Par M'hamed JAIBI L'accord signé solennellement mercredi par les douze composantes associées au projet de gouvernement d'union nationale ouvre, en fait, une étape qualitative nouvelle dans le laborieux processus de la transition démocratique. L'étape, pourrions-nous dire, de la maturation des objectifs patriotiques fondamentaux auxquels s'attachent les Tunisiens dans leur ensemble. Ceux-là mêmes qu'à brandis la révolution. La plénitude du pouvoir La révolution populaire avait, dans un premier temps, donné l'impression d'être en mesure de donner la plénitude du pouvoir à chacune des forces politiques en présence, et notamment celles d'essence idéologique, ou prônant des «solutions» radicales. Les évolutions internationales qu'a connues le «printemps arabe» et la sagesse des Tunisiens ont réussi à incurver cette trajectoire fatale pour enfanter un projet consensuel viable coulé dans une Constitution moderne, malgré certains compromis étriqués et quelques incohérences. Un gouvernement à quatre Le compromis de gouvernement s'appuyant sur une large majorité parlementaire de quatre partis, qui sera mis en place au lendemain des élections de 2014, malgré la victoire du camp moderniste autour de Béji Caïd Essebsi, a permis au pays d'offrir au monde entier une expérience historique tout-à-fait nouvelle en matière d'épilogue révolutionnaire, celle du consensus. Avec l'accord sur les axes du futur gouvernement d'union et l'engagement à le doter d'un appui patriotique solidaire de l'ensemble des neuf partis et trois organisations, le pays se fraie une voie crédible vers le sursaut et le salut. Une voie crédible vers le salut Certains acteurs ou observateurs politiques placent, malheureusement, au second plan la symbolique grandiose de ce futur gouvernement de sauvetage formé et appuyé par le large éventail politique national, préférant imaginer et privilégier des «conspirations» et des «stratagèmes» mal inspirés. Le fait est que le chef de l'Etat avait et a une certaine autorité morale lui permettant de suggérer un gouvernement de relance même monocolore, et qui obtienne la confiance de l'Assemblée. Son initiative est allée bien au-delà, ouvrant les bras à tous, en un pari majestueux, démocratique et pluraliste, sur l'avenir et son édification commune et solidaire. Un pari bien compris et apprécié par toutes les composantes de l'initiative de gouvernement d'union nationale et par d'autres qui s'apprêtent à l'appuyer. Un geste très attendu Il est de ce fait prévisible de voir le chef du gouvernement actuel, lui, qui échange avec le président de la République des relations privilégiées de confiance absolue, prendre l'initiative d'un geste très attendu de la part de tous ceux qui lui connaissent le dévouement patriotique dont il s'honore, celui de hâter la formation du gouvernement de sauvetage et son entrée en fonction. Habib Essid gardera à son crédit d'avoir formé et dirigé le premier gouvernement consensuel. Un gouvernement qui était promis aux tiraillements et aux luttes internes les plus terribles entre ses multiples ailes, mais où il a réussi à faire régner l'esprit du compromis patriotique. Conduire le pays à la victoire Ce même esprit qu'il s'agit aujourd'hui d'élargir et d'inoculer au sein du prochain gouvernement, pour conduire le pays à la victoire. Sachant que beaucoup a été fait par Essid en matière de sécurité et d'éradication du terrorisme. Certes, le pari n'est pas aisé, plaçant dans la balance le succès escompté du gouvernement d'union nationale. Mais il est essentiel de grandir et magnifier cette formidable quête de mobilisation patriotique dont a pris l'initiative le chef de l'Etat. Une quête qui mérite de voir absolument toutes les énergies du pays se mettre à son noble service. Avec foi et sans la moindre exception. Tout en préservant les irremplaçables acquis pluralistes et démocratiques.