Par Abdelhamid Gmati L'année 2017 sera difficile, nous dit-on. Sur tous les plans, en particulier économique. Plus difficile que les cinq précédentes qui n'ont pas été roses non plus. Le chef du gouvernement ne cesse de dire que la situation est alarmante. Ses prédécesseurs ont eux aussi parlé de conjoncture difficile, de situation « catastrophique », de la nécessité de faire des sacrifices... Certains vont même jusqu'à avertir que « la Tunisie est au bord de la faillite ». Ce qui est impropre quand il s'agit d'un pays. Une entreprise peut se déclarer en faillite et mettre la clef sous la porte pour aller chercher ailleurs. Mais un pays ? Va-t-on fermer le pays, le dissoudre ? Soyons sérieux. Tout le monde sait que le pays va mal et chacun vit une situation difficile : l'Etat, dont les caisses sont pratiquement vides, les entreprises en butte à plusieurs difficultés et le citoyen dont le pouvoir d'achat s'est fortement amoindri. Ce diagnostic alarmant, on a fini par le connaître. Et on en a marre de ces discours alarmistes et apparemment stériles. On veut des solutions. Il est évident que le gouvernement ne dispose pas d'une baguette magique pour remettre tout dans l'ordre. Mais il a proposé une série de mesures à même de faciliter la relance économique. Et pour commencer, il est à la recherche d'investissements nationaux et étrangers permettant de soutenir le plan de développement et de faire face aux obligations budgétaires. Et, pour attirer les capitaux, il faut de la sécurité et une paix sociale. Et c'est là que le bât blesse : plus de 1.000 entreprises ont quitté le pays, le tourisme est sinistré, la production de phosphate et dérivés est dérisoire et les raisons sont à chercher du côté des revendications excessives et des grèves à répétition. Et l'Ugtt a refusé la proposition de Youssef Chahed de geler les augmentations de salaires. Le gouvernement reconnaît que ces augmentations sont légitimes et réglementaires mais il demande un sursis, l'état actuel des finances du pays ne permettant pas de les honorer. L'endettement du pays ces dernières années est motivé essentiellement pour cette question des salaires qui ont fortement augmenté du fait de recrutements intensifs, inconsidérés. « Une croissance sans création de richesse est une croissance fallacieuse, le miroir aux alouettes. Le pays est déterminé à casser cette spirale de l'endettement pour cause de paiement des salaires. Trop c'est trop, il faut mettre le holà », estime Fadhel Abdelkefi, ministre du Développement, de l'Investissement et de la Coopération internationale. Les syndicats, qui par ailleurs sont conscients de la situation du pays, devraient prendre cela en considération. Certes, il n'est pas question que seuls les salariés consentent des sacrifices. Mais aller chercher des sous ailleurs ne dispense pas les salariés de supporter une partie du fardeau. Que fera l'Ugtt si l'Etat est en cessation de paiement des salaires ? La centrale prendra-t-elle la relève ? Un petit effort, de la coopération et des négociations, sans chantage à la grève, devrait aboutir à des compromis acceptables. De son côté, l'Utica, qui se déclare disposée à poursuivre les pourparlers, devrait le faire dans un esprit constructif et assumer aussi ses responsabilités. Les négociations aboutissent des accords solides si on est prêt à quelques compromis. Et il y a cette violence, probablement téléguidée, des chômeurs. Et avec cette violence, les compromis sont stériles. Dans l'affaire Petrofac, on avait cru la crise résolue. Eh bien, non ! Vendredi dernier, un groupe de chômeurs a procédé à la séquestration de quatre camions transportant du gaz pour le compte de la compagnie. « La situation est difficile », a reconnu Youssef Chahed, mais « grâce à une forte volonté politique et une mobilisation de tous les Tunisiens, nous pourrions nous en sortir ». Le temps des discours est révolu. Place à l'action. Il est temps d'agir, Messieurs du gouvernement. Et tant pis s'il y a des mécontents. Il y va de l'avenir de la Tunisie.