Par M'hamed JAIBI La formation du gouvernement d'union nationale autour de Youssef Chahed a sans aucun doute relancé l'action gouvernementale et élargi la majorité parlementaire sur laquelle elle s'adosse, mais cette majorité composite, dont le groupe parlementaire d'Ennahdha est le plus fourni, a fortement besoin, et de toute urgence, d'un bloc stabilisateur axial à même de donner une cohérence pertinente et stable à la nouvelle stratégie d'action d'union nationale. L'agitation déconcentre le gouvernement Les récents événements de Kasserine, Ben Guerdène, Fernana..., les divers sit-in disparates, les menaces de grèves qui persistent, les velléités de revendications salariales çà et là, et les actions dispersées desdits «empêchés de travail» qui menacent de blocage les divers sites productifs déconcentrent le gouvernement, perturbant ainsi sa quête de réformes décisives appelées à remettre en ordre les exigences primordiales d'une relance de l'économie nationale. Ce climat général d'agitation diversifiée risque de jeter le doute sur les capacités des pouvoirs publics à maintenir le cap de l'action de redressement promise par Youssef Chahed. Surtout qu'il est attisé par des déclarations et mises en cause de la part de certains chevaux de retour, et relayé sur le terrain par de petits groupes d'activistes qui «encadrent» les protestataires. Une nécessaire présence politique sur le terrain D'où la nécessaire réflexion sur une indispensable présence politique active dans toutes les régions du pays, et notamment les zones chaudes, qui sache faire écho à l'œuvre menée par le gouvernement d'union nationale et la majorité parlementaire en faveur de la reconstruction. Cette présence devrait revenir en priorité au noyau central de l'alliance gouvernementale, c'est-à-dire Nida Tounès. Mais la désarticulation de ce parti, l'inconsistance de ses structures et les désaccords qui le traversent viennent s'ajouter à la crise profonde qui l'avait déjà divisé en trois ou quatre tranches mouvantes, toutes cependant attachées au leadership de Béji Caïd Essebsi. De sorte que se pose, aujourd'hui, l'utilité de l'émergence urgente d'un bloc politique stabilisateur à même de représenter le noyau dur de la nouvelle stratégie d'action d'union nationale. Le nouveau chef de file En proposant Youssef Chahed à la primature, le président de la République, qui ne croit pas au dédoublement de la personnalité, a implicitement désigné, en sa qualité de leader fondateur de Nida Tounès, le nouveau chef de file qu'il souhaiterait voir s'imposer à l'ensemble des nidaïstes et même à l'ensemble de l'ancienne alliance anti-Troïka qu'il avait soudée, en cercles concentriques, en 2012 et 2013, avec Al Massar, Al Joumhouri, le Front populaire, l'Alliance démocratique... Or, il se trouve que si l'alliance la plus large est acquise au sein et en faveur du gouvernement d'union nationale, le cercle central fait aujourd'hui défaut. Et il faut absolument qu'il reprenne sa place, faute de voir tout l'échafaudage s'écrouler. Maintenant, plusieurs hypothèses restent possibles≈: resouder les morceaux du Nida Tounès historique, reconstruire un Nida fédéré élargi, construire un nouveau parti centriste... Mais une chose est sûre, c'est que la majorité a besoin d'un parti noyau dur.