'entreprise de gestion est censée être l'amie de l'environnement. Le Centre international pour les technologies de l'environnement de Tunis (Citet) a à son actif une expérience reconnue en matière d'assistance et d'accompagnement de pareilles initiatives. De même, l'Agence nationale de gestion des déchets (Anged) a mis du sien. Emplois sous-exploités Dans la foulée de la Journée mondiale de l'environnement, célébrée, chaque année le 5 juin, il est légitimement important de dresser un état de fait propre à un secteur mal en point. Celui de la revalorisation des déchets. Soit l'utilité de l'inutile. Statistiques de l'Anged à l'appui, plus de 1500 entreprises opérent dans ce domaine, dont 138 s'adonnent à la gestion d'un type dangereux. Leur répartition sectorielle permet de révéler une certaine segmentation sélective du marché de déchets dits solides. Au total, 16 unités en matière de verre, 443 petites et moyennes entreprises spécialisées en recyclage du plastique et un peu plus d'une centaine de microprojets en gestion de métaux (ferreux ou pas), d'huiles usagées et d'autres rejets organiques. Reste que les ordures ménagères en constituent le parent pauvre. Toutefois, cette chaîne de récupération n'a pas encore trouvé son compte, notamment en termes d'emplois verts à générer. D'autant plus, sa concentration dans un périmètre géographique aussi limité dans le Grand-Tunis en a fait un marché monopolisé. Et encore moins prometteur, vu les freins des formalités administratives et les difficultés financières auxquelles sont toujours confrontés les jeunes promoteurs. Economie circulaire Certes, cela ne pèse pas uniquement sur l'économie verte, mais l'affecte le plus, étant donné son caractère atypique et non conventionnel. Alors qu'il présente des opportunités considérables en termes d'employabilité. A ce titre, plus de 30.500 emplois verts ont été créés dans les secteurs public et privé, dont les deux tiers relèvent de la gestion des déchets. Peu d'activités, soi-disant, rémunératrices opérationnelles dans la valorisation du plastique, tel le système « Ecolef », initié par l'Anged. Autre chiffre révélateur: l'on ne recycle que 5% des déchets collectés. Réticence ou manque de moyens, ça revient au même. Quid des solutions ? Effectivement, l'Anged semble être près de mettre en place un mécanisme de soutien à l'investissement dans les filières de valorisation et du recyclage des déchets, tirant parti de la coopération tuniso-allemande. Pour rappel, une étude réalisée en 2012 intitulée « pour une meilleure adaptabilité environnementale et socioéconomique du système de gestion des déchets en Tunisie » avait, alors, mis en avant de multiples opportunités. Il s'agit de collecte des déchets ménagers pour le compte des communes, de compostage, valorisation de déchets ménagers non organiques, débris de construction, ainsi que de relance des filières variées « ecozit», huiles alimentaires usagées, pneumatiques et valorisation énergétique de la biomasse. Ce long cycle de valorisation est de nature à promouvoir ce qu'on appelle l'économie circulaire.