Au cours des deux dernières saisons culturelles, nous l'avons rencontrée au gré des expositions et des manifestations d'arts plastiques dans différentes postures. Parfois peintre, parfois photographe, souvent vidéaste et scénographe, par moments même journaliste et critique d'art, y compris sur les colonnes de nos pages culturelles. Sélima Karoui, 33 ans, étonne et déroute par toutes les expériences qu'elle ne cesse de tenter depuis les années de formation à l'Ecole des Beaux arts de Tunis et à la Sorbonne (Paris) où elle poursuivait des études de troisième cycle. L'artiste serait-elle en quête d'une identité propre? D'une voie, d'un cheminement personnel et précis dans le flot de toutes ces expressions ? «Les démarches et recherches artistiques que je souhaite mettre en place se sentent une proximité avec ce que nous appelons de nos jours ‘‘les expressions contemporaines'', qui revendiquent justement cette possibilité de proposer une identité conceptuelle mise en place à partir d'une idée, mais que peuvent imager et imaginer plusieurs lectures», réplique Sélima Karoui. Elle avance une tentative d'autoprésentation : « Si réellement nous avons besoin d'une définition, je me dirais ‘‘artiste visuelle'' pour revenir au décloisonnement des disciplines et les regrouper sous cette notion commune de ‘‘visuel'', comme ce qui se rapporte à la vue, à la vision que nous pourrions avoir des choses. ‘‘Voir et donner à voir'', cela me correspondrait assez». Sélima Karoui fait partie d'une nouvelle génération d'artistes plasticiens tunisiens férus de pluridisciplinarité. Tous les moyens sont bons pour raconter une idée. Le plus important reste de garder l'émotion, de la développer, de la mettre en formes. L'émotion, la jeune artiste la puise dans son corps. Tout son travail tourne autour de «l'auto-figure » qu'elle explore sous toutes ses coutures. Son corps devient le matériau privilégié pour exprimer une féminité à fleur de peau, voilée, flouée, dominée par l'ombre, le tabou, l'effacement…C'est ce qui ressort de son installation exposée lors du «Collectif blanc», exposition organisée par la galerie le 14 en décembre dernier ou de la sensualité plastique de la toile présentée à Sexy Art II, à la galerie Aire Libre à El Mechtel. Mais c'est dans la vidéo-performance que l'auto-figure apparaît avec plus d'intensité. Son corps y est signe, objet et sujet de l'œuvre. Sélima Karoui, qui vient de concevoir à Dar Sebastien à Hammamet une manifestation, réunissant artistes venus des deux rives de la Méditerranée, intitulée Arts visuels et sonores, croit dur comme fer à la «plasticité corporelle». Ses autoportraits filmés sont, écrit-elle dans son book, «toujours en rapport avec un contexte. Celui d'un parcours réfléchi autour de la notion de ‘‘quotidien'', le mien, et par ‘‘feed back'', celui de l'autre. Indissociable du contexte socio-culturel dans lequel Je-Nous gravitons». La vie de l'artiste aujourd'hui foisonne de projets. Tout d'abord la soutenance à la fin de cette année de sa thèse de doctorat où elle aborde encore le thème de la vidéo performative. Ensuite une exposition personnelle. Et des livres sur les artistes Néjib Ben Khalfallah et Ramzi Souani.