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Identité à l'ère de la mondialisation
Opinions
Publié dans La Presse de Tunisie le 06 - 09 - 2010

Par Azouz Ben Temessek (Assistant en droit public à la faculté de Droit de Sousse)
La signification actuelle de la mondialisation se confine-t-elle à la mondialisation économique? Dans cette optique, la mondialisation soulève toute une série de problèmes et qui ne sont nouveaux que dans un sens relatif, puisqu'ils ne sont, en fin de compte, que la projection à l'échelle mondiale de problèmes appartenant intrinsèquement à l'économie de marché en tant que telle.
Aussi, à côté de ceux qui voient dans l'expansion du «marché libre», selon la pure dynamique de ses «lois» internes, le préalable d'une prospérité économique toujours plus grande pour toute l'humanité, se trouvent ceux qui soulignent les risques réels de conséquences économiques et sociales désastreuses pour des régions et couches entières de l'humanité si des «règles», mesures correctives et garanties ne sont pas formulées et adoptées rapidement pour contrebalancer la logique économique avec les besoins en justice et la garantie des droits humains fondamentaux. De toute manière, on n'a pas l'intention de s'attaquer à ce type de problèmes (certes cruciaux, complexes et urgents), car on souhaite se pencher ici sur plusieurs caractéristiques plutôt préoccupantes que démontre le processus de mondialisation, pas tant au niveau économique que sur le plan humain et anthropologique plus général, signes de malaise qui sont, d'ailleurs, apparus bien avant que la mondialisation économique se soit affirmée avec toutes ces preuves, c'est-à-dire depuis plusieurs décennies, quand a été adoptée l'expression de « village mondial» pour indiquer symboliquement la nouvelle carte sociologique que le monde allait adopter, suite à la diffusion massive de la communication et de l'information. Nul doute qu'au premier plan de ces caractéristiques préoccupantes se situe l'accélération d'un phénomène de perte «d'identité individuelle» qui afflige, depuis quelque temps, la grande partie de ce que nous appelons les sociétés «avancées».
Racines de l'identité individuelle
Elles sont offertes spontanément et garanties à chacun par la reconnaissance implicite d'appartenir à une communauté vitale, c'est-à-dire une collectivité qui ne consiste pas simplement en une «pluralité» d'êtres humains, mais qui se reconnaît elle-même dans une histoire et un destin communs. Au sein d'une même famille, cellule la plus fondamentale de ces communautés, les liens du sang ont une valeur bien plus riche et profonde que le lien biologique : de fait, il s'agit de la greffe sur une origine qui est riche de sa propre histoire, ayant hérité d'idéaux, de modèles de vie et de valeurs transmis de génération en génération et consignés à la mémoire de père en fils. Cette filière a traversé bien des vicissitudes, de souffrances, gloires et erreurs dont les membres actuels pourraient être fiers ou, au contraire, dont ils auront honte, mais qu'ils ne sauraient juger à aucun moment comme «étrangers», puisque les divers membres sentent, d'une certaine manière, qu'ils participent à un destin commun où ils se sentent tous solidaires et auquel ils contribuent tous. Cette «appartenance» s'étend avec des connotations analogues à la famille élargie, à la tribu, à la ville et à la nation et qui confère un caractère à leur identité individuelle.
Au XIXe siècle, ce concept profond de la solidarité existentielle a donné naissance à l'idée de la nation, capable de susciter de solides sentiments d'identité, la quête de nobles idéaux, éveillant l'héroïsme et inspirant l'expression littéraire et artistique. A cette époque, l'individu avait une perception précise de son identité unique, de sa responsabilité et créativité propre, sachant, par ailleurs, qu'il faisait une contribution positive à la création d'une communauté nationale ainsi qu'au développement et à la gloire de cette dernière. C'est ainsi que l'idée de la nation, naissant de la pensée romantique, devint l'idéal authentique qui a été le moteur de l'histoire occidentale pendant pratiquement tout ce siècle et qui a continué à l'être même lorsque certains éléments ont commencé à briser l'image.
De fait, rappelons-nous que si les pères fondateurs du mouvement national du XIXe siècle avaient développé l'idée, d'une part, d'une identité spécifique, d'autre part, ils mettaient en avant leur complémentarité mutuelle et la richesse d'une coexistence harmonieuse. A quelques exceptions et alors même qu'ils célébraient une sorte de «primauté» de la nation à laquelle ils appartenaient (normal sous l'angle historique dans le cas de nations luttant encore pour devenir une unité politique comme l'Italie et l'Allemagne), ils ne sont pas allés jusqu'à réclamer cette primauté et dominance de leur nation sur les autres. Il suffira de mentionner, à cet égard, les noms de Mazzini et Bolivar.
Erosion des identités nationales
Malheureusement, la dégénération de cette idée dans les formes aberrantes du nationalisme (neutralisant le concept original susmentionné de la positivité et de la complémentarité des différences nationales) a causé les expériences historiques tragiques marquant la première moitié du XXe siècle et la réaction ainsi suscitée a valu un rejet total du concept même de la nation (de nos jours, le terme a pratiquement disparu du discours ordinaire ou même politique, remplacé par le terme plus faible de «pays»). Et pourtant se créait un véritable vide de l'idéal dans la civilisation occidentale contemporaine dans lequel se sont infiltrés des semblants tacites et dangereux de l'idée de nation, tels que les égoïsmes raciaux et ethniques qui ne sont rien de plus que les projections, au niveau collectif, de l'esprit individualiste qui imprègne tout de nos jours.
Aujourd'hui, la perte généralisée des identités nationales est à l'origine d'un phénomène qu'on pourrait nommer «régression» ou «involution historique». Un grand nombre de celles jugées de solides nations fortes d'une longue histoire assistent au phénomène du séparatisme souvent très accentué et même à des exaltations de différentes forces destructrices que la démarche historique avait domptées et intégrées à l'unité de la nation. Le vide culturel, social et politique de ces phénomènes est apparu dès que nous avons réalisé qu'ils n'avaient pas tous produit le fondement ou peut-être la récupération de communautés véritablement inspirées par un sentiment spirituel et idéal «d'appartenance» à une tradition, une histoire et à un destin commun, mais se montraient sous leur véritable jour comme des tentatives de poursuivre une meilleure défense des intérêts locaux maquillés dans un langage vague et générique d'identités piétinées. Aussi, l'image que nous présente l'histoire actuelle reflète-t-elle le paradoxe d'une mondialisation qui tend à dissoudre divers types de frontières entre les gens, causant de massives migrations, mélangeant des traditions et des cultures et qui projette l'avenir sous forme d'une société planétaire, alors que, par ailleurs, grouillent de partout les particularismes, esprit sécessionniste, violents conflits tribaux et intolérances ethniques, raciales et religieuses. Ces deux dynamiques qui s'opposent ont pour résultat une perte croissante de l'identité, à savoir de ces racines qui confèrent à l'être humain un cadre de référence pour lui-même, lui faisant croire qu'il est existentiellement pareil à d'autres être humains avec lesquels il partage un héritage commun de valeurs, coutumes et engagements.
Prise de conscience anthropologique
Pour changer cette situation négative à l'avis d'un grand nombre et pour redonner un sens et une valeur à la marche inexorable de la mondialisation, l'idée pourrait germer d'essayer à nouveau, à échelle ambitieuse, une démarche analogue à la création de l'idéal de nationalité et de passer à sa réalisation historique. Et pourtant, de nos jours, il semble pratiquement impossible de répéter un tel processus pour toute l'humanité, justement parce que sont absents les éléments pour percevoir que la communauté de l'histoire et du destin a soutenu l'évolution de l'idée de la nation (non par chance, elle est née il y a moins de deux siècles, mais grâce à une profonde réflexion). Certes, si de nos jours un grand nombre de personnes commencent, même avec de nombreuses incertitudes, à concevoir une communauté d'histoire et de destin (comme les populations de l'Europe et des deux Amériques), il n'en reste pas moins que cette prise de conscience est absente dans bien d'autres parties du monde et d'autant plus que ces différentes «histoires communes», ayant été séparées dans l'espace et dans le temps pendant des millénaires et continuant, d'ailleurs, à être ignorées les unes des autres, ne sauront nullement donner naissance à un sentiment d'histoire commune de l'humanité.
Peut-être assisterons-nous, dans un avenir pas trop lointain, à une prise de conscience analogue grâce à une réflexion non scientifique sur l'histoire commune de l'humanité, interprétée non plus dans l'optique politico-militaire, mais d'une point de vue anthropologique, c'est-à-dire en voyant comment la race humaine dans les diverses latitudes a franchi les étapes de l'évolution culturelle analogues à bien des égards et donnant vie à des formes de civilisation et de culture qui sont originales et extrêmement différentes, mais tout à fait analogues à bien des égards, comparables, compréhensibles et valorisée par tous. Pourrait bien venir, ensuite, une reconnaissance de la destinée commune que les générations à venir seront forcées d'accepter face aux graves problèmes écologiques qui se profilent à l'horizon ainsi que les graves problèmes sociaux que la mondialisation entraînera de plus en plus dans son sillon.
Diversité et ouverture sur l'autre
Il existe à l'évidence des perspectives futuristes. Le chemin le plus pratique serait le même que celui caractérisé par le changement du concept de nation, à savoir une plus grande diversité que la mondialisation tend à faire disparaître, mais que la sagesse demande qu'on garde, non pas comme un signe de quelque chose d'étranger ou même d'inférieur, si on compare à des modèles de vie ou des valeurs différents des ceux de notre propre groupe, mais de fait des sources authentiques de valeur et richesse. Les nations à leur heure de gloire ont puisé dans les diversités qui existaient en leur sein et ont récolté les fruits de la civilisation, de la splendeur, du succès et du pouvoir. Le sentiment de l'identité nationale continuait à être très fort même dans des populations avec différentes langues, religions et origines ethniques (par exemple la Suisse, les Etats-Unis et la Russie).
Aussi, n'existe-t-il pas d'exemples historiques pour appuyer ce projet qui présuppose pourtant la disponibilité d'une attitude spirituelle précise, à savoir la croyance intime que les autres ont bien des choses que je n'ai pas et qu'elles ont de la valeur en elles-mêmes ou pourraient même avoir de la valeur pour moi. Ce n'est pas une mentalité que l'on acquiert aisément, car elle suppose une connaissance de ses propres limites culturelles, historiques, institutionnelles et politiques. Chaque culture se nourrit de l'illusion d'être le centre du monde et de l'histoire (ce n'est pas une déformation attribuable uniquement à l'Eurocentrisme si vitupérée : elle est bien connue des Chinois, des Mexicains et même des cultures primitives). De nos jours, il s'agit de renoncer à la recherche d'un nouveau centre pour réaliser que les limites humaines d'une personne ou d'une culture, aussi avancée soit-elle, l'empêcheront toujours d'englober la gamme complète de ce qui est bon, beau et valide pour tous les hommes, tout en sachant qu'ils ont tous quelque chose à contribuer et à apprendre des autres. Armés d'une telle connaissance, l'homme à l'âge de la mondialisation pourra continuer à chercher les racines de son identité et en même temps s'ouvrir et s'enrichir du partage des contributions et traditions qui lui viennent des autres.


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