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Ramzi Bouassida, Expert en Finances publiques et Locales à La Presse: «La réforme fiscale est devenue nécessaire pour préserver les équilibres budgétaires précaires»
Publié dans La Presse de Tunisie le 27 - 12 - 2023

Il est manifeste que le régime déclaratif actuel a atteint ses limites, et il est impératif d'engager une réforme fondamentale. Dans le contexte économique et financier actuel, cette réforme est plus que primordiale. Les signes alarmants, tels que l'évasion fiscale, la pression fiscale élevée, et la complexité du système appellent à des mesures audacieuses et stratégiques.
Quel diagnostic faites-vous du régime fiscal actuel ?
Le régime fiscal tunisien repose sur un modèle déclaratif, exigeant des contribuables qu'ils déclarent leurs revenus, biens ou transactions financières aux autorités fiscales. Contrairement à d'autres systèmes où l'administration fiscale établit elle-même l'assiette fiscale, dans un système déclaratif, les contribuables sont tenus de fournir des informations exactes et complètes sur leurs activités financières.
Ce système, pour être fiable, suppose plusieurs éléments cruciaux : La confiance et la transparence entre l'administration fiscale et les contribuables sont essentielles. Ces derniers sont censés fournir des informations exactes, créant ainsi une relation de confiance mutuelle. Un système de vérification et de contrôle efficace est nécessaire. Bien que les contribuables soient responsables de la déclaration initiale, l'administration fiscale peut effectuer des vérifications pour garantir l'exactitude des informations fournies. Des sanctions, des amendes et des poursuites pénales peuvent être imposées en cas de non-conformité. Un programme d'éducation fiscale est essentiel pour aider les contribuables à comprendre leurs obligations fiscales et à remplir correctement leurs déclarations. Cela contribue à promouvoir la conformité et à réduire les erreurs dans les déclarations.
Il est important de souligner que la collaboration et la compréhension mutuelle entre l'administration fiscale et les contribuables sont des éléments fondamentaux pour le bon fonctionnement du système déclaratif, garantissant ainsi une collecte de revenus juste et transparente. La Tunisie a connu au cours de la dernière décennie l'adoption de plus de 300 procédures lors des lois de finances, une grande partie de celles-ci étant des augmentations d'impôts. Ce phénomène a contribué à une instabilité juridictionnelle déjà exacerbée par des contextes politique et économique fluctuants.
Malgré les efforts déployés par l'administration fiscale en matière de contrôle et de recouvrement, cette dernière peine à couvrir l'ensemble de la population. Le secteur parallèle continue de s'étendre, suscitant des inquiétudes majeures. Les experts estiment qu'il représente environ 40% du PIB et emploie 50% de la population active, tout en accaparant une part significative de la liquidité.
En ajoutant à ces défis une faible adhésion au civisme fiscal, la pression fiscale atteint 25%, l'une des plus élevées en Afrique. Cette statistique est remarquablement proche de celle observée dans les pays de l'Ocde, ce qui soulève des paradoxes en termes de services fournis, de conformité fiscale et d'équité dans la contribution des citoyens.
La nécessité de stabiliser le cadre juridique, de renforcer les mesures de contrôle fiscal, d'encourager la conformité et d'améliorer l'équité fiscale devient impérative pour promouvoir une croissance économique soutenue et assurer une distribution plus équitable des charges fiscales au sein de la société.
Dans ce contexte, la question cruciale qui se pose est la suivante : qui en Tunisie est satisfait du régime fiscal en vigueur ?
Certainement pas les contribuables et les investisseurs, qui font face à une pression fiscale croissante ainsi qu'à une complexité accrue des procédures et des textes fiscaux. Les experts eux-mêmes réclament de manière constante une réforme fiscale structurelle pour remédier à ces problèmes.
Les institutions financières internationales ne sont pas satisfaites non plus, elles appellent de manière persistante à une réforme globale des finances publiques, englobant le système fiscal, le régime de compensation et les entreprises publiques. Même le gouvernement, bien qu'il introduise des réformes et augmente l'imposition dans le but de collecter davantage de ressources pour faire face aux exigences des finances publiques, ne semble pas être pleinement satisfait du statu quo.
Cette insatisfaction généralisée souligne la nécessité urgente d'une révision approfondie du régime fiscal en place, afin de promouvoir un système plus équitable, transparent et efficace, répondant aux besoins de toutes les parties prenantes tout en favorisant le développement économique durable.
La deuxième question cruciale qui se pose est : quand et comment entreprendre cette réforme fiscale ?
Pour y répondre de manière éclairée, il est impératif de se fixer des objectifs clairs et réalisables. Il faut mettre fin à la dépendance à l'égard des institutions financières internationales pour le financement de la consommation. Cela implique de ne plus opter pour la solution facile mais dangereuse de s'endetter, compromettant ainsi le bien-être financier des générations futures.
Il est nécessaire d'impliquer activement le conseil national de la fiscalité, les experts, les organisations de la société civile, les ordres professionnels, et tous les citoyens dans le processus de réforme. Assurer leur adhésion est essentiel pour la réussite et la légitimité de toute initiative de cette envergure. Il est obligatoire de présenter aux instances internationales un plan de réforme fiscale à moyen et à long terme. Ce plan devrait inclure des propositions concrètes, des objectifs spécifiques et les moyens nécessaires à la mise en œuvre réussie par l'Etat.
Assurer que le financement de la réforme soit prévu et durable. Cela pourrait impliquer la mobilisation de ressources internationales, mais aussi le développement de mécanismes internes efficaces pour soutenir financièrement la mise en œuvre de la réforme.
En adoptant une approche stratégique et participative, la réforme fiscale peut devenir une opportunité de renforcer la stabilité économique, de promouvoir l'équité fiscale et d'assurer la durabilité financière pour les générations à venir.
Dans le contexte économique actuel, entreprendre une réforme fiscale ne sera certainement pas facile, mais elle est devenue nécessaire pour préserver les équilibres budgétaires précaires. Malgré les efforts considérables de l'administration fiscale qui parvient chaque année à accroître les ressources budgétaires, il est essentiel de se demander quand cela sera durablement possible.
Face à une augmentation significative des charges publiques et aux défis majeurs auxquels la société tunisienne est confrontée, nécessitant des réformes dans des secteurs cruciaux, élargir l'assiette fiscale et prévoir une baisse progressive des taux devient une impérative nécessité. Renforcer le contrôle et le recouvrement est essentiel pour faire face à l'évasion fiscale, la fraude et le blanchiment d'argent.
La politique actuelle du gouvernement, bien qu'introduisant des réformes de manière progressive, ne semble pas suffisamment perceptible pour la majorité des citoyens, confrontés à des besoins de financement considérables.
Des mesures à effets immédiats pourraient être avancées pour atténuer les défis actuels, notamment : la digitalisation des services financiers et la mise en œuvre de l'identifiant unique constituent une mesure stratégique pour moderniser et renforcer l'efficacité du système fiscal. Elle permet de relier les bases de données de différentes institutions, facilitant ainsi le recoupement des informations. Elle simplifie les processus administratifs, réduisant les délais de traitement et améliorant l'efficacité globale. Cette digitalisation permet une traçabilité accrue des transactions financières, renforçant la transparence du système. Cela favorise la conformité fiscale en dissuadant les comportements non conformes.
L'adoption d'une nouvelle monnaie nationale, bien que coûteuse, pourrait éponger la liquidité du secteur parallèle, réduisant ainsi les transactions informelles et les activités non déclarées. Elle pourrait aussi faciliter le suivi des transactions et des flux de capitaux, permettant ainsi d'identifier plus efficacement les sources potentielles d'évasion fiscale. Elle peut offrir des avantages à long terme en renforçant la transparence financière et en stimulant la confiance dans le système économique lorsqu'elle est soigneusement planifiée pour minimiser les risques potentiels.
L'avancement de la politique du decashing, en particulier pour les personnes morales et certaines activités générant un volume important de liquidité telles que l'automobile, la vente en gros et les paris sportifs, peut entraîner des ajustements et une adaptation progressive de ces secteurs. L'introduction de ces restrictions a des implications significatives, notamment la réduction de l'économie informelle et la promotion des paiements électroniques. Cependant, cela nécessite un soutien légal et réglementaire solide, ainsi que des efforts substantiels de communication et de vulgarisation pour assurer une transition réussie.
L'assouplissement des procédures en matière de change et l'intégration de plusieurs nouveaux métiers, tels que les créateurs de contenu, les freelancers, et les sociétés de paris sportifs identifiées en tant que services informatiques, peuvent avoir des avantages significatifs. Elles peuvent contribuer à stimuler l'innovation, à favoriser la compétitivité et à adapter les réglementations aux réalités du travail moderne. Une approche équilibrée entre la facilitation des affaires et la protection des intérêts financiers est cruciale.
Le renforcement de la Brigade des investigations et de la lutte contre l'évasion fiscale nécessite une approche holistique combinant des ressources humaines spécialisées, des outils technologiques avancés et des moyens juridictionnels renforcés. La pénalisation de l'évasion fiscale, tout en évitant l'incarcération, peut être mise en œuvre. Cette approche doit prendre en considération le caractère dissuasif, les sanctions imposées pour l'évasion fiscale doivent être suffisamment dissuasives pour prévenir de telles pratiques. L'imposition de travaux pour le bien public peut être une mesure punitive efficace tout en contribuant positivement à la société. En parallèle, l'application de sanctions devrait être accompagnée de programmes de sensibilisation visant à informer le public sur les conséquences de l'évasion fiscale et à encourager la conformité fiscale.
En somme, la pénalisation de l'évasion fiscale à travers des sanctions de travaux pour le bien public peut être une stratégie équilibrée visant à dissuader les pratiques illicites tout en promouvant des contributions positives à la société. La mise en œuvre doit être soigneusement planifiée pour assurer l'équité et l'efficacité du système.
Enfin, il est manifeste que le régime déclaratif actuel a atteint ses limites, et il est impératif d'engager une réforme fondamentale. Dans le contexte économique et financier actuel, cette réforme est plus que primordiale. Les signes alarmants, tels que l'évasion fiscale, la pression fiscale élevée, et la complexité du système, appellent à des mesures audacieuses et stratégiques. Il est crucial de repenser et de moderniser le cadre fiscal pour le rendre plus transparent, équitable, et adapté aux réalités émergentes. Il est impératif pour le gouvernement, et en particulier pour le ministère des Finances, de s'affranchir des sentiers battus et d'adopter des solutions innovantes pour relever les défis croissants auxquels le pays est confronté.


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